A l’Ombre du Dé
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 Sombre

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Johan Scipion
Chevalier noir
Johan Scipion


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Devise : Dark is beautiful
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyVen 9 Mar - 20:55

L'auberge rouge sang – au Centre National du Jeu – mars 2012



L'autre jour, j'étais allé traîner mes guêtres du côté de l'Atelier du JdR (des ptits gars qui n'en veulent des jeux indies, surtout quand y'a de gros bouts ne narrativisme dedans). Ce rendez-vous mensuel se tient dans les locaux du Centre National du Jeu. La ludothèque de Boul-Bil en fait, mais CNJ, c'est plus clâââsse. Or les gens de la ludo m'ont fort aimablement invité à repasser chez eux pour faire une démo de Sombre. Aussitôt dit, aussitôt fait.



Le brainstorming

Nous partîmes trois préinscrits (quatre en fait, l'un d'eux ayant prévenu qu'il amènerait son frère, extérieur au club) mais par un prompt renfort, nous nous vîmes cinq joueurs en arrivant à la table. J'ai un créneau 14h - 19h mais, le temps qu'on s'installe (dans une petite pièce au calme, très cool), il est déjà 14h30. Un peu plus de trente minutes plus tard, j'ai expliqué les règles et on se met à brainstormer. Didier prend les choses en main et ça dépote. Limite un poil trop par moments, mais comme je préfère toujours plus d'implication que pas assez, je laisse faire. Et pis, on est un peu pressés par le temps aussi.

Le setting sera contemporain et naturel (un poil plus délicat narrativement qu'un décor avec surnaturel, mais j'aime bien). Les joueurs hésitent à créer un groupe de lycéens puis optent finalement pour des bandits. Les personnages, des bras cassés puisque ce sont fondamentalement des victimes, sont montés au braquo à Marseille et ça ne s'est pas super bien passé. En cavale, ils fuient vers l'Espagne et se retrouvent coincés par la neige dans un petit village de montagne, Saint-Erzouac. Je demande un plan d'auberge, on me fournit tout le village : quatre maisons (dont la fameuse auberge) plus l'église et un plan général. Tout le monde met la main à la pâte et c'est bien cool, même si je me doute déjà qu'on n'exploitera pas tout ça. Le créneau de jeu est trop court. Et même si on avait plus de temps, faudrait que l'histoire soit sacrément tordue pour que les PJ visitent toutes les maisons du village les unes après les autres. Mais bon, mieux vaut trop que pas assez. En outre, l'église est vraiment sympa.

Les antagos seront évidemment les villageois eux-mêmes. Aucun problème pour moi, je suis en terrain plus que connu. Des rednecks, à ma table, y'en a eu pas mal ces derniers mois. J'insiste tout de même un gros peu pour qu'on me dise pourquoi de simples villageois vont se transformer en bad guys horrifiques. L'appât du gain ? Un peu faible. L'anthropophagie ? Vâââchement mieux ! France + campagne + rednecks + cannibales = je me cale donc en mode Frontière(s). Ça tombe bien, j'ai vu le film il n'y a pas longtemps.

Didier joue Antoine. C'est le chef du groupe, un gars carré de chez carré qui n'aime pas tuer. Sa copine, c'est Marine (jouée par Max). Elle est bonnasse de partout et c'est Antoine qui, contre l'avis des autres, l'a incrustée dans l'affaire. Matthieu est Éric, le vigile de l'agence bancaire et accessoirement la taupe qui a permis aux PJ de braquer 50.000 euros en les rencardant sur les mouvements de fonds. Mais les autres ont grillé sa couverture durant le hold-up, ce qui l'a obligé à fuir avec eux. Du coup, il voudrait maintenant plus que ce qu'on lui a promis. Une part entière lui semblerait juste. PG est Ernest, chômeur, héroïnomane et paresseux, rien que des qualités. Ah si quand même, il sait conduire et c'est lui le chauffeur. Pour l'occasion, il a « emprunté » une merco à l'un des petits caïds de sa cité. Slimane est Frédéric, le dealer d'Ernest. Dévoué à Marine, dont il est éperdument amoureux, il a contrevenu aux ordres d'Antoine (qu'il ambitionne de remplacer à la tête du groupe) en se pointant à la banque armé d'un revolver chargé. Pire, il a, sous l'emprise du stress, blessé grièvement Élise, une caissière (qui se trouve être une ex d'Éric). Elle est peut-être morte à l'heure qu'il est.



La partie

Avec tout ça, le brainstorming nous a pris presque deux heures. Lorsqu'on se met à jouer, il est déjà 17h. J'ai donc deux petites heures pour improviser un survival à cinq joueurs. Or plus y'a de joueurs, plus les scènes sont longues. C'est mécanique : à trois PJ, un combat est bien plus rapide qu'à cinq. Pareil pour une scène roleplay. Gros challenge donc.

Allez, j'attaque. Il neige de chez neige, la route fait des lacets dans la montagne et la merco, qui n'est pas en si bon état que ça et pas du tout équipée pour la montagne, commence à souffrir. Heu-reu-ze-ment, voici que nos braqueurs arrivent dans un village, bien entendu hors réseau. Sur la place, il y a une auberge, lieu idéal pour passer quelques heures en attenant la fin de la tempête qui s'annonce. L'établissement est très rustique. C'est un bâtiment traditionnel en pierres, certes pourvu du confort moderne mais en version spartiate. C'est vieillot et crade de partout. Les personnages récupèrent dans le coffre de la bagnole le sac de sport dans lequel ils ont fourré leur butin et s'installent à une table. Ils sont les seuls clients.

Jean-François, une montagne de muscles et de graisse, moustaches épaisses et tatouages militaires sur les bras, les accueille. Du genre bourru biclassé pas facile, il leur loue néanmoins deux chambres, les seules disponibles dit-il. Marie, sa femme, bossue et guère plus aimable que lui, vient prendre les commandes. Les personnages dînent (du porc aux patates, plutôt bon) puis s'installent dans leurs chambres, deux pièces contiguës au rez-de-chaussée. Dans l'une, Antoine, Marine et Fred, ce dernier pelotonné dans un sac de couchage tout neuf fourni par Jean-François. Dans l'autre, Ernest, qui commence à tourner en rond à cause du manque, et Éric, qui prend des notes sur son téléphone portable tout en se biturant à l'eau de vie locale.

Et là, je cogite à mort. On a déjà cramé près de trois quarts d'heure de jeu et du côté joueurs, rien n'a vraiment démarré, alors que le groupe est quand même conçu pour s'écharper autour du pognon. Les joueurs ont produit de louables efforts de roleplay en début de séance (dans la voiture, en entrant dans l'auberge) mais depuis, ils sont en mode attente/réaction. Moi, j'hésite. Est-ce que j'ai le temps de leur laisser une scène de plus pour qu'ils commencent à se tirer dans les pattes entre eux ou est-ce que pas ? Je prends quatre secondes de réflexion, jette un œil à ma montre et décide que non, j'ai pas le temps. Direct, je bascule en mode survival : des coups sourds, bientôt suivis d'un cri déchirant, retentissent dans la nuit !

Tout le monde se lève, surtout ceux qui, comme Ernest, n'étaient pas encore couchés. Fred, armé de son revolver, monte à l'étage voir de quoi il retourne. Car c'est de là que vient le bruit. Il n'allume pas mais, éclairé par l'ampoule du rez-de-chaussée, se rend compte que le couloir, décoré de trophées de chasse, est éclaboussé de sang. Il y en a partout sur le plancher et jusque sur les murs, il patauge dedans. Nouveau cri ! Il tire une balle au jugé puis redescend. Conciliabule entre braqueurs tandis que des pas lourds retentissent dans la maison.

Ernest et Marine profitent de la confusion pour endormir chacun mille euros. Je trouve ça cool (c'est ce que j'attendais y'a pas dix minutes) mais suis tout de même un peu déçu. Au lieu de se contenter d'un petit larcin, j'espérais qu'ils se barrent avec le magot, ça aurait été fun. PG évoque l'idée mais y renonce vite. Il faut dire aussi qu'à ce moment de la partie, se séparer ne semble pas être une solution d'avenir. Cela se vérifie quand arrive Jean-François, torse nu sous un tablier en cuir, couvert de sang des pieds à la tête, son fusil de chasse à canons juxtaposés dans les mains, un long coutelas passé à la ceinture.

Hop, combat ! Je colle un Niveau 13 à mon antago et commence à faire le ménage. Il tire ses deux cartouches puis saisit son couteau pour terminer sa besogne. Du côté PJ, c'est la panique. On essaie de se trouver des armes plus ou moins improvisées (fracasser la bouteille d'eau de vie ? Check. Récupérer une bûche à côté de la cheminée ? Check), on rentre et sort des chambres, Ernest tente même une sortie de l'auberge. Il passe par la fenêtre de sa chambre, contourne l'auberge par le parking (où il constate qu'on a crevé les pneus de la merco) et, dans un ambitieux mouvement en tenaille, tente de rentrer la porte de devant pour surprendre Jean-François par derrière. Las, les aubergistes l'ont fermée pour la nuit. Retour à la fenêtre de la chambre, la neige jusqu'aux genoux. Bilan de l'aventure : une Blessure par attrition. Épique.

Pendant ce temps là, les autres PJ sont venus à bout de Jean-François. Marie, qui a surgit dans le couloir armée d'une feuille de boucher, résiste quelques Tours supplémentaires mais fini elle aussi par y passer. C'est une boucherie intégrale : les deux rednecks sont morts, plusieurs PJ ont été grièvement blessés, y'a du sang et diverses autres matières organiques un peu partout. Fred, dont Marie a coupé et fracturé le bras gauche, n'a plus que deux cercles de Corps de vaillants.

J'interromps la partie pour signaler qu'il est 19h, fin théorique de mon créneau. Je demande une rallonge d'une demi-heure pour boucler la partie. Tout le monde est d'accord donc on enchaîne. Fred remonte au premier, suivi d'Ernest. S'éclairant au Zippo, ils visitent les chambres de l'étage. La première est à l'abandon, la seconde était visiblement celle des aubergistes. Elle est décorée de restes humains, crânes, os et peaux tatouées. Dans un coin, du matériel de camping et des vêtements de randonnée, récupérés sur leurs victimes. C'est donc de là que provenait le sac de couchage. Fred pousse jusqu'à la porte qui donne sur l'escalier du grenier, grande ouverte. Les traces sanglantes se poursuivent sur les marches mais il n'ose pas monter.

Pendant ce temps, les autres visitent le rez-de-chaussée. Durant combat, Marie est sortie de la cuisine. Lorsque les personnages y entrent, ils découvrent un cloaque. De la crasse et des bouts de cadavres partout. Le porc qu'ils ont mangé dans la soirée n'était donc pas du cochon. Sous le choc, Éric sort vomir dans le couloir. Il y retrouve Fred et Ernest, redescendus de l'étage. Après un rapide échange d'informations, tout le monde décide de quitter l'auberge. Ils attrapent le sac d'argent, se précipitent dans la partie bar-restaurant du bâtiment, déverrouillent la porte d'entrée, l'ouvrent... et tombent nez à nez avec un groupe de villageois. Le premier d'entre eux, qui se trouve juste sur le seuil, lève le canon de son fusil de chasse vers eux.

Générique.



Le bilan

Je crois bien que c'est ma première partie sans décès de PJ. Bon, certains d'entre eux étaient très mal en point à la fin, tellement que si la partie avait duré, je les aurais sans doute achevés à coup d'attrition. Fred en particulier était, même si Slimane n'en tenait pas des masses compte dans son roleplay, à l'agonie. Mais quand même, zéro mort.

Niveau masterisation, je suis plutôt content. L'impro (décor, antagos, rythme) tenait plutôt bien debout. Un ou deux micro cafouillages durant le combat (Qui est devant qui dans le couloir ? Qui est entré/sorti de la chambre ?) mais rien de bien grave. Super satisfait aussi de la manière dont j'ai dosé à la volée les antagos par rapport aux capacités des PJ. C'était vraiment aux petits oignons. Thématiquement par contre, je n'ai pas forcé mon talent, mais les rednecks cannibales sont un stéréotype tellement efficace que j'aurais eu bien tort d'aller chercher plus loin. Ajouter un thème secondaire aurait brouillé plus qu'enrichit le concept. Reste que j'aurais été assez curieux de voir ce qui me serait venu si les PJ avaient exploré le grenier ou s'étaient réfugiés dans l'église. Cette dernière surtout avait un gros potentiel, dommage qu'on n'ait pas eu le temps de l'exploiter.

Car, et c'est là mon gros regret, j'ai merdé en long en large et en travers sur la gestion du temps. Ma première erreur fut sans doute d'accepter Slimane à ma table lorsqu'il s'est proposé, juste avant la partie. Vu la durée de mon créneau, un cinquième joueur, c'était too much. En même temps, il a tellement apporté au jeu que je n'arrive pas vraiment à le regretter. Sans lui, la partie aurait été beaucoup moins fun. En fait, la vraie grosse merdouille, c'est sur le brainstorming. Deux heures, c'était trop long. Il aurait fallu que je limite à une, ce qui nous aurait laissé une heure supplémentaire de jeu. Dans ces conditions, je l'aurais eu mon climax dans l'église.

Niveau brainstorming, deux soucis majeur. D'abord, les plans. Clairement, je n'en avais pas besoin d'autant. J'aurais pu gagner facile un petit quart d'heure à ce niveau. Mais c'est surtout sur la créa collective que j'ai merdé. J'en ai trop fait. J'ai insisté pour que les joueurs structurent le groupe sur un faisceau d'oppositions et suis allé jusqu'à ajouter une couche de mélo pour bien articuler l'ensemble. Franchement, le résultat avait carrément de la gueule ! Mais ça n'a servit à que dalle, trois bons quarts d'heure strictement inutiles. Quasi zéro impact sur le jeu.

Plusieurs problèmes :

+ L'auraient-ils voulu, la partie n'était pas assez longue pour que les joueurs exploitent tout ce matos. Clairement, c'était surdimensionné.

+ Je leur ai recommandé de ne pas jouer trop vite leurs oppositions, d'y aller piano au début. Les risques d'une escalade vers un conflit armé (Fred avait encore cinq balles dans son revolver et les autres auraient facilement trouvé à s'armer dans l'auberge) étaient réels. Cela aurait fort bien pu entraîner une hécatombe prématurée. J'aurais dû m'abstenir de leur donner cette consigne et prendre le risque d'une partie compétitive, dans laquelle les rednecks auraient fait tapisserie, voire même n'auraient pas existé. Me la jouer Reservoir Dogs plutôt que Frontière(s). En deux heures, c'était très jouable.

+ Il faut que j'arrête de sortir des idées de mon gros cerveau lors de la créa collective. Ça ne marche pas. Je plaque des trucs sur les PJ et y'a rien qui tient. Ça n'a pas du tout fonctionné cette fois-ci, et guère mieux durant mon quickshot précédent. Je voulais essayer de retrouver la dynamique de ma démo à la Boîte à Chimère, où l'aspect mélo avait donné un oomph de folie à mes effets horrifiques, mais ce n'est pas une bonne idée. Ça l'a bien fait à la BàC parce que ce sont les joueurs eux-mêmes qui ont orienté la créa en ce sens, mais quand c'est moi qui pousse un groupe au mélo et bin ça tombe total à plat.

Disons que les joueurs créent 30 % de leurs PJ et que, suggestion après suggestion, je finisse par ajouter les 70 % restants. Au final, j'obtiens un groupe super structuré avec une dynamique psychologique et ludique tip top carrée. En théorie, une machine de guerre. En pratique, de la merde en barre de douze. Car en fait, les joueurs ne vont jouer que les 30 % qu'ils ont eux-mêmes créés. Ouais je sais, j'enfonce une porte ouverte, mais ça m'a vraiment sauté aux yeux durant cette partie. Et là où je m'en mords les doigts, c'est que ces 30 % étaient, moyennant un cadrage minimum de ma part, tout à fait fonctionnels. Ils étaient plus que suffisants pour les besoins de ce survival. C'est moi qui, parce que je veux trop bien faire, plante le truc. Super rageant.

Bon, ça n'a pas été la cata non plus, hein. La partie fut courte mais cool, y'a eu de bons moments de tension horrifique, un combat dynamique et un cliffhanger dont je suis hyper satisfait. Vu la situation après le combat, ce n'était pas si évident d'amener une conclusion au feeling cinématographique en vingt-cinq minutes. Mais vraiment, le brainstorming est à revoir. Après mes expérimentations des deux dernières parties, je vais revenir à quelque chose de plus simple et de plus direct, proche de ce que j'avais fait l'été dernier chez Daniel Danjean et qui avait dépoté sévère.


Back to basics, nom de Dieu !
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMar 20 Mar - 18:39

La pyramide des célébrités – à la Boîte à Chimère – mars 2012



L'année dernière, j'étais venu poser du jeu à la Boîte à Chimère, excellllllent club rôliste du XIIIe arrondissement de Paris. Comme vous avez pu le lire si vous suivez un peu mes comptes rendus, la partie c'était *très* bien déroulée. Du coup, nous avions convenu avec Nicolas Henry (président de la BàC et accessoirement, oui oui vous l'avez reconnu, auteur d'Achéron) que je repasserais un de ces quatre pour remettre le couvert.

En fait, on se retrouve, pour de bêtes questions d'orga, à jouer chez lui plutôt que dans les locaux de la BàC. Nous avions lancé un recrutement croisé sur les forums d'Opale et de la BàC en proposant une partie de découverte. J'ai donc à ma table cinq joueurs, quatre hommes et une femme, tous rôlistes expérimentés mais qui n'ont jamais joué à Sombre. Enfin presque. Marianne était déjà à ma table lors de ma première démo à la BàC. C'est que voyez-vous, on ne change pas une équipe qui gagne.



Le brainstorming

Il est 16h, je viens de terminer l'explication des règles et on commence à brainstormer. Immédiatement, tout le monde tombe d'accord pour jouer en contemporain. La zone géographique fait plus longtemps débat, avec des partisans de l'Antarctique et d'autres de l'Amérique du Sud. Ce sont finalement ces derniers qui l'emportent. Mais quelle orientation donner au setting ? Urbain ou sauvage ? Ça discute, ça discute et, finalement, ça se décide pour la jungle. Avec des ruines maya dedans, tant qu'à faire. Le groupe sera composite : des Américains des Brésiliens, des gens de la télé et des archéologues, des Blancs et des pas Blancs, des hommes et des femmes. De la diver de chez sité. Nickel chrome.

+ Marianne joue Peter, archéologue sérieux mais désargenté. Voici un an, il a mené une campagne de fouilles au fin fond de la jungle brésilienne, sur un site maya a priori mineur mais néanmoins prometteur. Il a besoin de fonds pour poursuivre ses travaux sur le terrain mais aucune piste de financement académique en vue.

+ Ludo joue Mike E., présentateur-producteur vieillissant, arrogant et mégalo, drogué à la coke. Ami de longue date de Peter, qui lui a parlé du site maya, il s'est mis dans la tête qu'il tenait là un super concept de télé réalité, une sorte de Ferme des célébrités à thème archéologique. Du divertissement avec un (tout petit) vernis culturel. Jackpot assuré ! C'est du moins ce qu'il veut croire car il a besoin d'un succès pour renflouer sa boîte et regagner sa popularité perdue. Du coup, il a embarqué Peter et quelques autres dans une expédition de repérage.

+ Nico joue Tracy, la jeune et jolie assistante de Mike, aussi arriviste que son patron, à qui elle est néanmoins Dévouée. Elle soutient à 100 % son projet de télé réalité archéo mais pense qu'il va droit dans le mur en envisageant le présenter. Clairement, il est has been et devrait se contenter du siège de producteur. Elle par contre se verrait bien sous les feux des projecteurs. Elle a l'âge et la plastique qu'il faut, et même déjà un peu d'expérience dans le domaine. C'est le bon moment pour se lancer.

+ Benoît joue Francisco « El Medico » Altador, agent du ministère des affaires culturelles brésilen. Médecin de formation, d'où son nom de guerre, cette vieille gloire des micro-révolutions sud-américaines, depuis longtemps rangé des voitures, est une sorte de Che Guevara du pauvre. Un héros du peuple à la petite semaine qui grenouille depuis plusieurs dizaines d'années maintenant dans les couloirs du pouvoir brésilien. Sauf qu'avec l'âge, le terrain a fini par lui manquer, raison pour laquelle il a choisi de participer lui-même à l'expédition de Mike. À la fois parce qu'il ne conçoit pas de laisser des gringos prendre leurs aises avec le patrimoine culturel de son pays et parce qu'il ne supporte pas Mike, qui représente tout ce qu'il exècre. Il compte bien profiter de l'expédition pour le décrédibiliser autant qu'il le pourra.

+ Denis joue Atoupak, guide indigène (Indien donc) qui voue une haine secrète aux Blancs. Il trimballe un passé lourdement traumatique, une sale histoire dans laquelle aurait péri une bonne partie de sa famille, de son clan ou de son village, on ne sait pas trop bien. Ce qui est certain en tout cas, c'est qu'il tient les Blancs pour responsables de son malheur et qu'il a bien l'intention de se venger sur la petite expédition en la perdant dans la jungle. Au quotidien, c'est un garçon plutôt taciturne, qui fait semblant de ne pas bien comprendre le portugais, l'espagnol et l'anglais pour mieux manipuler ses clients.

+ Et enfin Ramon, PNJ caméraman, dont le boulot consiste à mettre en boîte suffisamment d'images spectaculaires des ruines pour vendre le concept de Mike à une grosse chaîne américaine. Ramon est un professionnel expérimenté, qui bosse pour la société de production de Mike depuis pas mal de temps. Il a notamment participé à une série de documentaires sur la plongée sous-marine. Le terrain, il connaît. L'espagnol par contre pas du tout. Il a des origines mexicaines, mais lointaines.

À côté de ça, on me dessine une carte et deux plans. La carte est régionale. On y voit la frontière avec la Colombie, un affluent de l'Amazone, un village indien, un dispensaire animé par une ONG et bien sûr, les ruines. Elles sont au cœur de la forêt, en bordure d'un lac. J'ai aussi un plan général du site : une pyramide à degrés perdue au milieu de la jungle, avec tout autour des petits bâtiments en mauvais état. Non loin, une falaise et une grande cascade.

Le troisième plan est un sous-sol. Car oui, il y a un passage à flanc de falaise qui mène à un réseau de grottes partiellement inondées. En passant derrière la cascade, on pénètre dans une petite salle, sorte d'antichambre troglodyte. En empruntant un tunnel en lacets, on débouche ensuite dans une autre grotte, beaucoup plus grande. Creusées dans ses parois, des niches avec des momies dedans. Au centre, une seconde pyramide à degrés, plus petite que celle de la surface. À son sommet, un puits. Tout cela me rappelle furieusement Lost in gore. Clairement, je suis en terrain connu.

Tout ça mis bout à bout, on part sur un scénario d'exploration. Et j'ai du bon matos : des persos qui ont de la gueule et une série de plans plutôt très cool. Pulp mais cool. Mon souci évidemment, ça va être d'amener les PJ du point A (le dispensaire de l'ONG, où le groupe débarque en hélico) au point Z (le sommet de la pyramide souterraine, où doit en bonne logique se dérouler le climax de la partie). Il va falloir que je les rabatte de manière pas trop artificielle vers les sous-sols, et je sais d'expérience que ce n'est pas gagné d'avance.

Pour pouvoir bien travailler, j'ai besoin d'outils narratifs appropriés, en l'occurrence d'antagos bien agressifs. Je me renseigne auprès des joueurs, ils me répondent en vrac : des FARC (la frontière colombienne étant toute proche, la région leur sert de base arrière), des indigènes et des trucs surnaturels dans les grottes. Oulaaaah, ça fait pas mal de machins d'un coup ça, limite trop même. Sur le moment, je peine un petit poil à dégager une cohérence thématique entre ces divers éléments, mais je garde. Mieux vaut trop que pas assez.

Je prends quand même Denis en aparté pour lui demander d'éclaircir un peu l'affaire. Si j'ai dit oui tout de suite à son concept de personnage, c'est parce que j'ai pensé qu'il me serait d'une aide précieuse pour amener le groupe vers le temple souterrain. Le bâton (les antagos), c'est bien. Mais la carotte (le guide en qui on a confiance) en plus, c'est mieux. Bon, pour ce qui est de la confiance, c'est une question de roleplay car j'ai demandé à Denis de révéler l'objectif de son personnage à toute la table. Je ne voulais pas partir dans une opposition secrète, comme on l'avait fait avec Krom en Transylvanie, car je pensais que ce serait trop chronophage. Les joueurs savent donc qu'Atoupak ourdit de sombres projets, mais pas les PJ.

Mais ça n'empêche pas de creuser un peu l'affaire en tête à tête avec Denis, histoire de lui donner de très bonnes raisons d'amener le groupe au sommet de la pyramide souterraine et, tant qu'à faire, de réserver quelques petites surprises aux autres joueurs. Déjà, on tombe d'accord sur le fait que son perso appartient à une sorte de secte, des adorateurs d'une divinité qui habite (ou se manifeste) dans la pyramide souterraine. Elle est bien évidemment demandeuse de sacrifices. Le plus souvent, ce sont des Indiens qui y passent, mais de temps en temps, Atoupak et ses coreligionnaires profitent qu'un Blanc soit de passage pour lui régler son compte. J'interroge Denis sur la divinité en question. Il me parle de la momie d'un personnage important (un grand prêtre ?) puis d'un serpent ailé. Je mets ça dans un coin de mon cerveau.



La partie

À 18h30, nous voilà prêts à jouer. Comme nous avons convenu que la séance durerait jusqu'à 21h, il ne s'agit pas de traîner. Du coup, je zappe la carte pour commencer directement avec le plan d'ensemble : je résume rapidement je voyage jusqu'aux ruines, distribue des cochages d'attrition pour la fatigue, puis laisse les joueurs roleplayer et s'organiser un peu. Ludo nous plie de rire en interprétant un Mike odieux au possible, les autres enchaînent avec leurs persos respectifs et je rajoute une petite couche de Ramon mal embouché. Franchement, ça part sur de bons rails.

Arrivés en fin d'après-midi sur le site, les PJ ont prévu d'y bivouaquer au moins une nuit, peut-être deux si leurs repérages prennent plus de temps que prévu. Ils s'installent dans un ancien silo à grain, dégagé par Peter et son équipe durant leur première campagne de fouilles, il y a un an. On ramasse du bois, on allume un feu, on mange et on va se coucher. Ramon, qui préconise des tours de garde, se retrouve à prendre le premier. Au milieu de la nuit, des coups de feu claquent dans la jungle. Plusieurs détonations isolées suivies d'une rafale. Bientôt, on entend des voix. Des gens qui plaisantent en espagnol, sans doute des soldats des FARC. Ils se rapprochent.

Que faire ? Fuir ! Sauf que Ramon ne bouge pas. Il est affalé près du feu, les yeux clos, la peau brûlante de fièvre et le cœur qui bat vite. Atoupak reconnaît immédiatement les symptômes d'une piqûre d'araignée. Du coup, faut-il abandonner Ramon ? Peter, Mike et Tracy s'y refusent. Seuls Francisco, armé de sa carabine mais tireur exécrable (il ne dispose pas de Tir) et Atoupak prennent le large. Il se cachent derrière un bâtiment proche en attendant de voir comment va évoluer la situation.

De mon côté, je veux une scène tendue du slip pour faire monter la pression horrifique, mais ne souhaite pas pousser jusqu'au combat. Il est trop tôt. Pas au niveau de l'horaire, vu qu'on a déjà joué trois bons quarts d'heure et que je pourrais fort bien lancer dès à présent la phase de baston, mais narrativement. Les PJ sont encore loin de la cascade. Je ne peux pas me permettre de les décimer maintenant, ils risqueraient de ne jamais parvenir au souterrain et on n'exploiterait pas le dernier plan, ce qui serait dommage.

J'ai aussi décidé que je veux, d'une manière ou d'une autre, zapper Ramon. Je n'ai pas envie de me le traîner plus loin car il me fait de plus en plus l'effet d'un poids mort narratif. Vu que la table est très dynamique, je n'ai que faire d'un aiguillon de roleplay. Vraiment, les joueurs n'ont absolument pas besoin de mon aide pour faire vivre leurs persos. Reste la question du PJ de remplacement. Ramon pourrait se révéler bien utile en cas de décès prématuré d'un PJ, sous les balles des FARC par exemple.

Tant pis, je prends le risque de défausser mon joker. Il faut savoir mener dangereusement. Après tout, c'est un jeu d'horreur ! Donc exit Ramon. Je l'ai neutralisé sans trop savoir de quoi il retournait exactement. J'avais d'abord pensé à une sorte de possession par un esprit lié au temple souterrain (une momie ?) mais à la réflexion, l'irruption du surnaturel me semble à ce stade prématurée. Je préfère me réserver le fantastique pour le climax dans la grotte. D'où la piqûre d'araignée.

Arrivent les FARC, une patrouille de quatre soldats, trois hommes (un gradé, un baroudeur, un ado) et une femme. Les troufions sont armés de deux Kalachnikov et d'une carabine. L'officier a un pistolet à la ceinture. Ils commencent par faire sortir tout le monde du silo et alignent les PJ contre un mur. Un gros coup de rangers dans Ramon, pour vérifier qu'il ne simule pas, puis ils le tirent dehors. Le baroudeur fouille et pille leurs affaires, tandis que l'ado roule des mécaniques (il insulte Mike, lui crache au visage). Peter demande à l'officier si Ramon est mort. L'autre dégaine son pistolet, l'arme, tire une balle dans la tête du caméraman, et répond « Maintenant, oui ». Boum, Séquelles pour tout le monde !

Mike, tout fébrile, vide ses poches devant les soldats. Il étale ses dollars (et sa coke) pour acheter leur clémence. L'officier se marre, l'insulte, s'approche de lui avec la ferme intention de l'abattre sur place et... se prend une flèche au travers du cou ! Il porte la main à sa gorge, vomit du sang, s'écroule en arrière. Son doigt se crispe sur la détente de son pistolet. Il tire mais heureusement trop haut : la balle se loge dans le mur juste au-dessus de la tête de Mike. Panique à bord ! Les FARC se mettent à couvert et ripostent en direction de la mangrove, là d'où est partie la flèche. Les PJ, eux, courent dans l'autre direction, à tâtons dans l'obscurité. Peter a eu la présence d'esprit de récupérer l'arme de l'officier mort, mais lui non plus de sait pas tirer. En fait, aucun des joueurs n'a acquis Tir à la création.

Atoupak, qui a identifié la flèche comme appartenant à un membre de sa secte, guide le groupe vers la falaise puis la cascade. Francisco, ralenti par son âge, traîne derrière, mais fini par rejoindre la petite troupe lorsqu'elle arrive dans la première grotte. L'obscurité est complète, les personnages s'éclairent avec leurs briquets. Heureusement, Atoupak, parti en éclaireur, revient avec une torche. L'eau, qui dans cette salle monte à mi-cuisse, est glaciale. Tout le monde traverse, enfile le couloir en lacets et débarque dans la grotte principale. Peter et Mike sont aux anges. Archéologiquement, c'est inouï. Télévisuellement, ça casse tout.

Poussé par Atoupak, les personnages traversent l'eau qui entoure la pyramide et progressent vers son sommet. Francisco s'arrête à l'avant-dernier étage mais les autres montent l'escalier jusqu'en haut. Mike stoppe net devant le puits impressionnant qui occupe la majeure partie de la plate-forme. Révélant enfin son vrai visage, Atoupak le pousse dedans et par mégarde y laisse tomber sa torche. Tracy hurle, l'Indien dégaine sa machette et lui met un sale coup en travers de la poitrine, puis se retourne vers Peter. Ce dernier veut tirer mais, Panne oblige, son arme s'enraye. Atoupak lui sectionne l'avant-bras d'un puissant coup de machette (un 9/5, ouch). Le sang gicle de tous côtés. L'archéologue ceinture le guide et bascule avec lui dans le puits.

Pendant ce temps, El Medico, resté à l'étage inférieur, cherche un angle de tir. Tracy a beau le traiter de tous les noms et exiger qu'il lui donne sa carabine, le Brésilien n'en fait rien. Un brouillard surnaturel monte de l'eau autour de la pyramide, l'isolant comme un rideau du reste de la grotte. Venant du puits, un grognement profond se rapproche. Quelque chose va en sortir, c'est sûr, mais quoi ? Je fais durer le suspense parce que bon, je sèche un peu. C'est le moment de révéler mon gros antago mais je peine à trouver une idée qui fasse le lien thématique avec les FARC et les Indiens. J'ai bien le serpent à plume et la momie du prêtre maya en réserve (en prévision, j'ai ajouté des alcôves dans les murs de la grotte et ai décrit des momies sud-américaines, assises et mangées par l'humidité) mais là comme ça, ça me parait over trop pulp.

Autre problème, on est en plein climax et j'ai maintenant trois joueurs out. Les plongeons olympiques dans le puits, c'est cool mais ça sort des persos de la partie. Ne reste plus que Tracy et Francisco d'attaque. Donc hop, je prends des mesures drastiques. Pour l'antago, faute d'idée géniâââle, je recycle celle de Lost in gore. Hé, il faut bien que l'expérience acquise durant les précédents quickshots serve à quelque chose ! C'est donc Mike lui-même, possédé par l'esprit du gardien du sanctuaire, qui émerge du puits, yeux rouges et toutes griffes dehors. Je pourrais en profiter pour ressusciter Peter et Atoupak mais ça me semble too much. Trop de résurrection tue la résurrection. Et puis, j'ai laissé des fils narratifs en suspens à la surface. Que sont devenus les FARC ? Et les Indiens ?

Pour les FARC, je trouve rapido la réponse : il y a des gens à l'entrée de la grande grotte. Ils parlent en espagnol et sont équipés de torches électriques, on distingue les halos lumineux à travers le mur de brume. Ni une ni deux, Francisco redescend de la pyramide et, traversant l'eau désormais tiède, se dirige vers eux, mains en l'air. Tracy, elle, soulagée de constater que Mike est toujours en vie, se jette sur lui pour l'embrasser. L'autre lui rend si bien son baiser qu'il lui déchiquette une bonne partie du visage et, au passage, l'infecte. La voilà qui, elle aussi, vire antago. Je distribue des cartes de PNJ à tout le monde : Marianne joue Gomez, le baroudeur FARC, et Denis, Diego, l'ado qui se prend pour un dur. Je précise que la femme est morte, tuée par les Indiens. Ludo et Nico ont toujours leurs persos, mais en version bad guys.

Diego et Gomez n'en croient pas leur chance. Partis en reconnaissance en attendant les renforts, voici qu'El Medico, ce faux héros du peuple vendu à l'ennemi capitaliste, leur tombe tout cuit dans les bras ! Francisco, qui a vu Tracy se faire bouffer, les presse de ressortir de la grotte, ce qu'ils font. Sauf que, comme les brainstormings des fois sont vraiment bien faits, il y a un passage souterrain entre les deux grottes, un étroit boyau dont Marianne a dessiné l'entrée et la sortie. Évidemment, je m'en sers. Et comme il n'est pas question que, climax oblige, le rythme de la partie retombe, je pose d'autorité la dernière scène.

Diego, Gomez et El Medico progressent vers la cascade. Derrière eux, Tracy, qui a emprunté le passage en lacets, et devant, Mike, qui émerge de l'eau tiède pour les surprendre. Griffes contre Kalach, le combat est violent... et rapide puisque tout le monde est en mode PNJ, donc bénéficie d'un Niveau invariable. Ça dépote sévère : Tracy, Gomez et Mike y passent en succession rapide. La fin de Mike est épique : Denis tire un 1/5 alors que Mike n'a plus qu'un seul et unique cercle de Blessure ! Pour marquer le coup, je décris une balle en pleine tête, la dernière du chargeur de Diego.

Pendant que les autres transforment la grotte en piscine sanglante, El Medico fuit. Il émerge au niveau de la cascade et, dans le jour naissant, s'apprête à remonter l'étroit chemin qui mène aux ruines. Et qui voit-il devant lui, à la queue leu leu sur ce putain de chemin ? Des Indiens, oui môôôssieur ! Les survivants de la petite troupe qui s'est accrochée avec les FARC durant la nuit, de dangereux sectateurs alliés du défunt Atoupak. Le premier de la file bande son arc et met Francisco en joue. El Medico fait ce que n'importe quel héros du peuple aurait fait à sa place : il saute dans le lac en contrebas. Quarante bons mètres de chute, quand même.

Francisco n'a jusque là pris que trois cochages de Corps mais la flèche et la chute peuvent lui faire trèèès mal. En fait, il a de bonnes chances d'atterrir façon kebab. Mais les mânes de Lénine sont avec lui : la flèche le rate et la chute, si elle l'amoche sérieusement (enfin, surtout la réception dans l'eau et la quasi noyade qui s'ensuit), ne s'avère pas mortelle. El Medico, trempé, épuisé mais toujours vivant, se traîne hors de l'eau.

Générique.

Et stinger : Diego, seul survivant de l'unité FARC, émerge à son tour de la grotte et se prend une flèche en travers du corps. Mortellement touché, il bascule vers le lac. Sur la berge, El Medico a, par un miracle dont lui seul à le secret, réussi à allumer son cigare humide. Regardant le corps du FARC s'écraser dans l'eau, il tire une longue bouffée, sourire aux lèvres.



Le bilan

Des joueurs très impliqués dans le brainstorming et le jeu. De grosses barres de rire (ah bon sang, Ludo fut juste excellent dans le rôle de Mike !). Une scène horrifique super tendue, dont je suis particulièrement satisfait car je l'ai menée tout en narratif. Un climax chaotique et ultra dynamique, certes moins horrifique que la scène avec les FARC (mais bon, il est clair que les paramilitaires se prêtent plus à l'horreur que les temples mayas souterrains). Un Indiana Jones à la petite semaine, personnage haut en couleur (Benoît et son accent espagnol, c'était quelque chose) qui, sans avoir lancé un seul dé de la partie, parvient à survivre au massacre final. L'arc scénaristique d'El Medico, ultra raccord avec l'orientation néo-pulp du setting, a produit une fin super cool.

En clair : une excellente partie !


Niveau maîtrise, plein de satisfactions également :

+ Un long (2h30) mais fructeux brainstorming. Comme en ce moment, je cherche à faire un peu le tour de la question, je me suis mis à compiler des stats. J'ai calculé que mes brainstormings durent environ 25 minutes par joueur. Avec 30 minutes, celui-là est plutôt dans la moyenne haute. Je voudrais faire plus court mais je crois qu'il va falloir que j'accepte que bien brainstormer prend du temps, surtout à cinq joueurs.

+ On a débordé du créneau, mais pas de beaucoup : au lieu de 15h - 21h, on a fait 15h15 - 21h45, soit 3h15 de jeu pour 2h30 de brainstorming et 45 minutes d'explication du système. J'ai eu de meilleurs ratios brainstorming/jeu mais ça n'a pesé à personne. Pour deux raisons, je pense. D'une, les joueurs ont bien accroché sur le principe même du brainstorming, l'idée qu'ils pouvaient décider de tout. De deux, la partie qui en a résulté a été vraiment cool. Clairement, brainstormer longtemps ne pose pas de problème à partir du moment où le jeu paie les joueurs en retour.

+ Cette fois-ci, j'ai bien pris garde à ne pas trop mettre de mon gros cerveau dans le brainstorming. Je me suis mis en position de récepteur, orientant les débats, posant beaucoup plus de questions que je n'apportais de réponses. J'ai tout de même lâché une ou deux idées perso, mais me suis vraiment contenté du minimum. Rien à voir avec mes deux parties précédentes. Résultat, les joueurs ont injecté dans la partie la quasi-totalité de ce qu'ils ont développé durant le brainstorming.

Content le gars Johan !
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyVen 30 Mar - 12:21

La guerre des vers – chez Benoît – mars 2012



Benoît et moi, on se connaît depuis maintenant, pfff, près de dix ans. C'est pas dur, ce fut l'un des premiers à parler de Sombre sur le Net. C'était en 2003, à une époque où le concept et le système du jeu n'étaient pas aboutis. Il y avait encore des caractéristiques et des compétences dans Sombre et j'étais en pleine crise d'horreur minimaliste. Les jauges et « la peur comme au cinéma » ne sont arrivées que bien plus tard.

Donc Benoît et moi, ça commence à faire une petite paie. Au printemps dernier, j'ai eu le plaisir de l'accueillir à ma table. C'était pour un quickshot spatial chez Chams. Je débutais dans ce format mais la partie fut néanmoins fort sympathique. Comme je savais qu'il menait régulièrement pour un petit groupe de rôlistes pas trop loin de chez moi, on s'était dit comme ça qu'on retenterait bien le coup dans ses pénates.

Fin 2011, on se recroise à la journée portes ouvertes du Grimoire, où j'étais venu poser du jeu. Et on recause de rejouer ensemble. Puis, on se re-recroise le mois dernier à Zone Franche, où je mène du White trash. Sophie, la chère et tendre de Benoît, participe à l'une de mes démos courtes et trouve le jeu cool. Du coup, on re-recause d'organiser une partie à leur domicile. Et hier, comme tout vient à point à qui sait attendre, voilà qu'on s'y met !



Le brainstorming

Il est 20h, j'ai fini d'expliquer les règles et on brainstorme en mangeant. Autour de la (toute petite) table, quatre joueurs : trois hommes (Benoît, Geoffroy, Julien) et une femme (Sophie). J'ai prévenu qu'il fallait faire efficace niveau brainstorming. Le créneau de jeu, horaire des transports obligent, se termine à 23h30. S'agit de pas trop traîner.

Les idées fusent : de la science-fiction, de la jungle sud-américaine, de la préhistoire. Benoît écarte la SF au motif que c'était le thème du premier quickshot auquel il a participé. La jungle ne fait pas long feu non plus (ce qui m'arrange, j'étais dedans l'autre jour chez Nico et c'est quand même cool de pouvoir alterner un peu). Reste la préhistoire. On part là-dessus.

Les PJ appartiennent à une tribu de Cro-Magnons, qui ne sait pas faire de feu. Leur petit groupe a été envoyé le voler chez leurs voisins, un clan de Néandertaliens. Ils y sont parvenus mais le raid ne s'est pas déroulé aussi bien qu'on pouvait l'espérer. Décimés (la plupart des chasseurs sont morts dans l'attaque), poursuivis puis assiégés par les Néandertaliens, qui veulent récupérer leur feu, ils se sont réfugiés dans une grotte.

+ Julien joue Ugrran, un jeune chasseur rebelle. Bien décidé à prouver sa valeur mais ne s'étant guère distingué dans l'assaut du campement néandertalien, il voudrait revenir chez lui avec un trophée (animal ou, pourquoi pas, humain) qui démontrerait aux vieux chasseurs que ses techniques sont meilleures que les leurs.

+ Sophie joue Ira, une Néandertalienne méthodique qui sait entretenir et allumer le feu. Son initiation, très dure, l'a laissée Invalide : pour apprendre à dominer l'esprit de la flamme, elle s'est brûlée un œil avec un tison. Borgne, elle dissimule sa mutilation sous une mèche de cheveux. Elle a trahi sa tribu pour fuir avec les Cro-Magnons lorsque ces derniers ont attaqué son village. Son problème maintenant, c'est de trouver d'urgence un compagnon. Toute Ambidextre et gardienne du feu qu'elle soit, elle ne peut espérer survivre longtemps sans protecteur au milieu des Cro-Magnons. Elle porte le feu dans une sorte de panier d'osier tressé où, au milieu des cendres, brûlent quelques braises.

+ Benoît joue Guldan, vieux chamane excentrique. Vrai Médium mais aussi vrai Drogué, il a fait le voyage parce qu'il veut apprendre à maîtriser l'esprit de la flamme pour asseoir son autorité au sein de sa tribu. Il y a d'autant plus urgence que l'arrivé d'Ira risque de fragiliser sa position. Que vaudront ses pouvoirs nécromantiques (il est capable d'invoquer l'esprit des morts) face à la maîtrise du feu de la Néandertalienne ?

+ Geoffroy joue Krogan (oui oui, tous les patronymes cro-magnons finissent en -an, c'est la hype du moment), fils de chef arrogant. Son père étant à l'agonie, il sera bientôt appelé à diriger la tribu, mais Guldan le gêne. Un jour que Krogan l'emmerdait trop, le vieux chamane a, pour se venger, prophétisé que le jeune homme mènerait la tribu à sa perte s'il en devenait le chef. Depuis, Krogan cherche par tous les moyens à décrédibiliser Guldan pour affaiblir sa prophétie.

Julien me dessine le plan de la grotte et il est vraiment très cool. Ni trop compliqué, ni trop simple. Pile poil. À partir d'une première salle ouverte sur l'extérieur (la caverne), un lacis de couloirs mène, dans l'ordre, à une tanière, une salle peinte, une autre sacrificielle et, après un passage inondé, au repaire de la Bête. Car oui, il y a un gros bestiau caché au fond de la grotte. Je demande des précisions, on me répond que c'est une sorte de serpent géant. À côté de ça, il y a bien sûr les chasseurs néandertaliens qui font le siège de la grotte. Niveau antagos, y'a de quoi faire.

Les joueurs étant plutôt favorables au surnaturel, qui de toute façon existe de manière objective dans le setting (à cause de l'Avantage Médium de Guldan), je me demande dans quelle mesure je vais coller du fantastique sur la Bête. Il en faudrait au moins un peu pour qu'elle sorte de l'ordinaire et fasse un bel antago. Je pense d'abord à un serpent criocéphale (à tête de bélier) mais c'est trop typé celtique, puis à un serpent à deux têtes, et même, par souci de cohérence thématique, à un reptile cracheur de feu. J'écarte vite cette dernière idée, trop fantasy. Mais bon, une bestiole bicéphale, pourquoi pas ?

Je me renseigne quand même auprès des joueurs pour savoir s'il y a des dinosaures dans le setting. Est-ce que c'est une préhistoire créationniste, avec tout un tas d'espèces empilées sans vraisemblance aucune sur la même période, ou est-ce que c'est une préhistoire évolutionniste, ce qui implique qu'à l'époque où on joue, le bestiaire se limite à de grands mammifères type ours géant, mammouth et tigre à dents de sabre ? On me répond plutôt évolutionniste, ce qui me va bien. La préhistoire dinos + hommes des cavernes, c'est pas mal pulp (et facilement kitsch aussi), ce qui n'aide pas à jouer horreur. Si je pose la question, c'est évidemment parce qu'on m'a dessiné une tanière sur le plan et que j'ai bien l'intention de la remplir avec une bestiole.



La partie

21h20, on se met à jouer. Dès le départ, la situation n'est pas brillante. Dehors, c'est l'automne tirant sur l'hiver. On est en fin d'après-midi, il fait froid, il pleut et on commence à ne plus y voir grand-chose. La caverne s'ouvre à flanc de falaise. Devant l'entrée, le terrain est boisé et accidenté. Les Néandertaliens, des cannibales qui se liment les dents en pointe et se tatouent le corps, grouillent dans les fourrés et derrière les rochers, jouant la montre. Cela fait deux jours qu'ils poursuivent les PJ. Maintenant qu'ils sont acculés, ils n'ont pas l'intention de les laisser s'échapper par excès de précipitation.

Car mon problème, c'est le dosage : je veux laisser un peu de temps aux joueurs pour entrer dans leurs persos mais il faut quand même que je commence à leur mettre doucement la pression. D'une, on n'a que deux grosses heures de jeu devant nous. De deux, leurs personnages n'iront pas d'eux-mêmes explorer la grotte jusqu'à la dernière salle, il faut que je les y incite. Première chose, matérialiser l'adversité. Donner un visage aux antagos pour les rendre plus concrets.

Ugrran monte la garde à l'entrée de la caverne. Un Néandertalien s'avance et dépose ses armes pour parlementer. C'est Arak, chef des chasseurs du village de la Pierre Bleue. Ira le connaît bien. Le gars Arak n'y va pas par quatre chemins : il ordonne aux PJ de lui rendre la femme et le feu. S'ils ne le font pas, il les menace de les torturer puis de les tuer, de brûler leur village et d'en exterminer la population. Ugrran répond sur le même ton, l'autre s'en va en promettant de boire dans son crâne avant la fin du jour. Peu de temps après, un objet sphérique, lancé depuis les fourrés, rebondit jusque devant l'entrée de la caverne : la tête d'un chasseur cro-magnon tué durant l'attaque du campement néandertal, le meilleur ami d'Ugrran. Clair qu'Arak n'est pas venu jouer aux osselets.

Dans l'intervalle, Ira a trouvé les restes froids d'un feu, où elle a récupéré une branche dont elle enflamme le bout pour faire une torche. Guldan la lui prend des mains et, tout fier, s'en va la montrer aux autres, qui se tiennent à l'entrée de la caverne. Sauf que dans l'obscurité, il fait une cible de choix pour les Néandertaliens. Et ça manque pas, il reçoit une lance en plein thorax. Là j'ai pris un vrai risque parce qu'avec cette attaque distante, j'aurais bien pu sécher le perso de Benoît dès les quinze premières minutes de jeu. Mais je devais marquer le coup, montrer que le setting est dur, que les Neandertaliens sont des antagos sérieux et que les imprudences se paient cher. Au final, Guldan n'encaisse que des dommages fixes (3 Blessures) donc pas besoin de remplacer le PJ.

Mais du coup, tout le monde reflue vers le fond de la caverne et commence à explorer. Grâce à la torche, on voit que deux tunnels s'enfoncent dans le rocher et on découvre bien vite que l'un d'eux mène à la tanière d'un ours. L'odeur est caractéristique. Ugrran monte un petit piège rapide à l'intention des Néandertaliens : il s'engage dans le couloir menant à la tanière puis revient sur ses pas, prend l'autre tunnel et efface les traces de tout le monde avec ses vêtements. Le groupe progresse jusqu'à la salle des peintures rupestres, que décrypte Guldan. Les nouvelles ne sont pas bonnes : ça cause de sacrifices humains (des corps décapités) en honneur à de gigantesques divinités ophidiennes ou, peut-être, vermiformes. L'idée des vers me vient tout à fait involontairement dans la description, juste parce que j'essaie d'exprimer le fait que les peintures sont réalisées dans un style approximatif. Mais elle me fait tilt.

Les PJ passent à la salle suivante, celle des sacrifices. Il s'agit en fait d'un charnier : plusieurs dizaines de cadavres décapités, en état de putréfaction plus ou moins avancée, ont été jetés pêle-mêle contre les parois. Les cadavres les plus récents sont relativement frais, deux ou trois jours tout au plus. Ce n'est guère rassurant. Au centre de la salle, trois petites pyramides bien proprettes constituées de têtes. L'odeur est abominable. Séquelles pour tout le monde. Au rayon des bonnes nouvelles, des cris et des bruits de combat commencent à résonner dans la caverne. Visiblement, l'ours et les Néandertaliens ont fait connaissance.

Il en faudrait plus pour arrêter Guldan, qui décide d'utiliser son Avantage Médium. Il sort son matériel d'invocation, osselets et colifichets, trace un cercle sur le sol, boulotte ses champis qui font planer et se concentre. Moi, je cogite à donf les ballons sur la manière de gérer le truc car je voudrais que la scène, qui sera sans doute le seul épisode clairement surnaturel de la partie, soit un peu marquante. J'envisage d'abord un aparté, qui serait plutôt cool par rapport à Krogan : si la manifestation spirituelle est subjective, c'est-à-dire si seul Guldan la perçoit, Krogan pourra sans souci continuer à dénigrer les prétendus pouvoirs du chamane. D'un autre côté, je n'attends aucune révélation de cette scène. Je ne vois pas que l'esprit transmette à Guldan une info si particulière qu'elle justifie un aparté. Et puis, on joue dans un local si exigu que nous déplacer Benoît et moi pour aller causer à l'écart (sur le palier) serait prise de tête. Enfin, si je veux que cet événement surnaturel ait vraiment de la gueule, il vaut mieux que toute la table en profite.

Et là, paf, idée : la tête qui se trouve au somment de l'une des pyramides ouvre les yeux ! Hop, nouvelle tournée de Séquelles. Je ne m'en suis pas rendu compte sur le moment, je ne le réalise en fait qu'en écrivant ces lignes, mais je crois bien que j'ai recraché une scène d'un Sandman de Gaiman (le numéro 29, l'excellent Distant mirrors : Thermidor). La tête est celle d'une femme qui, répondant aux questions de Guldan, explique qu'une tribu d'hommes aux corps couverts de cendres a ravagé son village, tué ses enfants et son mari, réduit les survivants en esclavage pour finalement les sacrifier dans la grotte. Ah bin oui, si ce ne sont ni les Néandertaliens ni les Cro-Magnons qui ont décapité les cadavres, il faut bien que les sectateurs appartiennent à une autre tribu. Et là, je viens de trouver laquelle. Des antagos supplémentaires, ça peut toujours servir.

Mais avec tout ça, on n'est pas encore rendus dans la dernière salle, celle de la Bête. Et là, après le charnier et l'histoire de la tête, il faut que je motive un peu les PJ à aller de l'avant. Donc hop, un éclaireur néandertalien débarque dans la salle. Ugrran intervient et le blesse à deux reprises, l'autre s'en retourne d'où il est venu. Mais ses compagnons ne sont pas loin, ce qui décide les PJ à avancer vers le boyau à demi inondé qui s'ouvre au fond de la salle. C'est visiblement dans cette direction que sont accomplis les sacrifices car devant le tunnel, le sol est couvert de sang séché. L'eau, glaciale, monte à mi-cuisse puis, à mesure qu'ils progressent dans le tunnel, jusqu'à la poitrine. Ira, plus petite que les Cro-Magnons, a du mal à tenir la tête hors de l'eau.

La salle dans laquelle ils débouchent est gigantesque. Sur le sol, des coquilles d'œufs géants. Dans les murs, en hauteur, divers orifices circulaires, entre 50 cm et un mètre de diamètre. Espérant qu'il s'agit de passages vers l'extérieur, Krogan se fait hisser par ses compagnons jusqu'au trou le plus proche. Il se contorsionne et commence à ramper dans l'étroit boyau, dont les parois sont couvertes d'une sorte de sirop organique gluant. Comme des glaires ou de la morve, avec une odeur vraiment acide. Soudain, un hurlement suraigu retentit dans le tube !

Plongé dans les ténèbres (la torche tenue par Ugrran est loin au-dessous), Krogan panique, recule à toute vitesse et se casse la gueule. L'accident n'est pas trop grave (une Blessure). Beaucoup plus inquiétant, les hurlements suraigus se multiplient. Ils viennent de partout ! Tout le monde reflue vers l'eau, sauf Ugrran qui reste un peu en arrière pour couvrir la retraite de ses compagnons. Au delà du faible cercle de lumière dispensé par sa torche, il entend des bruits visqueux et mous. Des corps lourds qui, par dizaines, tombent sur le rocher et grouillent dans l'obscurité. Ni une ni deux, le voilà qui rejoint les autres dans la flotte.

Retour à la salle sacrificielle. Lorsque les PJ émergent de l'eau glacée, un comité d'accueil est là qui les attend : Arak et trois de ses guerriers, ceux qui ont survécu à l'ours. Je leur donne des noms. Il y a Bumar, qui s'est salement fait écharper par l'animal. Il a un bras en charpie et se mange de l'attrition comme des Smarties. Rek est celui qui s'est pris tout à l'heure les deux lances d'Ugrran à travers le corps. Lui non plus n'est pas au top de sa forme. Krill par contre est comme Arak, neuf de chez neuf. On échange deux paroles (Ira prévient que quelque chose va débouler et qu'il ne faut pas rester là) puis on se met sur la tronche.

Tandis que les bestioles se rapprochent (l'eau commence à bouillonner de partout), Ugrran a le temps de finir Rek avant de mourir, la nuque brisée par un violent coup de hache. Je donne Arak à Julien, mais le PNJ, déjà bien entamé, meurt presque aussitôt, abattu par Krogan. Tandis qu'Ira et Guldan fuient, les bestioles pénètrent dans la salle. Ce sont des vers géants, longs de plusieurs mètres. Leur peau est noire, leur gueule une sorte de sphincter bordé de dents aciculaires (en forme d'aiguilles), un peu comme des lamproies. Dégueulasse. Du coup, tout le monde se barre, les PJ comme les Néandertaliens.

Guldan, qui à ce moment porte la torche, la balance dans la salle des peintures pour faire diversion et poursuit, avec Ira et dans l'obscurité, en direction de la caverne. La diversion marche super bien : Bumar, Krill et Krogan bifurquent du côté des peintures rupestres. Bumar et Krogan s'entretuent tandis que Krill, joué par Julien, ramasse la torche juste avant qu'elle ne s'éteigne. Constatant que les vers déferlent dans le couloir et commencent à pénétrer dans la salle, il décide d'agir avant de se retrouver coincé. Bravement, il pénètre dans la masse des créatures en mouvement et entreprend de progresser pas à pas en direction de la sortie. C'est un monstrueux calvaire. Non content d'être invulnérable, le groupe d'antagos lui inflige des dommages automatiques, 3 Blessures par Tour. Les vers s'accrochent à lui avec leurs gueules acérées et lui arrachent des bouts de chair grands comme la main. Il souffre le martyr.

Pendant ce temps, Ira et Guldan, qui avaient de l'avance sur le flot des vers, ont débouché dans la caverne. Privés de lumière (plus de torche, même plus de braises, le panier en osier a pris l'eau dans le tunnel innondé), ils se trébuchent sur les cadavres de l'ours et des Néandertaliens tués par l'animal. C'est une véritable boucherie, il y a des corps partout. Ça pue la merde et le sang. Les PJ se relèvent à tâtons, Ira file directement vers la sortie, qu'elle distingue à peine (le soleil est couché). Guldan fouille les cadavres jusqu'à dénicher une hache. Derrière lui, Krill agonise et meurt, submergé par les vers. Le chamane rejoint Ira à l'entrée de la caverne. Dehors, sous la nuit étoilée, une bonne vingtaine de guerriers les attendent, les armes à la main. Ce sont de petits hommes, plus petits encore que les Néandertaliens, couverts de cendres des pieds à la tête.

Générique.



Bilan

Une partie très cool !

J'en suis d'autant plus content que ce n'était pas gagné d'avance. On s'en est tous aperçus, la préhistoire n'est pas facile à roleplayer car c'est culturellement hyper loin de nous. Difficile de se mettre dans la peau d'hommes et des femmes dont la vie n'a quasi aucun rapport avec la nôtre (et à laquelle personne autour de la table ne connaissait grand-chose) mais les joueurs s'en sont bien tirés. Les efforts de roleplay ont été constants d'un bout à l'autre de la séance, ce qui a sensiblement densifié la partie. On a tout de même plus joué l'exploration que les interactions entre PJ, mais ces dernières ont clairement donné du relief aux épreuves traversées par les personnages. C'était bien, ardu mais bien.

Le brainstorming a été assez rapide : 80 minutes en tout, soit 20 minutes par joueur, ce qui est plutôt dans la moyenne basse. Eu égard au créneau de jeu, c'était parfait. On a terminé à 23h20, dix petites minutes avant l'horaire que je m'étais fixé (mon RER était à minuit mais je voulais prendre le temps d'un petit débriefing en live). Un brainstorming court et efficace, qui produit du matos de jeu fonctionnel. Un scénar d'exploration qui tient debout, qui plus est joué pile poil dans le temps imparti. Niveau gestion, je suis hyper satisfait. Par rapport à mes approximations lors de ma démo au CNJ, c'est le jour et la nuit.

Je suis également très content de mes antagos. Nom de Dieu, mes vers avaient de la gueule ! Si j'en suis si content, c'est que l'impro des bad guys est une faiblesse chronique chez moi. En quickshot, j'ai toujours l'impression que mes antagos manquent un peu de patate. Au point que j'ai à un moment pensé à développer un bestiaire. J'ai depuis laissé tomber l'idée parce que ce genre d'aide de jeu irait à l'encontre de l'optique 100 % impro qui fait le plaisir et l'intérêt du quickshot. Mais quand même, j'essaie de progresser sur la question. Là, j'ai pris deux minutes, à la faveur d'un rapide passage aux toilettes avant la partie, pour poser du neurone sur ce putain de serpent géant. Je n'ai pas immédiatement trouvé la bonne idée, mais ma main au feu que si je n'avais pas mini-brainstormé tout seul dans mon coin avant la partie, je n'aurais pas tilté sur les vers durant le jeu.


Sinon, au rayon technico-technique :

+ Première fois que j'utilise un groupe comme antago dans un quickshot et ça l'a vraiment bien fait. Bon sang, cette règle est cool.

+ La nouvelle version de Médium, limitée à une utilisation par scénario, est vraiment tip top classe. Je la garde.

+ Ugrran avait Tir car nous avions décidé que, dans le cadre de ce setting, cet Avantage s'appliquait à l'usage des lanceurs, ces petits accessoires qui permettent de propulser les lances plus loin et plus fort. Ça a bien fonctionné.
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Johan Scipion
Chevalier noir
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMer 11 Avr - 16:39

L'ange de la peste – à Eclipse – avril 2012



Côté meneur, une bourse aux scénars, c'est jamais tout à fait fingers in ze nose. Ultra fun, hein, mais un poil stressant quand même. Faut vendre son jeu, son scénar et aussi, bien sûr, faut se vendre soi-même. Et si possible bien parce qu'il s'agit de donner envie aux joueurs de s'asseoir à votre table. L'exercice est moins facile qu'on ne pourrait le croire comme ça, vu de loin.

Me voici donc dans l'un des amphis de l'université Rennes 1 à vendre ma partie de la nuit. C'est que voyez-vous, Eclipse a repris la procédure développée par la défunte CJDRA, une convention qu'elle était bien. Cette année tout y est, jusqu'aux panneaux numérotés et au logiciel de randomisation sur rétroprojecteur. C'est clâââsse et, grâce au savoir-faire de Bartab, qui fait office de monsieur loyal, ça roule tout seul.

Je passe en quatrième position, sur une vingtaine de meneurs. On est samedi soir et y'a affluence, l'amphi est plein. Excellente nouvelle car ça laisse espérer que toutes les tables, dont la mienne, trouveront à être remplies. Mais quand même, je stresse un piti poil plus qu'à l'habitude.

L'année dernière, proposant un House of the rising dead, j'avais vendu du zombie et du redneck. Que des valeurs sûres. Mais là, j'ai rien. Sauf cas particulier, ce n'est jamais une bonne idée de le mettre en avant le système. Trop abstrait. L'univers, j'en ai pas. Le setting, je le connais pas. Le scénar, je vais l'improviser. Car je propose un quickshot ! Ouais ouais, j'arrive en conv sans avoir rien préparé, et même que c'est la troisième fois que ça m'arrive. On me l'aurait dit y'a deux ans, je ne l'aurais pas cru.

Enfin, je me suis quand même entraîné. Si vous suivez un peu mes comptes rendus, vous aurez remarqué que ces derniers temps, j'ai enchaîné les quickshots. Ce n'était pas un hasard : je me préparais à Eclipse. Résultat, je suis bien en confiance et tout. Reste que si pas de joueurs, pas de partie.

Heureusement, je commence à être un habitué de la convention. J'y ai fait pas mal de démos ces dernières années, qui se sont généralement bien déroulées. Du coup, des joueurs j'en trouve et même plus que j'en ai besoin. On m'en tire cinq au hasard, on m'indique le numéro d'une salle dans les étages du bâtiment et pof, je m'installe.



Le brainstorming

Il est 21h50, je viens de terminer l'explication des règles et on se lance à brainstormer. Le truc qui me saute au visage, c'est que la table est super hétérogène : deux joueuses débutantes (Léna et Hélène, quelques parties seulement au compteur) et trois joueurs expérimentés (Lars, Mael, Antoine). C'est le charme (et le risque) de la sélection aléatoire propre à la bourse aux scénars. Les deux joueuses se connaissent super bien et se sont assises l'une à côté de l'autre. Faut pas être madame Soleil pour comprendre qu'elles vont jouer en binôme, ce qui va polariser la table. Reste à voir jusqu'à quel point. Du côté des hommes, je connais Antoine, qui était déjà à ma table l'année dernière, mais pas du tout Lars ni Mael.

Les idées de setting fusent et mon impression d'hétérogénéité se confirme. Personne n'est d'accord sur rien et un consensus peine à émerger : du contemporain ? De l'historique ? Du préhistorique ? Un hôpital ? La Seconde Guerre mondiale ? Des inquisiteurs ? Finalement, les joueurs optent pour le plus petit dénominateur commun rôliste : le med-fan. Le décor, ce sera un monastère.

Et là, truc super bizarre, qui ne m'est jamais arrivé dans en quickshot, on me trace des plans concurrents. Il est fréquent que les joueurs coopèrent (au CNJ par exemple, tout le monde m'avait tracé le plan d'une maison du village) mais là, c'est compétitif. Antoine et Mael me dessinent en même temps deux plans différents du monastère. Je hausse un sourcil intérieur mais laisse faire en me disant que ça pourrait en fait être rigolo. Je me vois bien mener avec les deux plans de front, l'un correspondant au monastère du vrai monde, l'autre à celui d'un univers parallèle (et forcément terrifiant).

Au final, Mael abandonne son plan, qui demeure inachevé. Nous ne l'utiliserons donc pas durant la partie. Mais après cet épisode, j'ai la confirmation de mon intuition première : ça ne va pas être top fastoche de faire monter la mayonnaise rôliste autour de la table. Mael d'ailleurs n'y est pas tout à fait, à la table, et c'est un signe qui généralement ne trompe pas. Ayant positionné sa chaise légèrement en retrait et de biais, il finit par sortir un manuel Dark Heresy pour y poser sa feuille de perso. Rien qu'à ça, je comprends qu'impliquer son PJ dans le groupe ne va pas être simple.

Mais bon, on n'en est pas encore là. Pour le moment, Antoine termine son plan et je l'enrichis ensuite de quelques menus détails. Autour du cloître, les cellules des moines (dont celle, plus grande, de l'abbé), la chapelle (avec sacristie et crypte en sous-sol), un pigeonnier, le réfectoire, les cuisines et le scriptorium. Hors les murs, le cimetière, un potager et un élevage de porcs. Sans être imprenable, le bâtiment est néanmoins fortifié : murs épais, barreaux aux fenêtres, et seulement deux portes extérieures (une double à l'avant, une simple à l'arrière, qui donne sur le cimetière).

Antoine complète son plan d'une carte. On y voit que le monastère a été construit une sur une butte et qu'une grosse ferme se trouve non loin. Il y a également un village, une forêt et un château. Je me doute qu'on n'utilisera pas la carte car le plan du monastère est suffisamment riche pour alimenter un huis clos (ce qui m'arrange, l'isolement est toujours un très bon point quand on joue horreur). Mais le château m'intéresse car je cherche des antagos potentiels. Je pose donc une rivalité politique entre le monastère et le seigneur local, qui s'est retranché depuis quelques mois derrière ses hauts murs.

Ce setting ambiance Le nom de la Rose me plait grave mais je vois de suite la difficulté. Le plan d'Antoine n'est pas un plan d'exploration. Les joueurs ayant décidé de jouer des nonnes et des moines, le décor sera connu de tous les PJ, ce qui veut dire que je ne vais pas pouvoir m'appuyer sur une structure linéaire type PMT (un lieu après l'autre, du début à la fin du scénar). Dans le premier tiers de la partie, ce sont les joueurs qui vont devoir faire le jeu. L'exposition va tenir sur les interactions entre leurs PJ. L'autre souci, c'est que les contraintes de la vie monastique s'accordent mal avec les besoins du jeu de rôle. Les moines, c'est rien que des gars qui ont un emploi du temps super réglé et des activités bien compartimentées. Pour faire vivre un groupe de persos autour d'une table, c'est pas idéal.

Faut absolument désorganiser tout ça pour nous laisser plus de souplesse narrative. Je ne sais plus qui propose la peste noire (moi peut-être ?) mais je saute sur l'occase. J'ai vu dernièrement Black Death (plutôt bien) et Le Dernier des Templiers (plutôt pas trop bien), ce qui me donne de l'inspi ciné à revendre. Donc la peste sévit dans la région. Le village, décimé, est quasi désert. Le monastère, lui, est surpeuplé car il accueille et soigne les pestiférés. Les moines ont payé un lourd tribut à l'épidémie, au point qu'il n'en reste plus aujourd'hui qu'une petite douzaine de vaillants. Ils ont converti une partie de leur monastère en hôpital mais vu l'état de la médecine à l'époque, il s'agit d'un mouroir plus qu'autre chose. La situation est d'autant plus critique que les ressources se font rares. Les cultures ont pourri sur pied faute de paysans valides pour les récolter et l'afflux de réfugiés a très sérieusement entamé les réserves des moines. C'est la disette.

+ Léna joue Marie et Hélène joue Jeanne. Sans surprise, un binôme, mais qui s'avère plutôt trèèès cool. Toutes les deux sont de jeunes novices, réfugiées d'un couvent ravagé par la peste. Accueillies au monastère avec d'autres nonnes, elles sont les dernières survivantes de leur congrégation.

Marie, égocentrique, Chanceuse et Inoffensive, est issue de la petite aristocratie. Elle est entrée au couvent contre son gré, parce que sa famille voulait la guérir de son homosexualité. Elle a tout de suite accroché avec Jeanne, jeune fille Atypique (nouvel Avantage qui permet de bricoler sa Personnalité à sa guise), hétéro et bonne catholique. Jeanne, la religion, elle y croit. Marie, elle, voudrait surtout se taper son amie. Ce ne devrait pas être trop compliqué vu que cette dernière lui est Dévouée.

Mais du coup, ça donne un Avantage invisible à Marie, que j'équilibre par des Préquelles. Je demande à Léna de les justifier et lui propose une histoire d'enterrement vivante (elle a eu la peste, on l'a crue morte, elle s'est réveillée dans une fosse commune, sous les cadavres). Elle préfère un inceste : pour lui faire oublier les femmes, son père l'a violée avant de l'enfermer au couvent. Je valide et pousse le truc : serait-elle enceinte ? Léna n'est pas trop pour mais j'insiste car je sens une piste narrative derrière. J'ai en tête Alien et un épisode de la vie de Miss Marvel, dans lequel elle fait une grossesse accélérée, un sorcier extraplanaire utilisant son utérus pour s'incarner dans notre monde. Il l'avait lui-même fécondée dans sa dimension, devenant ainsi son propre père. Grosso merdo, le même délire que dans L'hôpital et ses fantômes, l'excellente série fantastico-médicale de von Trier.

Et puis ce n'est pas comme si Marie pouvait choisir de tomber enceinte. À l'époque, la seule contraception, c'est le coitus interruptus. Du coup, on règle ça aux dés : rouge (1 chance sur 3), elle est enceinte, blanc (2 chance sur 3), elle ne l'est pas. Car oui, je me suis bricolé des d6 bicolores pour gérer de manière plus fluide la procédure de dommages. Ça marche du tonnerre, tellement en fait que je commence à développer des routines rouge/blanc. Là c'est rouge. Voilà donc Marie enceinte.

+ Antoine joue le père Hervé, abbé mélancolique qui dirige le monastère. Il est Chef (nouvel Avantage) et a la Phobie de la nudité féminine. Enfin qu'il dit, car en fait, il a signé un Pacte avec un démon (encore un nouveau Trait, la liste a pas mal évolué ces derniers temps. J'affine petit à petit la nouvelle version, un quickshot après l'autre). Antoine m'a fait passer un petit papier pour me demander s'il pouvait prendre Pacte. J'ai réfléchi trois secondes puis validé. C'est le genre de Trait qui pousse au PvP ou, au minimum, aux apartés. Mais j'ai confiance en Antoine, c'est un joueur solide. Et pis bon, le setting est orienté mélo/interactions de PJ et ça va carrément dans le bon sens. Ce d'autant qu'Hervé est en fait le père de Jeanne, qu'il a eue avant d'entrer dans les ordres. C'est pour cela que le monastère les a accueillies, elle et les autres nonnes.

+ Lars joue Georges, un diacre impulsif, Fort et qui Panique. C'est un paysan solide mais frustre, seul au monde depuis que toute sa famille dans un incendie. Il est lié à Hervé, qu'il connaît depuis longtemps et grâce à qui il a été recueilli au monastère.

+ Mael joue Jacquot, fils de fermier fragile. Il a du Self-control mais est risque à tout moment l'Erreur (là encore, nouveau Trait). Lui aussi est sans famille et a été recueilli au monastère. C'est le protégé de Georges.

Le groupe est assez sympa. Y'a de tout, ce qui est bien, même si certains concepts sont très proches (Marie/Jeanne et Georges/Jacquot). Les deux laïcs sont un peu en orbite des autres PJ, qui constituent un trinôme plus cohérent. Mon plan, c'est d'essayer de faire monter la mayonnaise autour des religieux, puis d'incorporer les laïcs dans l'affaire par l'intermédiaire d'Hervé.

Parce qu'il est clair que ni Lars ni Mael n'auront la possibilité de générer de l'intrigue. Leurs PJ ne le leur permettront pas, ils ne sont pas assez développés. Ils ne sont porteurs d'aucun enjeu narratif, si ce n'est la survie. Ce n'est pas ça qui va produire du jeu durant l'exposition. J'ai bien sûr tendu quelques perches durant la créa pour essayer donner un peu de profondeur à Georges et Jacquot, mais me suis bien gardé de trop insister. J'ai pris des pex en brainstorming sur mes derniers quickshots et je sais désormais qu'il est inutile de pousser des joueurs à creuser leurs persos plus qu'ils n'ont envie. J'aurais pu plaquer du matos mélo sur leurs concepts mais ça n'aurait de toute façon pas impacté le jeu. C'est juste une perte de temps. Been there, done that.

Je m'enquiers plutôt des antagos. Alors, qui c'est qui va démonter la tronche des PJ ? Y'a déjà les gens du château de la Roche, mais je les vois plutôt comme une sorte de joker à faire intervenir pour boucler le scénar, un peu comme les Cendrés dans La guerre des vers. On me parle de Flagellants et d'inquisiteurs. Ces derniers me plaisent bien : des religieux fanatiques, c'est toujours efficace. Et puis, bien sûr, j'ai le démon. Parce que bon, si Hervé a fait un pacte avec, c'est clair qu'il faut que je le mette dans l'histoire.

D'ailleurs, j'en cause avec Antoine. Je décrète une pause d'un quart d'heure avant la partie et en profite pour le prendre en aparté. Primo, je lui demande qui est ce démon ? Il me répond « Je sais pas moi, Azazel ». Ça fait tilt. Je ne suis pas un spécialiste de la mythologie judéo-chrétienne mais je reconnais le nom : c'est un démon de la Bible. Du coup, pour moi, c'est du lourd. Si le PNJ est dans le Bouquin, forcément qu'il s'agit d'un antago plutôt costaud. Ça va être fun, je le sens. Secundo, je demande à Antoine de me préciser la nature du pacte. Il me dit qu'il l'a invoqué pour lui demander de sauver sa fille (Jeanne donc) de la peste. C'est hyper bien vu, je valide de suite. Tertio, je termine en lui disant que le démon est toujours dans le monastère. Pour en faire un antago, ça me parait le minimum du minimum.



La partie

Minuit et quart, on s'y met. D'emblée, je cadre le setting. D'une, c'est l'hiver. Et un hiver médiéval encore, bien rude comme il faut. De la neige partout, du froid de chez froid, la totale. Parce que bon, rien de tel qu'un bon blizzard pour créer de l'isolement. C'est un fan de The Thing qui vous le dit. De deux, l'Inquisition a débarqué depuis quelques jours pour enquêter sur on ne sait trop quoi. L'inquisiteur est un certain Enguerrand de Sainte-Foi, nobliau pas commode entouré d'une petite troupe de soudards, cinq mercenaires italiens.

Enguerrand a confisqué les clés du monastère et interdit toute sortie, même pour transporter les cadavres au cimetière. En attendant, on les entasse dans « la morgue », une cellule située près de « l'hôpital » (c'est ainsi qu'on surnomme la partie du bâtiment qui accueille les pestiférés). Ça, c'est pour boucler le huis clos et aussi parce que bon, des cadavres à réanimer, ça peut toujours servir. Enguerrand a également réquisitionné toute une aile du monastère, ce qui a obligé les moines à se déplacer et à se regrouper dans l'autre. Ça, c'est pour que les PJ se retrouvent dans les mêmes cellules : Marie et Jeanne sont ensemble, Georges et Jacquot partagent la chambre contiguë avec Eric, un jeune moine d'une dévotion exemplaire. Il a trouvé sa voie dans le soin des malades et passe le plus clair de son temps à l'hôpital.

Donc ouala, tout est en place. Je n'attends plus que les joueurs commencent à faire sérieusement avancer leur petit bouzin. Mais problème, y'a trop rien qui vient. Comme anticipé, Lars et Mael ne peuvent rien injecter de très solide dans le jeu, faute de PJ appropriés. Antoine fait de son mieux mais son sombre secret le met en position attentiste/défensive. Il doit se protéger des avancées d'Enguerrand, qui révèle enfin la raison de sa présence au monastère : il est venu enquêter sur des rumeurs de commerce avec le Malin. En fait, celles à qui il revient d'amorcer la pompe mélo/roleplay, ce sont Hélène et Léna. Sauf qu'elles n'ont pas assez d'expérience pour. Elles suivent bien le jeu et font clairement des efforts, mais il faudrait bien plus que ça pour que la partie décolle. Être proactif et prendre la narration à bras le corps, c'est pas si facile.

Moi, en attendant, je meuble. On joue le quotidien d'un monastère en temps de peste, chacun vaquant à ses occupations. À côté de ça, les Italiens, qui depuis plusieurs jours fouillent le scriptorium, finissent pas y dénicher un grimoire de sorcellerie, celui-là même qu'Hervé a utilisé pour invoquer Azazel. Du coup, Enguerrand passe la vitesse supérieure : intimidation durant l'office, puis fouille systématique des cellules des moines. Sans résultat.

À un moment, je me tâte à lancer un truc en rapport avec l'enfant que porte Marie, ma fameuse grossesse accélérée, mais y renonce. J'espère encore que Marie va essayer de se taper Jeanne (c'est son objectif personnel) et ne voudrais pas parasiter le truc. Par ailleurs, je ne suis pas du tout certain que Léna voudra rebondir sur cette histoire de grossesse, vu que j'ai fait passer l'idée un peu en force durant le brainstorming. Et puis, il faudrait sans doute que je multiplie les apartés. Or j'en gère déjà pas mal avec Antoine. Plus serait trop, ça risquerait de casser le flow de la partie à un moment où j'essaie de trouver mon rythme de croisière. En clair, j'hésite et patauge, ce qui n'est jamais bon en impro car ça produit du flottement narratif.

Je pose quand même des jalons pour la suite. À la faveur d'un aparté, j'annonce à Antoine qu'il a invoqué Azazel dans une pièce secrète de la crypte et que tout son matériel, inclus le sacrifice humain qu'il a été contraint d'effectuer, s'y trouve encore. Et puis comme ça fait près de quatre-vingt dix minutes qu'on a commencé à jouer et qu'il faut bien que je commence à amorcer la pompe horrifique, j'envoie du lourd. Moi c'est simple, je suis comme le gouvernement intergalactique : quand je ne trouve plus de solution à mes problèmes, j'appelle le capitaine Flam. Euh pardon, j'invoque le Dieu Gore.

Tombe la nuit, les moines se retirent dans leurs cellules. Après la démonstration de force des Italiens durant la journée et les regards concupiscents qu'ils portaient sur Marie et Jeanne, les deux seules femmes saines du monastère, Hervé craint pour la sécurité de sa fille. Du coup, tours de garde devant la porte de leur cellule. En début de nuit, c'est Georges qui s'y colle. Autour d'un brasero, il sympathise avec Luigi, l'un de soldats d'Enguerrand, lui aussi de garde. Soudain, un hurlement déchirant retentit dans la nuit (une jump scare, c'est toujours bon à prendre). Georges et Luigi se précipitent vers la cellule dont il provient, ouvrent la porte et restent bouche bée.

C'est une vraie boucherie, il y a du sang et des bouts de corps partout. Collé au plafond, un vieux moine est à l'agonie. On l'a éventré. Ses organes lui pendent du bide et c'est une pluie sanglante qui arrose le sol (ouais ouais, ça sort tout droit des Griffes de la nuit). Quand il meurt, son cadavre tombe par terre. Branle-bas de combat ! Enguerrand, ses soldats, les PJ et les autres moines sont debout en un clin d'œil et personne ne retourne se coucher. Durant la nuit, Georges et Hervé évacuent les morceaux de cadavres vers la morgue. À l'aube, tandis que les moines se sont spontanément réunis en prière dans la chapelle, Enguerrand commande un exorcisme à Hervé. Puis il ordonne à ses hommes une fouille complète du monastère.

Évidemment, ils découvrent la pièce secrète de la crypte. L'inquisiteur y descend puis remonte, les traits fermés, le visage blême. Il donne des ordres à ses hommes. Trois d'entre eux pénètrent, les armes à la main, dans la chapelle, où se trouvent encore les moines. Les deux autres traversent le cloître vers l'hôpital. Les PJ ne le savent pas encore mais il a ordonné aux Italiens de tuer les moines et les malades encore en vie, puis de mettre le feu au monastère. Dans la chapelle, le massacre commence. Dehors, il commence à neiger dur. Aux PJ de réagir.

Georges se saisit d'une hache et saute sur Enguerrand, qui le reçoit à coups d'épée. L'inquisiteur se replie dans la crypte, puis dans la pièce secrète. Tracé sur le sol de terre battue, un pentacle. Au milieu de la figure, un cadavre en décomposition, ses différents organes étalés autour de lui dans une configuration rituelle. C'est Yves, l'assistant d'Hervé, que tout le monde croyait disparu, déserteur ou emporté par la peste. La pièce est éclairée par des bougies noires. Enguerrand trébuche sur le cadavre, s'étale de tout son long et propose une alliance à Georges, qui lui défonce la tête à coup de hache. Hervé descend à son tour, feint la surprise et récupère l'épée de l'inquisiteur.

En surface, Jacquot, Jeanne (un petit couteau à la main) et Marie (armée d'une fourche) fouillent la cellule réquisitionnée par Enguerrand à la recherche des clés du monastère. Ils les trouvent et, rejoints par Hervé, se précipitent vers la porte d'entrée. Tandis qu'ils traversent le cloître, deux torches humaines s'enfuient à toutes jambes de l'hôpital et se roulent dans la neige, sans réussir à s'éteindre. Ce sont les Italiens et ils agonisent dans les pires souffrances. Georges, lui, est mort plus proprement. En sortant de la crypte, il est tombé nez à nez avec les trois autres Italiens, couverts du sang des moines qu'ils venaient de massacrer dans la chapelle. Ni une ni deux, il en a agressé un à coup de hache, le blessant grièvement. L'autre s'est défendu et l'a tué. Je donne Giacomo, l'un des Italiens, à jouer à Lars et on continue.

Eric, le jeune moine dévoué, sort de l'hôpital et se porte à la rencontre des PJ. Jacquot, les clés à la main, est devant. Eric lui demande de les lui donner, ces fameuses clés. Mael refuse mais je dégaine mon post-it Erreur (ah putain, ce Désavantage est ultra fun !) et le contraint à le faire. Eric sourit à Jacquot et, l'espace d'un instant, ses yeux brillent rouge. Azazel, c'est lui ! Tandis que Jacquot et les nonnes rebroussent chemin, Eric s'adresse à Hervé : « Occupe toi des hommes, je me charge des femmes », le tout appuyé sur son Désavantage Pacte. Hervé retourne donc son épée contre Giacomo, qui le tue.

Pendant ce temps, Eric se lance à la poursuite des PJ survivants. Tranquillement, hein, il n'est pas pressé. Et pis bon, c'est un boogeyman à la Jason. Pas le genre à se précipiter pour faire quoi que ce soit. Il traverse le cloître, avançant en sandales dans la neige. Elle se liquéfie sur son passage et bout, s'évaporant en brouillard autour de lui. Jusqu'aux flocons qui fondent en plein vol et se changent en bruine. Puis se sont ses vêtements qui se consument. Enfin, il déploie d'immenses ailes de feu.

Au point où on en est, sortir une carte de PNJ me semble indispensable. Je décide qu'Eric est de Niveau 14, il le vaut bien. Et je lui colle deux Avantages surnaturels : Feu infernal et Armes naturelles. À ce moment, j'imagine une sorte de glaive de flammes, mais ne suis pas trop convaincu. C'est un peu kitsch quand même. Je choisis de traiter Azazel façon ange déchu plutôt que démon à tête de bouc et pieds fourchus pour des raisons purement esthétiques. Je trouve que ça fait mieux la liaison avec la description d'Eric, jeune moine bien propre sur lui. Et puis l'aspect pyrotechnique s'accorde pas mal avec l'ambiance hivernale. Thématique élémentaire, feu contre glace et toutes ces choses.

Toujours est-il que Jacquot se précipite dans la chapelle, où il est bientôt rejoint par les derniers Italiens encore en vie. Antoine, qui a perdu son perso, me demande s'il peut jouer l'un d'entre eux. Je lui réponds que oui, bien sûr. Le PNJ en question s'appelle Gianni et c'était le sergent d'Enguerrand. Rapide briefing : pour Gianni, toute l'affaire sent de plus en plus mauvais. Il n'a pas vu le cadavre de l'inquisiteur mais n'a aucun doute sur le fait qu'il soit mort. Ses hommes tombent comme des mouches. Et il y a un gars avec des ailes de flammes en plein milieu du cloître. Clairement, c'est le moment de décrocher. Et ça tombe bien parce qu'il a sur lui les clés de la porte de la chapelle, celle qui donne sur le cimetière. Tandis qu'il traîne son compagnon blessé (celui que Georges a agressé à coup de hache et qui, attrition aidant, meurt bientôt), il ordonne à Giacomo de ramener son cul, et fissa.

Les nonnes, elles, se sont enfermées dans la sacristie, qui sert également de cabane à outils. Elles y trouvent une pelle avec laquelle elles s'ingénient à bloquer la porte. Enfin, l'une des portes, la petite pièce en compte trois. Sauf que bon, ce n'est pas un bête panneau de bois qui va arrêter Azazel. D'ailleurs, il commence déjà à brûler. Des deux autres portes de la sacristie, l'une donne dans la chapelle et l'autre ouvre dans les appartements d'Hervé. Les filles décident de se séparer : Marie entre dans la chambre de l'abbé, Jeanne dans la chapelle. Abandonnant la personne à laquelle elle est Dévouée pour aller patauger dans un charnier sanglant (il y a des cadavres partout, jusque sur l'autel), Jeanne mange cher en Séquelles. Elle passe en quelques instants d'Affectueuse à Débauchée puis Obsessionnelle (est-ce que l'Avantage Atypique n'est pas fun, hmm ?). Du coup, revirement de situation : la voilà qui, portée par son obsession pour Marie, revient sur ses pas (ouais, clairement, Atypique est top fun !).

Dans l'intervalle, Marie s'est retrouvée confrontée à Azazel, mais pas sous la forme d'Eric, sous celle de son père, nu comme un ver et avec une trique d'enfer. Il lui dit que son enfant l'intéresse. À ce moment, j'ai plus ou moins dans l'idée que c'est lui le père du fœtus, mais n'ai pas le temps de l'exprimer : Marie empale Azazel sur sa fourche, coupant court à la discussion. Le démon encaisse des dommages fixes (la nonne est Inoffensive) et reprend l'apparence d'Eric. Le gamin l'intéresse (un produit de l'inceste engendré par une nonne, c'est tip top blasphématoire) mais pas au point de se faire trouer la peau. En dépit de son Niveau élevé et de ses pouvoirs, il est mortel. Quatorze Blessures et pof, retour en Enfer. Du coup, il réplique.

Sa seule et unique attaque de toute la partie et je claque un 12/5. Énorme ! Il touche Marie du bout des doigts et la carbonise sur place, pile poil au moment où Jeanne entre dans la pièce. Allez hop, nouvelle tournée de Séquelles ! Et là, sanction : folie donc PNJ. Je prends le perso à mon compte et décide qu'elle va au bout de son dévouement/obsession : elle se jette dans les bras de Marie pour brûler avec elle. Pendant ce temps, les ailes ardentes d'Azazel lèchent les murs et le plafond. Le feu infernal consume tout, même ce qui n'est pas inflammable. La pierre brûle et l'incendie progresse à une vitesse stupéfiante. Bientôt, c'est tout le monastère qui est la proie des flammes. On entend les hurlements des pestiférés, incinérés vifs dans l'hôpital.

Dans la chapelle, Gianni, Giacomo et Jacquot ne sont pas restés inactifs. Ils ont ouvert la porte et sont sortis dans le cimetière, en pleine tempête de neige. Dans un coin, une pile de cadavres, ceux des pestiférés décédés qui attendent le dégel pour être ensevelis. J'envisage un moment de les ressusciter mais laisse tomber l'affaire. D'une, j'ai juré de me sevrer des zombies. De deux, il est déjà tard (près de quatre heures du mat), j'ai deux joueuses out et le pic du climax (la mort des nonnes) est derrière nous. S'agirait pas que ça dure encore trop longtemps.

Arrive Azazel, en pleine gloire, c'est-à-dire toutes ailes déployées (vu que c'est un démon puissant, il en a plusieurs paires). Bam, Séquelles pour tout de monde. Enfin pour Jacquot, les Italiens sont des PNJ. Le démon intime l'ordre aux trois hommes de s'agenouiller devant lui sous peine de mort. Tous le font et acquièrent ainsi l'équivalent du Désavantage Pacte. Azazel les épargne, leur promet qu'ils se reverront et s'envole.

Générique.



Le bilan

Une partie bien sympa, avec un final vraiment trèèès cool. Des joueurs concentrés et appliqués, qui ont fait des efforts constants de roleplay (même si Hélène textotait à mort durant le climax, ce qui est Mal). À la fin, tout le monde était bien dans son perso et ce fut classe. Les réactions sous stress des uns et des autres correspondaient vraiment bien à la manière dont les PJ avaient été construits durant la créa. Et puis, la mort tragique de Marie et Jeanne a eu bien de la gueule.

Je garde cependant l'impression qu'on est passé à côté d'une partie du setting. On a produit un survival efficace mais basique, qui me laisse un peu le sentiment d'une exploitation a minima du résultat de notre brainstorming. Y'avait un quintal de trucs à creuser dans ce monastère pestiféré, ce qui aurait pu grave enrichir et potentialiser la partie survival. Or on n'a fait que gratter la surface. À notre décharge, le setting n'était pas forcément super easy non plus. C'était un putain de bon décor mais il faut bien reconnaître que jouer des moines au Moyen Age, c'est pas le truc le plus fastoche du monde.

La mayonnaise rôliste a pris, mais un peu tard et n'est pas montée aussi haut qu'elle aurait pu. Attention, ce fut une bonne partie, hein. Fun, jeune et tout. Juste, je sens qu'elle aurait pu être meilleure. Je reste un peu sur ma faim, quoi. Je pense que c'est lié à la faiblesse de notre collectif rôliste. La table était très (trop) hétérogène. Ça nous aurait posé moins de problèmes dans un scénario classique, mais en quickshot, ça s'est avéré plus délicat. La confiance mutuelle, c'est important en impro. Dans mes quickshots précédents, même ceux que j'ai menés en conv, je ne connaissais pas forcément plus les joueurs mais eux se connaissaient souvent bien, voire très bien. Forcément, ça met pas mal d'huile dans le moteur ludique.

La question maintenant, c'est de savoir si la combo bourse aux scénars + quickshot est de base moisie (j'entends par là, si vraiment y'a pas moyen de réussir une tip top partie d'impro avec une table constituée aléatoirement) ou si c'est juste que là, on a eu un coup de pas trop de bol. À vue de pif, je dirais coup de pas trop de bol, mais vivement la prochaine bourse aux scénars que j'en aie le cœur net !

Sinon, plein de trucs techniques super sympas dans cette partie. L'Avantage Atypique, qui roxxxe décidément du poney. Erreur, exploité très à-propos, bien mieux que dans mes playtests précédents. Pacte, qui est fun mais overbourrin et que je m'en vais donc brider. Le 12/5 d'Azazel, pur coup de bol qui donne une putain de patate au perso et me permet d'assumer techniquement la grandiloquence de ma mise en scène. L'ange déchu aux ailes en feu qui foire ses attaques, ça aurait un peu beaucoup donné l'impression d'une montagne accouchant d'une souris. Avec un 12/5, c'était nickel raccord. Super sensation, nom de Dieu !
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyVen 4 Mai - 13:50

Sur Terres Etranges, des comptes rendus de parties de Sombre comme s'il en pleuvait.



GNAP ! (Sombre chez les Schtroumpfs) par Gauvain :

Schtroumpf rêveur pousse un gémissement de souffrance et tombe derrière la table. Devenu noir en quelques secondes il hurle « GNAP ! » et se jette sur le Schtroumpf à lunettes qui s’était précipité pour le relever. Schtroumpf costaud s’empare d’un tabouret et attaque le Schtroumpf noir tandis que le Grand Schtroumpf et la Schtroumpfette lui lancent fioles et éprouvettes. Schtroumpf rêveur git maintenant sur le sol. Tout danger immédiat est écarté mais Schtroumpf à lunettes et Schtroumpf costaud ont été mordus !

http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=7149#p7149



Le train des glaces (initiation à la ludothèque de Suresnes) par El Medico :

Le premier groupe avance vers la locomotive, passant devant des wagons vides et éteints. Vers l'avant du train, ils découvrent dans la neige le cadavre du mécanicien atrocement mutilé et prenant déjà une teinte bleuâtre. Pendant ce temps, dans le wagon, le deuxième groupe s'attache à finir de détruire le mobilier. Tout à coup, une main traverse la vitre et attrape l'un des étudiants, le contact des doigts glacés cherchant à l'étrangler.

http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=7092#p7092



Rob Zombie (quickshot) par Netzach :

Kurt ramasse le flingue et le refile à Kurt, qui de son côté est parvenu à rallumer la station. Il cherche Rob avec les différentes caméras de sécurité encore en état de marche et finit par le repérer dans les appartement de la section civile, recroquevillé dans un coin en train de se balancer d'avant en arrière. Au passage, Kurt essaye de savoir s'il existe un moyen de quitter la station sans avoir besoin de réparer la navette. Il reste deux nacelles de secours dans la section scientifique de la station, mais ma décision est prise : Rob est possédé et ça va pas tarder à charcler !

http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=7009#p7009



Un beau jour pour mourir (quickshot) par Antoine Ruins :

Marcus négocie avec Alexandre pour marier sa fille. Julia, qui surprend la conversation, s'énerve et insulte son père. Elle s'effondre en larme dans sa chambre et fait un mauvais rêve : Hassan couvert de sang, les yeux injectés. Réveil en sursaut. Un peu avant le repas, tout les esclaves sont retrouvé morts, la tête dans leurs plats. Un survivant goûte la nourriture, il ne lui arrive rien. Ce n'est donc pas la nourriture, c'est l'eau.

http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=7093#p7093



Notre Tombeau (hack) par Dkarl :

Dans un dernier élan de rage, Fred arrache le piquet de métal puis le lance de toutes ses forces sur le tueur. Le morceau de métal vole dans les airs et percute violemment le crâne de Scalpel, qui lâche prise. Le tueur psychopathe sombre dans les eaux froides et est emporté comme une brindille par le courant de la rivière…

http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=6872#p6872



Le drame du lac (Cthulhu DDR, démo Dés-Dalles 2012) par Polo :

Août 1963. Les personnages sont en vacances sur une île du lac Müritz, propriété de la Confédération syndicale. L'essentiel de l'île est recouvert de forêt. Tandis que les adultes se dorent la pilule dans la partie Est, les mômes séjournent à l'Ouest dans un camp de jeunes pionniers.

http://terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=6953#p6953



Mercenaires ! (Millevaux, démo Eclipse 2012) par Thomas Munier :

Darfour, petit village agricole au sud de Métro est sous la menace d'une troupe d'écorcheurs mené par l'Artificier, un pillard de sombre réputation. Les villageois engagent sept mercenaires pour les défendre dans la perspective d'un siège qui sera sans pitié.

http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=7087#p7087



House of the rising dead (démo Orc'Idée 2012) par Gap :

Devenu fou, Walt comprend qu'il a été trahi et se lance, M16 à la main, à la poursuite de ses anciens compagnons. La horde de zombies est déjà sur lui mais il n'en a cure, seule la vengeance compte. Tandis qu'ils courent vers la grange, il leur tire à trois reprises dessus.

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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMar 15 Mai - 14:58

Not another campus movie – aux ELFIC – mai 2012



Au départ, ça ne se présentait pas sous les meilleurs auspices. Parce qu'un créneau de nuit qui ne commence qu'après le repas du soir et le concert, c'est quand même hyper tard. En plus, j'avais eu une après-midi chargée, avec deux White trash enchaînés coup sur coup. Par-dessus tout ça, des micro-cafouillages d'orga me font errer d'une salle à l'autre. Au bout du compte, je me retrouve à mettre la séance en route à près de minuit.

On est installés dans la bibliothèque, au milieu des bédés et des mangas. La pièce est cool, isolée et tout, mais super chaude. Du coup, je ne regrette pas de ne pas avoir amené mes photophores. J'avais hésité à le faire mais y avait renoncé pour ne pas me charger comme un mulet. Bien m'en a pris car la chaleur des bougies aurait été proprement insupportable. On jouera donc à la lumière des néons et dans une ambiance doucement tropicale. J'ai l'air de faire une montagne d'une souris mais c'est que sur le moment, je craignais que, fatigue et chaleur aidant, mes joueurs et moi-même ne finissions par nous endormir. Pour ma part, je me dope au glucose : thé oversucré + soda. Burp.

Les joueurs, une femme et trois hommes, sont jeunes, fun et sympas. Ils se connaissent tous très bien et ont l'habitude de jouer ensemble. Du coup, j'ai encore rien fait que déjà, y'a une bonne ambiance. Limite trop bonne même parce que les vannes geek fusent de toutes parts. Moi, imperturbable, j'avance dans la présentation des règles. Il faut dire que je suis bien rôdé, c'est mon troisième briefing technique de la journée.



Le brainstorming

À minuit et quart, on attaque le brainstorming. Et là, c'est le festival geek. Ça pleut littéralement de la vanne. Moi, je fais mon possible pour passer entre les gouttes. Entre deux saillies drolatiques, j'explique ce que j'attends du brainstorming : le setting (avé le plan qui va bien s'il vous plize), le groupe de PJ, les antagos. Bizness as usual.

Sauf que du côté des joueurs, ça patauge dans la semoule. Pas qu'ils soient réfractaires au format, ils ont au contraire l'air raisonnablement emballés, mais y'a trop rien d'exploitable qui ressort de leurs discussions. Trop de déconnade tue la déconnade, ou plutôt tue le brainstorming.

Je cogite. Est-ce que je monte au créneau et tape du poing sur la table pour imposer mon autorité ou est-ce que je laisse pisser ? Vu comme ça évolue, je décide de laisser pisser. Le coup de l'autorité, ce sera pour le briefing d'avant le jeu. Parce que là, clairement, ils ont besoin de vider un peu leur sac de blagues entre eux.

Je passe donc en mode spectateur (po-po-po-poker face) mais prends la décision ferme de boucler la séance entre 3h30 et 4h du matin. Dans mon état, je sais que passé cette heure, je ne ferai plus que de la merde. Du coup, tout le temps qu'on est en train de perdre en brainstorming sera en fait prélevé sur la partie elle-même.

Niveau relance, je gère à l'économie : dès que je vois une ouverture, je pose une question, mais n'essaie pas de prendre le brainstorming à mon compte. Juste, je pousse un petit peu les trucs qui, doucement, péniblement, se mettent en place. Et justement, que produit-on ?

L'idée de base du décor, c'est une convention rôliste. Pas particulièrement cinématographique ni horrifique, mais why not ? J'insiste néanmoins pour que les joueurs ferment plus le setting parce qu'une conv, c'est trop ouvert par rapport à la durée prévisionnelle de la partie. Un huis clos avec un peu moins de gens serait idéal. Une chose entraînant une autre, on en arrive à une université, ce qui me convient mieux.

On me dessine un plan très sympa. Un couloir serpente entre différentes salles : la loge du gardien, une cafète, un petit amphi, des toilettes, une salle de travaux dirigés et une de projo. Comme je ne vois pas de fenêtres, j'en déduis qu'il s'agit d'un sous-sol, ce que me confirment les joueurs. À chaque bout du couloir, un escalier monte vers le rez-de-chaussée. Il y a en fait trois accès : une porte coupe-feu à double battants devant chaque escalier et une porte ordinaire en bas de l'amphi, à côté de l'estrade du prof. Les portes coupe-feu sont verrouillées, me dit-on.

Les personnages sont des étudiants, tous membres d'un cinéclub. Le cast est digne d'un teen movie et c'est une décision parfaitement consciente des joueurs :

+ Unt (la joueuse) joue Louis. Mélancolique, Chanceux et Inoffensif, c'est un emo pur jus, limite goth. Total black look et mèche qui va bien. Évidemment, il est gay.

+ Erwan joue Marc, l'amant de Louis. Plus âgé, plus dégourdi, plus beau et plus instable aussi. Marc, c'est la bogossitude en action. Il est Irrésistible mais aussi, malheureusement, Bipolaire. Ce nouveau Désavantage le contraint à passer d'une Personnalité à l'autre, en l'occurrence de Charmeur à Irritable.

+ Mathieu (avec un T) joue Fanny, jeune femme affectueuse, Irrésistible elle aussi, mais qui souffre. Elle est amoureuse de Marc, qui n'en a bien sûr rien à foutre. Limite s'il ne s'amuse pas à la chauffer, juste pour le plaisir de la voir baver.

+ Matthieu (avec deux T) joue Vanessa, la sœur jumelle de Louis. Elle est excentrique et surtout Phobique. Mais de quoi ? Je cherche une peur que je puisse exploiter dans le cours du scénario. Vu que le setting est en sous-sol, je propose l'obscurité. Matthieu opine. Le problème de Vanessa, c'est qu'elle est raide dingue de Fanny mais que cette dernière fait mine de ne pas s'en apercevoir. Ach l'amour, gross malheur...

Quant aux antagonistes, il s'agira de rôlistes (oui vous lisez bien, des rôlistes) possédés par des démons. Au départ, ça ne devait être que des rôlistes, juste très énervés, mais j'ai fait savoir que transformer un troupeau de geeks en antagos horrifiques, c'était trop pas possible. La possession démoniaque, déjà, c'est mieux. Ce d'autant que les joueurs sont plutôt très favorables à l'idée de mettre du fantastique dans le setting. Dans un précédent quickshot, on m'avait donné des raptors et j'avais déjà trouvé que ces bestiaux n'étaient pas faciles à crédibiliser en tant qu'antagos, mais des rôlistes, même possédés, ça enfonce carrément tout. Pitin, y'a du challenge !

En tout, on a brainstormé 75 minutes. À quatre joueurs, ce n'est pas énorme. Mais avec un groupe qui se connaît bien, un setting simple comme celui-là et des protagos super archétypaux, y'avait moyen de boucler le truc en moins de trois quarts d'heure. M'enfin bon, c'est pas la course non plus...

Avant qu'on ne se mette à jouer, briefing. C'est là que je passe en configuration meujeu de la mort. Primo, j'affirme clairement mon autorité sur la table. Le boss, c'est moi et personne d'autre. Secundo, j'explique qu'il va falloir assumer le produit du brainstorming. Parce que c'est bien beau de me pondre des personnages sur le mode ironique, voire franchement parodique, et de compléter avec des antagos du même tonneau, mais on n'est pas partis pour un Brain Soda. Hé les gars, c'est à Sombre qu'on joue !

Ces persos, PJ comme PNJ, je ne vais les prendre comme je le fais d'habitude, au premier degré. Quand je mène, je suis toujours d'une totale sincérité. On ne peut espérer faire peur que si on l'est. Peut-être bien que Louis tombe tout droit d'un bouquin d'Anne Rice, mais quand on sera en jeu, ce ne sera plus mon problème. Moi, je vais m'intéresser à ce PJ pour ce qu'il est dans le cadre de ma partie : un étudiant mélancolique et fragile. Rien à battre de la parodie du vampire néo-romantique.

Tout ça pour dire que le mélo, j'attends des joueurs qu'ils s'emploient à le jouer avec toute la sincérité dont ils sont capables. Et ça ne s'annonce pas si facile que ça, ne serait-ce que parce que la dynamique du groupe repose entièrement sur la séduction et que, pour corser l'affaire, trois des joueurs ont créé des personnages du sexe opposé. Très atypique mais assez logique.

D'une, c'est un mécanisme de défense anti-mélo standard. Parce que le mélo dark, ça peut grave arracher la gueule. La séduction, le chagrin, les peines de cœur, c'est un truc de la vraie vie qui fait facilement écho chez les joueurs (et le meneur, of course). Bien plus que les rednecks, les zombies et les monstres à tentacules. Le mélo, c'est personnel. Du coup, créer des persos du sexe opposé est un bon moyen de prendre de la distance avec eux. De les regarder se dépatouiller avec leurs émotions et leurs sentiments tout en restant un peu en retrait. C'est confortable. Mon objectif bien sûr va être de casser cette distance. Je mène horreur donc je veux toucher les joueurs à travers leurs persos.

De deux, y'a une sorte de logique festival de la blague : brainstorming gros délire > setting gros délire > protagos gros délire > antagos gros délire > partie gros délire. Sauf que non, moi je suis là pour déployer un survival tendu du slip sur une base de mélo dark.

Va y avoir du sport.



La partie

À 1h50, on s'y met. Il est tard dans la soirée, la projection du cinéclub vient de se terminer. Les cinéphiles, les PJ donc, se retrouvent dans la cafétéria pour causer du film qu'ils viennent de voir. À cette heure tardive, le bar est fermé mais les distributeurs de boissons et de nourriture fonctionnent encore. Dans la salle de TD, le club de jeu de rôle est en pleine action.

Je demande aux joueurs quel est le film qu'ils viennent de voir. Unt me répond Bloody Mary, version 1962. On brode un peu sur le sujet et tandis que chaque PJ donne son avis sur le film, je cogite. Je comprends bien que Bloody Mary est une proposition fictionnelle. Je connais la légende urbaine, je sais qu'il s'agit d'un bon matériau horrifique (j'ai vu Candyman) mais je ne vois pas comment je vais pouvoir connecter cette histoire de fantôme homicide avec les démons qui sont censés posséder les rôlistes. C'est un peu le grand écart. Et puis, je n'ai pas le temps (il est tard) ni les ressources intellectuelles (je suis fatigué) de me lancer dans des thématiques croisées. Trop complexe.

Donc exit Bloody Mary. Le mélo par contre est toujours d'actualité. Sauf qu'on n'a pas non plus trop le temps et qu'aussi, les persos ne sont pas tout à fait optimisés pour. Ils ont le profil, ça pas de problème, mais il leur manque des objectifs individuels qui donneraient aux joueurs une direction de roleplay et leur permettraient de prendre la narration en charge durant l'exposition. En clair, y'a pas trop d'enjeux. Dans le tas, y'a que Vanessa qui sait ce qu'elle doit faire durant la partie : essayer de brancher Fanny. Normalement, j'aurais dû demander à chaque joueur de me préciser le but de son personnage. Mais vu comment s'est déroulé le brainstorming, j'y ai renoncé.

Maintenant que la table est (nettement) moins dissipée, je compense par une série de questions aux joueurs, par le biais desquelles je creuse un peu les relations entres leurs personnages. Ce n'est pas du jeu stricto sensu (en fait, c'est du pur métajeu) et je sais que tout ça a peu de chances d'être exploité durant la partie, mais c'est une bonne manière d'immerger les joueurs dans leurs persos et de les inciter à les prendre avec un minimum de sérieux. C'est aussi plus rapide qu'une exposition standard et ça nous dispense de nombreux apartés, qui ont tendance à être fréquents en mélo. Ah bin oui, dès lors qu'il s'agit de se susurrer des mots doux à l'oreille ou de se sauter dessus comme des bêêêtes, on se met à apprécier l'intimité.

Arrive Gérard, le gardien de nuit, qui vient se payer un petit café au distributeur. C'est un Antillais entre deux âges, plutôt très sympa. Je sais déjà qu'il va mourir dans d'atroces souffrances donc j'essaie de le présenter sous son meilleur jour pour accroire l'impact de son décès. Au passage, il lâche une info utile : les rôlistes sont partis pour jouer toute la nuit, au moins jusqu'à six heures du mat. Les personnages ne les connaissent pas trop, ces rôlistes. De vue mais sans plus : ce sont des geeks pas très sociables, un peu renfermés sur leur hobby. Alors que les PJ, eux, sont des étudiants normaux à l'échelle des campus movies. Avec une vraie vie sentimentale et sexuelle, quoi. Deux mondes qui se côtoient et s'ignorent.

Bon, j'ai quand même une idée hyper arrêtée sur les rôlistes en question. Depuis le brainstorming, je sais qui ils sont : mes joueurs. Les gens qui vont s'employer à démonter la tronche de leurs personnages, ce sont eux : les deux Mat(t)hieu, Erwan et Unt. À un moment du brainstorming, lorsque Matthieu et Unt discutaient du concept d'antagos rôlistes, cette dernière a déclaré qu'elle kiffait la mise en abyme. Sur le moment, je me suis dit que ça me convenait bien aussi et que j'allais pousser le truc aussi loin que je le pouvais.

C'est Unt qui a mené le brainstorming : la conv rôliste, le cast teen movie, les antagos, ce sont ses idées à elle, que les autres joueurs ont ensuite reprises à leur compte. Du coup, j'ai décidé que ce serait elle mon antago principal. La meneuse (aux deux sens du terme) des rôlistes, c'est elle. Un autre élément m'y a poussé : partout sur le corps (les bras, le cou, les jambes, les doigts), elle s'est (ou on lui a) dessiné des petits symboles au marqueur noir. Des signes des Anciens façon Chaosium, des 42, du code binaire, rien que des trucs de geek pour être bien dans le ton des ELFIC. Et ça, ça m'a fait tilt.

Gérard quitte la cafète pour terminer sa ronde et les persos continuent à discuter un peu, quand soudain, la lumière s'éteint. Obscurité complète. Aussitôt, Vanessa panique (Séquelle of course) et s'accroche à Fanny. Matthieu est bien au taquet et j'aime ça. Je le sens impliqué et décide que je vais m'appuyer autant que possible sur son personnage pour faire monter la tension horrifique. Me manque juste un bon angle d'attaque, un truc autour de sa phobie peut-être ? Je ne sais pas encore quoi, mais il faut que je lui fasse tomber quelque chose sur la gueule. Du lourd de préférence.

Comme les joueurs ne percutent pas de suite et que je n'ai pas envie que leurs persos tâtonnent trop longtemps dans les ténèbres, je leur fais remarquer que puisqu'on joue en contemporain, ils ont forcément leurs portables sur eux. Évidemment, ils ne captent rien (on est en sous-sol) mais c'est une bonne source de lumière. Les voilà donc qui partent en exploration. Les nouvelles ne sont pas bonnes. D'une, l'obscurité est vraiment complète. Même les veilleuses censées signaler les issues de secours sont éteintes. De deux, le couloir est couvert de sang frais. Il y a des éclaboussures sur les murs et de grandes traînées sur le sol, comme si on avait tiré un cadavre. La minuscule loge de Gérard est sens dessus dessous, et là aussi y'a du sang partout.

Il faut sortir et vite ! Sous l'impulsion de Marc, les PJ se dirigent vers l'un des escaliers qui montent au rez-de-chaussée. Contrairement à ce que les joueurs m'avaient indiqué durant le brainstorming, j'annonce que la porte de sécurité est ouverte. Je voyais mal comment expliquer la fermeture des deux portes et puis, j'ai eu durant le brainstorming une petite idée sympa : les PJ montent les marches quatre à quatre et, au lieu de déboucher dans le hall du rez-de-chaussée, arrivent dans un couloir. Juste sur leur gauche, la porte de la salle de projection. D'une manière inexplicable, les deux escaliers communiquent ! Le couloir est devenu une sorte de ruban de Möbius, dont il est impossible de sortir. Évidemment, Séquelles.

Les traînées de sang aboutissent aux toilettes des femmes. J'imagine que le corps désarticulé de Gérard y a été abandonné, sans doute dans une posture aussi gore que spectaculaire, mais je n'en aurai jamais le cœur net : les joueurs ne se risqueront pas à entrer dans la pièce pour le vérifier. Au lieu de ça, Fanny tente d'ouvrir la porte de la salle de TD, là où les rôlistes sont en train de jouer. La poignée est tellement froide que sa main s'y retrouve collée. Elle doit s'arracher la peau pour la lâcher. Aie, une Blessure.

Il ne reste qu'une solution, la porte de l'amphi. Hop, hop, hop, en petites foulées dans le couloir puis dans l'escalier qui descend vers l'estrade du prof. Malheureusement, la petite porte qui se trouve à côté est fermée et bien solide. Fanny a une idée : déclencher l'alarme incendie. Elle remonte vers le couloir, suivie de Marc. Et là, je demande à Matthieu, toujours bien à fond dans la phobie de son perso, de me l'expliquer : alors Vanessa, d'où qu'elle te vient ta peur du noir ?

En se basant sur sa Personnalité excentrique, Matthieu me parle d'un enlèvement par des extraterrestres. Un trip à la Mulder, que je trouve fun mais, comme pour Bloody Mary, décalé. On est en plein mélo, il me faut quelque chose de plus personnel. Pour moi, cette histoire d'abduction est une construction mentale, un mécanisme de défense par lequel Vanessa a occulté une partie douloureuse de son passé. Je lâche ma bombe : des abus sexuels durant l'enfance, dont Louis aurait été le témoin et qui expliqueraient sa Personnalité mélancolique.

Louis justement a trouvé le panneau de contrôle de l'amphi. Il veut essayer de rallumer les lumières pour soulager sa sœur mais rien ne marche. Le rétroprojecteur par contre fonctionne. L'écran descend et s'illumine. C'est un film. Un instant je pense au fameux Bloody Mary de 1962, mais repousse l'idée. Pas assez personnel. Du coup, je sors l'artillerie lourde : l'action se déroule en pleine nuit, dans la chambre d'enfant des jumeaux. Leur père entre et se glisse dans le lit de Vanessa. Il a encore bu, la gamine est terrifiée. Son père la caresse, la contraint à une fellation puis la viole. Louis, qui fait semblant de dormir dans le lit d'à côté, assiste à toute la scène. Le film est super explicite, aucun détail n'est épargné à Vanessa, qui se mange évidemment des Séquelles comme si c'étaient des Smarties. Matthieu enchaîne super bien niveau roleplay. D'un coup, la partie a passé un palier horrifique.

Louis essaie frénétiquement d'éteindre le rétroprojecteur, mais en vain. Tandis que des hurlements retentissent du côté de la salle de TD (hop, jumpscare), il abandonne sa sœur dans l'amphi. Dans sa panique, Vanessa a lâché son portable et, du fait de l'obscurité, ne parvient pas à le retrouver. Elle est limite cataleptique mais a tout de même la présence d'esprit de sortir son briquet de sa poche (Avantage Objet). La porte du bas, qui était fermée tout à l'heure, s'ouvre. Une femme en sort, la meneuse des rôlistes, dont je calque la description sur Unt, sauf qu'au lieu d'avoir des petits dessins sur le corps, elle a des tatouages ésotériques et luminescents. Fanny se secoue enfin la couenne, fuit l'amphi et rejoint les autres dans la cafétéria, de l'autre côté du couloir.

Fanny et Marc lootent le bar à la recherche d'armes. Marc récupère un couteau de cuisine, Fanny une poêle (dommages fixes). Dans le couloir, on entend un raclement métallique. Tout à l'heure, Fanny cherchait une hache d'incendie. C'est en fait l'un des rôlistes qui, parfaitement nyctalope depuis qu'il est possédé, a mis la main dessus. Marc renverse une table contre la porte pour la bloquer. L'autre attaque le panneau de contreplaqué à grands coups de hache, façon Jack Torrance. En un rien de temps, il l'a enfoncé. Fanny et Marc l'attirent dans la pièce puis fuient. Négligeant Vanessa et Louis, recroquevillés dans un coin, le rôliste, dont je calque la description sur l'un des joueurs, les suit.

Fanny et Marc grimpent l'escalier, débouchent de l'autre côté du couloir et s'engouffrent dans les toilettes des hommes. Le gars à la hache passe devant la porte, traînant son arme sur le sol. « Cochons, cochons, cochons » chantonne-t-il. Dans les WC, le téléphone de Marc sonne. Un SMS, « Ce soir, vous mourrez tous », bientôt suivi d'un second, « Moi aussi, je suis dans les toilettes ». Pendant quelques instants, rien. Puis la porte de l'un des boxes s'ouvre à la volée. En sort la femme aux tatouages qui brillent. Elle lève les mains, des griffes lui poussent au bout des doigts. Elle se rue sur les PJ. Fanny parvient à fuir, mais Marc se jette dans un violent (et sensuel !) corps à corps avec l'antago.

Fanny progresse dans le couloir, hésite à entrer dans la salle de TD, qui exhale toujours un froid glacial. Elle y renonce et court, la poêle à la main, vers la cafétéria. Au premier coin que fait le couloir, elle se prend évidemment un maousse coup de hache. Le bûcheron l'attendait au tournant. Le combat est rapide. Fanny est déjà blessée, son arme n'est pas très efficace, elle meurt vite. Marc par contre s'accroche : il claque toute son adré, réussit quelques bons jets et mène son adversaire à une Blessure de la mort. Lui-même est à Corps 1. Un cercle de chaque côté, plus d'adré pour Marc, je décide de régler leur compte aux deux personnages à coup d'attrition. Ils s'écroulent dans les bras l'un de l'autre. La femme l'embrasse, lui vomit du sang noir dans la bouche. Ils tombent à terre, morts.

Vanessa et Louis tentent de se barricader dans la cafète, mais vu l'état dans laquelle est la porte, sans grand succès. Un bruit, celui d'une matraque qu'on tape contre le mur, les alerte; Quelqu'un a récupéré l'arme de Gérard et s'avance vers la cafétéria. Louis tire Vanessa par le bras, la jette dans l'amphi (cafouillage de ma part, le temps que je pige un peu en quoi consiste exactement la manœuvre) et attire l'antago vers lui, qui à cet instant est joué par Erwan. Louis se replie jusqu'à la salle de TD, désormais ouverte, découvre que l'un des rôlistes est étendu, nu, sur la table et qu'on lui a ouvert le bide sur toute sa longueur.

Louis compte les verres pour vérifier qu'il n'y a pas d'autre antago. J'hésite à m'inclure dans le groupe des rôlistes mais n'en fait finalement rien parce que quatre (le gars à la hache, celui à la matraque, la femme, le sacrifié) c'est déjà pas mal. Avec deux antagos encore opérationnels, dont un à la capacité de dommages limités (j'ai décidé que la matraque faisait des dommages fixes, comme la poêle), Louis a encore une petite chance. Avec trois, non. Encore faut-il qu'il se trouve une arme. À voir l'état du cadavre, Unt en conclut que les rôlistes ont forcément utilisé un couteau. C'est bien vu, donc je valide : planté sur la table près du cadavre, il y a effectivement un Bowie. Louis s'en empare, se cogne contre le gars à la matraque, parvient à le tuer mais meurt dans le même Tour.

Vanessa dévale une nouvelle fois les marches de l'amphi vers la porte du bas, qui cette fois est ouverte. Elle court comme une dératée. Plus question de relancer d'un antago, le combat a déjà duré assez longtemps et puis, Vanessa est sortie du plan donc du setting. À la recherche d'une conclusion qui ait un peu de gueule, je me dis, avec les trois neurones que j'ai encore de vaillants (il est 4 h du mat et je suis sur les rotules), qu'une fin récursive serait appropriée. Ça ferait écho au couloir façon Möbius. Une boucle spatiale dans une boucle temporelle, ce serait plutôt pas mal. Du coup, je mixe Triangle, que j'ai vu il y a peu, et Angel Heart, dont je suis fan depuis toujours.

Si Vanessa court, c'est parce qu'elle est en retard. La séance du cinéclub va bientôt commencer. Elle s'est mise à la bourre parce que, sachant que Fanny assisterait à la projo, elle a pris un temps fou pour se préparer. Elle arrive juste à l'heure, les autres (son frère Louis, Marc et surtout Fanny) sont déjà assis. Sur l'écran, le film a à peine commencé. Il devrait s'agir de Bloody Mary mais ce n'est pas du tout ça. À l'écran, une bande de geeks jouent à un jeu de rôle. Quand la meneuse lève les yeux de derrière son paravent, ils brillent d'un éclat démoniaque.

Générique.



Le bilan

Une bonne partie, relativement courte (2h15) et bien tendue, ce qui n'était pas gagné d'avance. Les joueurs se sont globalement bien mis dans le trip. J'ai eu l'impression que l'immersion était plutôt bonne, quoique assez inégale. Matthieu était à fond les ballons et ça faisait vraiment plaisir à voir. J'adore mener pour ce genre de joueur, hyper réceptif et tout. Pour un meneur d'horreur, c'est du nanan. Parce que je sais que c'est un sujet over sensible, il est hyper rare, même en configuration mélo dark, que je tape dans l'abus sexuel. C'est vraiment l'attitude de Matthieu qui m'y a incité. Et je ne le regrette pas car il a super bien géré l'affaire. Ce fut un grand moment de flippe et de roleplay.

Je crois qu'Erwan a bien pris son pied à basculer d'une Personnalité à l'autre. En tout cas, ce fut très fun de le voir faire. Bipolaire est vraiment intéressant, même si un peu délicat à gérer lors des basculements de phase. Unt était un poil plus en retrait, mais tout, dans sa manière d'orienter le setting vers le second degré, de créer un personnage parodique et d'en faire une sorte d'assisté, indiquait qu'elle ne voulait pas trop s'impliquer. Du coup, elle s'est un peu pris full face la révélation du sombre secret de Vanessa. Mais bon, zis iz horror.

L'autre Mathieu était lui aussi un peu en retrait. Participatif et tout, mais sur un mode plus intellectuel qu'émotionnel, ce qui n'est pas hyper adapté au mélo, ni même à l'horreur en fait. Au début de la partie, il a eu un peu de mal à répondre à mes questions sur la vie sentimentale de son personnage et je n'ai pas été étonné de le voir prendre des notes durant le jeu. Il écrivait le compte rendu de la partie en temps réel, une attitude qui m'a toujours évoqué celle de l'anthropologue qui va sur le terrain avec son micro, son bloc-notes et sa caméra, tous accessoires qui lui permettent de prendre une distance confortable avec son sujet. D'intellectualiser plutôt que de ressentir. Mais bon, si le joueur y trouve son compte et que ça ne l'empêche pas d'être actif durant la partie, moi ça me va bien.

Mon gros regret, c'est la gestion des rôlistes. J'aurais dû en faire si ce n'est des amis du moins des connaissances des PJ. Je me suis dit qu'en les distinguant nettement des PJ, sur le mode geeks versus emos, ça nous aiderait à mieux typer les PJ et ça en ferait par la suite des antagos plus horrifiques, mais c'était une erreur. Si les PJ les avaient mieux connus, j'aurais pu jouer plus efficacement sur la mise en abyme, dont je n'ai pas l'impression qu'elle était très claire. Surtout qu'à un moment, je me suis grave embrouillé dans mes descriptions, confondant deux rôlistes. Y'a pas eu mort d'homme non plus, mais j'aurais pu faire largement mieux.

Fatigue et mécaniques inédites aidant, je me suis également retrouvé un peu beaucoup à la ramasse sur la gestion des Traits. J'ai purement et simplement oublié le Chagrin de Fanny et l'Inoffensif de Louis. Outre qu'il s'agissait de nouveaux Traits et que j'ai loupé une occasion en or de les tester (caramba, raté !), je regrette vachement pour Inoffensif car il aurait sans doute sensiblement impacté le déroulement du combat final. Unt a enchaîné les dommages fixes, pour, dans le tout dernier Tour, claquer un 12/5 à la face de son adversaire (qui dans le même temps finissait de lui détruire le crâne à la matraque). L'effet gore aurait été décuplé si je m'étais souvenu qu'avec Inoffensif, les dommages fixes de Louis ne produisaient aucune Blessure.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyJeu 24 Mai - 0:39

Sombre 2 pour l'été !



Le deuxième numéro de Sombre, la revue qui porte bien son nom, paraîtra dans le courant de l'été. Voici en avant-première, la couverture réalisée par Greg Guilhaumond :

Sombre - Page 2 Sombre2_couv_GregGuilhaumond_300


Au sommaire de ce numéro 2 :

+ Ubiquité, un scénario prêt à jouer. Ce survival court et férocement compétitif est inspiré de Battle Royale et de Cube.

+ Extinction, un univers post-apocalyptique, lovecraftien et marin. Cthulhu s'est réveillé, le niveau des océans a beaucoup monté, les Profonds sont sortis de la mer, l'humanité vit ses derniers instants.

+ Deux articles, l'un consacré à la peur dans Sombre, l'autre au briefing de début de partie.


Comme d'habitude, ce numéro sera exclusivement distribué par l'association Terres Etranges.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyLun 18 Juin - 23:05

Cthulhu DDR et autres douceurs estivales.



Bientôt les vacances. Sea, sex, sun, jdr, chips et Coca (rayez les mentions inutiles). À Terres Etranges, on pense à occuper vos looongues soirées d'été. Au menu de notre dernière mise à jour, un nouveau chapitre pour Cthulhu DDR, une aide de jeu pour Millevaux et même, oui oui, de nouveaux flyers pour Sombre.



Cthulhu DDR 2, la revanche.

Sombre - Page 2 Th_Cthulhu%20DDR_affiche

1962. Derrière le Rideau de Fer, la République Démocratique Allemande (DDR) s’organise. Mais sous les apparences tranquilles du réalisme socialiste, le Mythe veille. Librement inspiré de l'oeuvre de H.P. Lovecraft, Cthulhu DDR est un dark world, un univers de jeu pour Sombre.

Le deuxième chapitre du supplément est désormais disponible. Réservé aux meneurs car consacré au Mythe, il contient des informations sur le Comité, une organisation qui lutte contre les horreurs cthuliennes, ainsi qu'une section dédiée aux goules à la mode DDR.

Et comme un bonheur ne vient jamais seul, Thierry Salaün a refondu le premier chapitre, consacré au contexte historique et politique de la DDR. La mise en page aussi a été revue pour plus de confort à la lecture et une meilleure jouabilité en partie.



Millevaux s'équipe.

Sombre - Page 2 Th_Mx_fdm

Vous trouvez que survivre dans la forêt hostile de Millevaux est difficile ? En particulier, vous ne savez comment gérer votre matériel et vos consommables ? Thomas Munier a la solution : une aide de jeu spécifique à ajouter à la feuille de votre personnage.



Sombre sort ses illus.

Sombre - Page 2 Th_Sombre_flyer

Les zombies texans c'est joli mais à ne voir que ça, on finit par se lasser ? Téléchargez la nouvelle planche de flyers de Sombre et vous ne saurez plus où donner de la tête !



Bonne lecture, bonnes vacances et bon jeu.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMer 11 Juil - 1:32

Sombre light 6, at last !



Sombre - Page 2 Th_Sombre_light_5


La sixième version du kit de démo de Sombre est disponible. Elle diffère relativement peu de la version précédente (je liste et explique ces quelques nuances techniques ici) mais est encore plus épurée. Oui oui, c'est possible : SL6 fait une page de moins que SL5.

Les feuilles de personnage et de création ont elles aussi été remises à jour. En bonus, une nouvelle affiche format A4 pour Sombre, reprenant l'illustration de la couverture de Sombre 2 par Greg Guilhaumond.


Nous avons également profité de cette dernière mise à jour avant les vacances pour ajuster quelques menus détails sur nos pages Sombre, Cthulhu DDR et Millevaux. Rien de très spectaculaire, il s'agit simplement de notre petit toilettage annuel.


Bonne lecture, bon jeu, bonnes vacances.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMar 14 Aoû - 13:40

Les mille et une morts – août 2012



C'est l'été, il fait beau, il fait chaud et entre deux articles pour Sombre 2, je pose du jeu chez l'habitant. Autour de la table, Marianne, abonnée aux parties de Sombre (c'est son troisième quickshot à ma table, et elle en a mené un de son côté), Sylvain, qui avait déjà joué House of the rising dead (mon premier playtest avec survivants, grand moment), Virginie, trois parties d'Achéron au compteur, et Jean-Baptiste, noob de chez noob.

Moi, j'ai de l'envie de jouer (ça fait longtemps que je n'ai pas mené long, depuis les ELFIC en fait, et ça me manque) mais je suis un peu beaucoup à la ramasse. Je bosse tard en ce moment pour boucler le zine et on a décidé d'un créneau de jeu en aprème. Du coup, je me suis quasi levé à l'heure où je me couche d'habitude. Hop hop hop, dopage au thé ultra sucré.

Il n'est pas encore 15h et on est prêts à s'y mettre. Comme j'ai du temps devant moi, qu'il y a un total novice et une débutante à table, je décide de tenter le double feature. Pas avec un White trash (trop long) mais avec un Overlord, mon scénar pour Sombre zéro. L'idée est de donner un aperçu des fondamentaux techniques et de l'ambiance de Sombre pour me faciliter l'explication des règles et le cadrage du brainstorming. La technique de l'échantillon gratuit, quoi. Et ça marche plutôt très bien.



Le brainstorming

À 16h, l'explication des règles est derrière nous et on attaque la tempête de cerveau. J'explique qu'en fonction du setting choisi, on peut orienter la partie plutôt vers le roleplay (mélo) ou plutôt vers l'action (exploration). La table veut du roleplay. JB et Marianne ont des tonnes d'idées, Sylvain commente et relance, Virginie écoute.

On évoque la possibilité d'un setting SF puis historique puis seventies hippie puis oriental. C'est cette dernière idée qui est retenue, mais plutôt qu'un harem, comme le proposait initialement JB, on s'oriente vers une villa cossue, dans une petite ville de province. Elle est hantée par le fantôme d'une femme, un ancêtre des PJ. L'antago, ce sera elle.

L'époque est médiévale et il y aura, spectre oblige, du surnaturel dans le setting. Un truc façon Mille et une nuits mais sur une base horrifique plutôt que merveilleuse. Évidemment, aucun d'entre nous ne connaît quoi que ce soit à la culture ou à l'histoire arabe. Mais c'est pas grave du tout, quelques clichés cinématographiques feront bien l'affaire.


Pour ce qui est des personnages, on part sur une idée très mélo (une famille) tendant vers le politique (la famille est régnante) et au final la diplomatie (il y a une crise nationale et internationale à gérer). Le groupe est particulièrement cool :

+ JB joue cheik Saadi, hériter Désinvolte et néanmoins Médium du trône d'Al Watan. Pour arriver là où il est, il a tué son frère aîné, cheik Ali. Le régicide est très récent, un ou deux jours à peine, et il a mis la capitale sens dessus dessous. Le peuple, une bonne partie de la noblesse et de l'armée, n'acceptent pas le nouveau souverain.

+ Marianne joue Yasmine, la veuve d'Ali. Son mariage avait scellé l'alliance du royaume d'Al Watan et de celui d'El Modakir, mais le meurtre de son mari remet tout en question. Charmeuse et Irrésistible (combo classique), elle est aussi Amnésique. Et là, bam!, idée : je prends JB en aparté pour lui proposer que ce soit Yasmine qui ait tué Ali. Sa Personnalité charmeuse lui a fait une réputation sulfureuse à la cour. Ali, ivre de jalousie, l'a violée. Elle s'est défendue et l'a tué. Saadi est arrivé juste après et, découvrant le crime, en a assumé la responsabilité. Il n'a pas trop bien réfléchi aux implications de son geste. Lui qui n'aurait jamais eu le courage d'attenter à la vie de son frère, il a simplement saisi l'occasion de s'imposer en tant qu'homme fort. JB est d'accord. Cool.

+ Virginie joue Nabila, la sœur d'Ali et Saadi. Comboté à sa Personnalité conformiste, son Avantage Exorciste l'oriente vers la religion et la rectitude morale. Pas gagné quand on voit les affaires dans lesquelles trempent sa famille.

+ Sylvain joue Toufik Al Azaran, grand vizir Irritable. Précepteur d'Ali et Saadi, il fait également fonction de premier ministre et d'éminence grise. Une sorte de Richelieu à la mode orientale, qui intrigue depuis des années dans les couloirs du palais. Il était déjà en place du temps du vieux sultan. Sylvain est tenté par le Désavantage Pacte, qui impliquerait qu'il doive une faveur à un PNJ. Et là, bam!, autre idée. Au fil du briefing, j'ai décidé que le fantôme de la villa n'était pas une lointaine ancêtre des Al Watan mais Samira, la propre mère de Nabila, Ali et Saadi, dont JB nous avait déjà appris qu'elle était morte en couches. Vu que la partie va tourner autour de leur famille, il me semblait utile de concentrer les PNJ dans le entourage immédiat. Mais du coup, je prends Sylvain en aparté pour lui proposer de devoir une faveur à Samira. Il a eu une liaison avec elle et de leur amour interdit est né Ali. C'est donc le fils de Toufik, son seul et unique enfant, qui a été assassiné. Cela met le vizir dans une position très délicate puisqu'il est contraint de soutenir son meurtrier (Saadi). Il sait qu'il est tellement lié aux Al Watan que si la dynastie s'effondrait, il coulerait avec elle. Sans compter les dégâts, colossaux forcément, que cela produirait dans le royaume. La guerre civile, c'est jamais bon.

Les joueurs avaient initialement prévu un cinquième personnage, un général. J'avais dit banco car un PNJ allié peut s'avérer utile, ne serait-ce qu'en remplacement d'un PJ prématurément décédé. Mais une fois que le groupe constitué, je ne vois plus trop bien de quelle manière on pourrait l'intégrer à l'ensemble. Le maillage inter-PJ étant très serré, l'adjonction de ce PNJ me semblerait très artificielle. Aucun des backgrounds créés par les joueurs ne fait référence à un quelconque militaire. Donc exit le général. Je le remplace par Ahmen ibn Rachid, envoyé des El Modakir pour négocier avec les Al Watan.


JB nous dessine le plan de la villa et le résultat est très cool : un jardin oriental, une cour centrale avec des chambres de part et d'autre, un grand salon, une bibliothèque, le quartier des domestiques et une écurie, le tout clos de hauts murs. Dans la chambre la plus luxueuse, celle réservée au sultan, un passage secret mène à un souterrain, qui émerge une vingtaine de mètres plus loin, dans la cave d'une petite maison. Il n'est connu que de Toufik et, peut-être, de Rafik, le gardien/jardinier de la villa (un autre PNJ, dont je sais déjà qu'il n'apparaîtra pas dans le scénar. Ahmed suffit à mes besoins).


Tout ça a bien de la gueule. Le seul petit défaut, c'est que ça nous a pris 4h15 ! Oui oui, vous lisez bien : lorsqu'on se met à penser aux pizzas, il est 20h15. Pour tout dire, ce n'est pas loin d'être l'heure à laquelle j'avais prévu de terminer. « Bien avant le dernier métro », avais-je annoncé en début de briefing. Grave erreur ! Parce que là, on est partis pour jusqu'à tard dans la soirée. Pas cool car tous les joueurs ont des trucs à faire le lendemain tôt. On est dimanche et même en été, y'a des lundis.

En même temps, ce brainstorming fut trèèès sympa. Dynamique est fun, avec plein de bonne volonté, d'apartés de conspirateurs et d'idées qui fusaient. Je n'ai eu à aucun moment la sensation qu'on patinait ou qu'on s'emmerdait. Et puis le résultat est à la hauteur du temps investi. Reste maintenant à valoriser tout ça par le jeu car si on ne trouve pas à exploiter tout ce matos durant la partie, cela n'aura été que du temps de perdu. C'est pas le tout de s'éclater à monter un setting et un groupe, faut les faire tourner à la table.



La partie

20h55, on s'y met. On est en début de soirée, les personnages viennent d'arriver à la villa. Ils sont partis seuls, sans serviteurs, car ils ne savent plus trop à qui faire confiance à la cour. Une bonne partie des nobles a de franches idées de rébellion, pas mal d'autres sont incertains, et le peuple grogne. Il suffirait d'une étincelle pour mettre le feu aux poudres.

Sans domestiques, c'est le grand vizir qui s'y colle. Il prépare un repas frugal et met un peu d'ordre dans la chambre du sultan, que Saadi s'est réservée. La villa est en bon état générale mais manque cruellement d'entretien. À l'époque où la famille royale venait y passer ses vacances, du temps de l'enfance de Saadi et Nabila, le bâtiment était remis régulièrement à neuf. Mais cela fait bien longtemps que plus personne, hormis Rafik, n'y a mis les pieds. La demeure a mauvaise réputation, il s'y est passé trop de choses bizarres et dramatiques. Des accidents, des morts suspectes, des trucs plus étranges aussi. On la dit hantée et du coup, c'est une cachette idéale.

Le jeu se met en place. Chacun veut très visiblement bien faire et tenir l'engagement de roleplay pris durant le brainstorming. Mais ça ne prend pas. Tous les personnages ont un objectif personnel, il y a des lignes de failles et des antagonismes dans le groupe, mais rien de suffisamment puissant pour faire décoller la partie. Je sens que ça ne va pas le faire : c'est un scénario diplo et il nous manque une faction adverse avec laquelle les PJ puissent négocier, en groupe et/ou à titre individuel. En clair, il me faut un catalyseur.

Je gardais Ahmed en réserve car je ne savais pas trop bien quand le mettre en jeu. J'imaginais qu'il se pointerait en milieu de partie, pour remettre un peu d'huile sur le feu, raison pour laquelle je ne l'ai pas fait arriver à la villa en même temps que les personnages. À JB qui me demande quand il va venir, je réponds que c'est imminent. Les PJ ont envoyé un messager aux El Modakir avant de quitter la capitale et la villa n'est pas loin de la frontière. Ahmed débarque avant la fin du repas. Histoire de rester dans la dynamique familiale du scénario, je déclare qu'Ahmed est l'un des (nombreux) frères de Yasmine.

Et là du coup, ça démarre. En aparté, Saadi déballe toute l'affaire à Ahmed, y compris la culpabilité de Yasmine. J'avais bien recommandé aux joueurs de ne pas s'asseoir sur leurs sombres secrets, mais JB y va fort d'emblée. Je joue Ahmed décontenancé, ce d'autant que JB enchaîne bien : il produit la dague, couverte de sang séché, avec laquelle Yasmine a poignardé Ali. Je trouve l'idée super et renchéris : outre que le monogramme de Yasmine est gravé sur la poignée, Ahmed reconnaît l'arme car il l'a lui-même offerte à sa sœur avant qu'elle ne parte vivre chez les Al Watan. Il est troublé, mais ses exigences n'en sont pas moins claires pour autant : les El Modakir consentent à aider les Al Watan à rester sur le trône en envoyant des soldats rétablir l'ordre à la capitale, mater le peuple et museler les nobles, mais à la condition que les Al Watan deviennent leurs vassaux.

Pour Saadi, c'est inacceptable. JB propose des accords commerciaux particulièrement avantageux, mais Ahmed considère que c'est très insuffisant. Pourquoi se contenter de la main quand on peut prendre le bras ? De son point de vue, les Al Watan ne sont pas en position de négocier. La question de l'implication de sa sœur dans le meurtre d'Ali le laisse perplexe mais n'est à son avis pas un argument pertinent. JB menace de rendre publique la culpabilité de Yasmine, ce qui le déconsidère encore un peu plus aux yeux d'Ahmed. Car sur le coup, Saadi lui paraît bien jeune et bien inexpérimenté. Même si c'est bien Yasmine la meurtrière, comment espère-t-il pouvoir l'accuser après avoir reconnu publiquement qu'il avait tué Ali ? Personne ne le croirait et ce revirement lui ferait perdre le peu de crédibilité qui lui reste.

Et c'est là le principal problème de Saadi : la crédibilité. Quelqu'un qui ouvre des négociations en mettant sur le dos de sa belle-sœur le meurtre de son frère n'est pas le genre de personne à qui Ahmed est enclin à faire confiance. Il veut bien négocier avec un meurtrier, régicide et fratricide, pas avec un lâche doublé d'un imbécile. Si Saadi a vraiment tué Ali, accuser Yasmine, la propre sœur d'Ahmed, est à la fois faible et diffamatoire. Insultant en fait. Si Saadi ne l'a pas tué, s'accuser du meurtre n'était sans doute pas à la base la meilleure chose à faire. Se défiler maintenant, après avoir fui la capitale, est certainement la pire.

Mais JB a de la ressource : il explique qu'il l'a fait pour protéger l'honneur de Yasmine et l'alliance avec les El Modakir. De meneur à joueur, je lui confirme qui si la fuite n'était pas forcément une bonne solution (Toufik y était opposé), c'était sans doute la moins mauvaise. À l'heure qu'il est, vu la façon dont évoluent les choses à la capitale, les Al Watan seraient peut-être déjà tous morts s'ils étaient restés au palais. Il n'empêche que cette fuite a été comprise par tout le monde, Ahmed inclus, comme un aveu de faiblesse.

C'est fun, hein ?

Et ce n'est que le début. L'entretien avec JB enclenche une série de scènes du même bois, certaines en aparté, d'autres en collectif. La dynamique est franchement excellente et Marianne se tape un vrai bon trip. Ce qu'on lui raconte sur le meurtre d'Ali ne correspond pas du tout à son background et du coup, elle ne sait plus trop où elle en est. Exactement comme son perso en fait, ce qui est fort. Ah bon sang, ce fut bien sympa de la voir se dépatouiller avec sa mémoire défaillante, les accusations de Saadi et les soupçons d'Ahmed. Ce n'est pas la première fois que j'exploite Amnésique dans une partie, mais ça n'avait jamais fonctionné aussi bien.

Dans tout ça, pas un brin d'horreur. Rafik reste certes introuvable mais, en dehors du fait qu'il ne s'agit que d'un larbin, les joueurs ont bien d'autres chats à fouetter. Depuis le début de la partie, on navigue entre la diplo et le mélo. J'ai prévu d'injecter des événements horrifiques de manière graduelle, puis, lorsque le point de non retour serait franchi, de bloquer les joueurs dans la villa en faisant débouler une faction noble (et hostile) venue de la capitale. Les soldats encercleraient la propriété, empêchant les PJ d'en sortir.

Sauf qu'on n'a pas le temps. Il est 23h30 et Virginie doit nous quitter. C'est dommage parce qu'elle avait l'air plutôt intéressée mais en termes purement ludiques, elle ne manquera pas à la partie. Elle est en retrait, s'exprime peu, regarde jouer plutôt qu'elle ne joue. Je sais que son départ ne cassera pas la dynamique de jeu, mais il produit du flottement. JB voudrait reporter la fin à une autre séance mais j'argumente contre. Pas que je sois opposé à l'idée du two-shot mais je sais qu'on a bien peu de chances de se retrouver tous disponibles en même temps dans les semaines qui viennent. Organiser cette partie a déjà été rock'n'roll, on ne rééditera pas l'exploit deux fois de suite. Pas dans un futur proche en tout cas. Et puis couper la partie nous ferait perdre tout l'acquis de ces 2h30 de jeu : là, tout le monde est bien immergé dans son perso, c'est bien le moment de passer en mode horreur. Si on reprend dans six semaines, il faudra repartir de quasi zéro.

JB se rend à mes arguments et m'accorde une heure. J'ai jusqu'à 0h30 pour boucler la partie. Je récupère Nabila en PNJ et passe en mode guerre. J'aurais voulu la sacrifier avant le départ de Virginie, de façon à ce qu'elle reparte avec une fin bien à elle, mais je n'en ai pas eu le temps. Après son départ, vu que tout le monde sait qu'on joue désormais en temps ultra limité, ça enchaîne : Yasmine branche Saadi et finit, comme elle le voulait, dans son lit. Maintenant qu'Ali est mort, il s'agit de se recaser. Toufik, lui, monte un plan de chez plan. Il sait qu'il est crucial que les Al Watan réussissent à mettre Ahmed de leur côté. Ce dernier est parti se coucher en leur posant un ultimatum : soit ils acceptent ses conditions et les El Modakir prêtent main forte aux Al Watan, soit ils les refusent et il s'en retourne chez son père avec sa sœur. Ils attendront que la situation pourrisse et que la guerre civile ravage le pays pour l'envahir et l'annexer par la force.

Je précise à Toufik que la position d'Ahmed est sans doute moins solide qu'il ne veut bien le dire. Une guerre en Al Watan coûterait beaucoup plus aux El Modakir qu'une opération de police. Le problème fondamental, et on en revient toujours là, c'est qu'Ahmed ne veut pas négocier avec Saadi parce qu'il le juge inconséquent. Il est crucial de le faire remonter dans son estime. JB a parlé d'invoquer l'esprit d'Ali pour prouver que c'est bien Yasmine qui l'a tuée. J'ai trouvé l'idée excellente et lui ai fait une ouverture narrative en déclarant que puisqu'ils disposent de l'arme du meurtre, ce ne devrait pas être trop compliqué. JB n'a pas mordu dessus, sans doute parce qu'il hésite à claquer son Avantage (Médium n'est utilisable qu'une fois par scénario) alors que la partie n'est pas encore entrée dans sa phase horrifique. Une ressource pareille, ça pourrait bien faire la différence entre la vie et la mort lorsque le fantôme se sera manifesté.

Donc Toufik cherche un plan de secours. Il voudrait engager un homme de main pour monter une fausse tentative d'assassinat contre Ahmed. Les Al Watan le sauveraient et en feraient ainsi leur allié. Capilotracté mais why not ? Au minimum du minimum, il faudrait retrouver Rafik, qui est du coin et qui pourrait sans doute recruter facilement quelques soudards. L'initiative de Sylvain tombe pile au bon moment car c'est exactement ce dont j'ai besoin pour passer à la vitesse supérieure. Impossible pour lui de sortir par la grande porte. Elle est bruyante au possible et Ahmed ne dort pas loin. Pour s'éclipser discrètement, il n'y a que le passage secret dont, ça tombe bien, Toufik est le seul à connaître l'existence. Voilà donc le grand vizir qui, déguisé avec de vieux vêtements sales trouvés dans la chambre de Rafik, se glisse subrepticement dans la chambre du sultan pour accéder au passage secret. Quelle n'est pas sa surprise de découvrir Saadi et Yasmine enlacés sous les draps du grand lit à baldaquin ! Ils dorment.

Toufik ouvre silencieusement la porte secrète, dont il avait vérifié dès en arrivant qu'elle fonctionnait toujours (c'était la raison pour laquelle il avait insisté pour remettre lui-même en ordre la chambre du sultan). Il descend quelques marches et, à la lumière de sa lampe à huile, progresse, courbé (le plafond est très bas), dans l'étroit boyau. Moi, je sais depuis le début de la partie ce qu'il y a dans ce couloir : le cadavre de Rafik, tué par le fantôme qui hante la villa. C'était, avec mon idée de siège par les soldats, mon atout secret pour empêcher les PJ de casser le huis clos. Ce que je ne sais pas, c'est dans quel état se trouve le cadavre. Mais je me souviens que, durant le brainstorming, les joueurs m'ont dit que le fantôme contrôlait les animaux, en particulier ceux du désert.

Pof, idée : Toufik tombe sur le cadavre en décomposition de Rafik, si abîmé qu'il le reconnaît à peine. Son ventre est gonflé comme celui d'une femme enceinte et des choses remuent à l'intérieur. Elles sortent bientôt de sa bouche en un flot continu, ce sont de petits scorpions blancs. Il y a des centaines, des milliers peut-être. Toufik recule aussi vite qu'il le peut, remonte l'escalier et referme précipitamment la porte dérobée, réveillant les amants endormis. Il arrache les draps du lit, dénudant Yasmine (séquence érotique) et les utilise pour colmater la porte. Yasmine et Saadi se rhabillent, tout le monde va réveiller les dormeurs pour les prévenir du danger.

Ahmed, épuisé par sa journée passée à chevaucher bride abattue vers la villa, n'est pas content qu'on le dérange pour des histoires à dormir debout. Il claque la porte au nez de sa sœur et se recouche. Dans la chambre de Nabila, c'est l'apocalypse : partout sur les murs, des versets du Coran ont été peints avec du sang, celui de Nabila elle-même. Elle s'est tranchée les veines avec la dague qui a servi à tuer Ali et gît, morte, sur le sol. Après lecture, les versets ont tous trait aux démons, aux djinns et aux moyens de s'en protéger. Sous le choc, Yasmine a un flash : elle se voit en train de poignarder Ali. En panique, elle file réveiller Ahmed. Saadi, sur une impulsion, décide d'invoquer l'esprit de sa sœur. Super timing de la part de JB !

La morte ouvre les yeux et, d'une voix venue d'outre-tombe, répond aux questions de son frère. Elle a vu Samira et cette dernière a un message pour Toufik : « Venge ton fils ». À la question du vizir qui demande qui l'a tué, elle répond « Yasmine ». Je viens d'activer le Désavantage Pacte de Sylvain. Yasmine tambourine à la porte de la chambre d'Ahmed, qui ne répond pas. Elle entre et le trouve sur son lit, momifié. Il n'y a plus une goûte d'eau dans son corps, ce n'est qu'un squelette desséché. Il y a moins de cinq minutes pourtant, il se portait parfaitement bien ! Toufik prend la jeune femme en charge et l'accompagne jusqu'au salon, soit disant pour la réconforter, mais en fait la poignarde à la gorge. Il utilise la dague qu'il a ramassée dans la chambre de Nabila.

Saadi pénètre à son tour dans la chambre d'Ahmed. Le cadavre ouvre des yeux rouges et, vomissant des poignées de minuscules serpents blancs, se relève. Il attrape son yatagan et part la poursuite de Saadi, qui court au salon rejoindre Toufik et Yasmine. Cette dernière s'est saisie de l'un des sabres pendus au mur mais l'arme, décorative, n'est pas très efficace (dommages fixes). De son côté, Toufik s'acharne mais rate presque tout ce qu'il tente. Sylvain enchaîne les échecs, quelque chose de bien. Moi par contre, je claque un 10/6 dans la tête à Saadi : le coup de sabre d'Ahmed le laisse à deux cercles de la mort.

Le combat se déplace dans la bibliothèque puis dans la chambre du sultan et se termine dans celle de la favorite. Toufik, à force de persévérance, tue Yasmine, mais devient fou. Saadi abandonne la jeune femme pour fuir vers l'écurie. Ahmed, qui n'aura pas été réanimé bien longtemps, gît dans la fontaine, au centre de la cour. Des centaines de serpents grouillent dans l'eau sale. Rattrapé par l'attrition, Saadi se vide de son sang et s'effondre avant d'arriver à l'écurie. Au moment de mourir, il aperçoit Samira, en pleurs. Ne reste plus que Toufik, fou de rage et de douleur. Son fils est mort, il a tué Yasmine, les Al Watan ne sont plus, l'envoyé des El Modakir est mort, le royaume sera bientôt livré à la guerre civile et à la guerre tout court. Accablé, il s'ouvre le ventre avec la dague. Dehors, le jour se lève.

Générique.



Le bilan

Une super partie, à laquelle il n'aura manqué que deux petites heures. On termine à 0h50 mais pour faire bien, il aurait fallu pouvoir pousser jusqu'à 2h30 - 3h. Au lieu d'être obligé de basculer brutalement de la diplo au survival, cela m'aurait permis de ménager une véritable transition d'un genre à l'autre, soigner plus les manifestations de Samira (même si le fait qu'elle ne soit pas apparue en personne durant la partie s'est avéré très sympa) et donner plus d'ampleur à la révélation du sombre secret de Toufik.

D'un autre côté, même si nous avions pu jouer deux heures de plus, je ne sais pas si j'aurais fait tant d'étincelles que ça. À la fin, j'étais rincé. Le combat final ne fut pas, et de loin, le plus inspiré que j'aie arbitré. Mais bon, même s'il a fallu que je plie l'affaire en 90 minutes, j'ai tout lieu d'être satisfait. La partie avait de la gueule, le genre était inédit à ma table (la diplo horrifique, j'avais jamais fait) et malgré les contraintes de temps, nous avons réussi à injecter la totalité du produit de notre brainstorming dans le jeu. On a cogité quatre heures mais on a tout utilisé, et de façon plutôt efficace, me semble-t-il. Ça fait grave plaisir.
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Johan Scipion
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyLun 20 Aoû - 21:40

Voir Venise et pourrir (trilogie) – août 2012



C'est l'été, il fait de plus en plus beau et de plus en plus chaud. Entre deux comptes rendus de parties, je joue à domicile. Autour de la table, rien que des copaings : Krom, Benoît S (El Medico), Benoît C (Altaride) et Sophie. Daniel (Chestel) nous rejoindra plus tard.

Si j'ai réuni la dream team, c'est parce qu'aujourd'hui, c'est playtest. Pas juste un peu, hein, on va essayer tout un tas de trucs dans tous les sens. J'ai plein d'idées et d'envies en suspens, il faut que je passe à la table pour voir ce qui marche et ne marche pas.

Donc j'explique le deal : on va jouer une trilogie en quickshot, un truc que je veux essayer depuis longtemps. L'idée, c'est de poser un setting en début de séance qui nous servira pour trois parties successives. Mais ce n'est pas tout, chacun des segments de cette trilogie sera joué avec une variante de Sombre.

On commencera avec Sombre zéro (option redux pour pouvoir jouer long et parce que je veux tester la mécanique des Traits), puis on enchaînera avec Sombre classic (en privilégiant les nouveaux Traits, que j'ai besoin de voir tourner en partie) et on terminera avec Sombre max (une variante pour faire de l'actioner horrifique à la Predator / Dog Soldiers, que je n'ai encore jamais testée et à propos de laquelle je n'ai en fait que quelques pistes techniques).

Tout le monde est d'accord et c'est top cool.



Brainstorming 1

Krom, qui veut jouer à Venise, rallie les autres à son idée. Moi perso, je ne connais quasi rien à cette ville, juste quelques clichés touristiques, mais ce n'est pas ce qui va m'arrêter. Niveau cinéma, j'ai vu il n'y a pas trop longtemps le Ne vous retournez pas de Nicolas Roeg mais il ne m'a pas laissé une impression impérissable.

La question qui se pose, c'est de savoir où on va jouer dans Venise. Il faudrait que le setting soit suffisamment ouvert pour qu'on puisse y caser trois scénarios, mais pas tant qu'il n'en devienne ingérable. Benoît C suggère un quartier mis en quarantaine à cause de la peste, mais c'est finalement une petite île privée sur la lagune qui est retenue. Sur cette île, un palais dans lequel se déroulera l'action de toute la trilogie.

Je précise que ces trois scénarios ne doivent pas forcément se dérouler à la même époque. Ils peuvent s'enchaîner ou être séparés par plusieurs dizaines d'années, voire plusieurs siècles. On n'a même pas besoin de les jouer dans l'ordre chronologique : le second film peut constituer une préquelle du premier, c'est courant au cinéma. Par ailleurs, on est tous d'accord pour dire que si on joue à Venise, il faut que cela se sente un minimum dans le setting. À un moment, il va falloir qu'il y ait un carnaval et un bal costumé. Les clichés, y'a que ça de vrai.

Benoît S nous dessine une carte de l'île à l'époque contemporaine. Elle est en pente. Construit sur la partie basse, le palais a les pieds dans l'eau. Derrière, un verger en friches). À l'autre bout de l'île, le caveau familial et la maison du gardien. Krom et Benoît C se chargent du palazzio lui-même : un rez-de-chaussée, un étage et un sous-sol. Dans la cour d'honneur, une statue monumentale. Le sous-sol est remarquable : creusées dans la roche, une cave à vin et une chapelle.

Un escalier tournant relie secrètement le bureau (1er) à la bibliothèque (rez-de-chaussée) et à la bibliothèque occulte (sous-sol). Cette dernière pièce est secrète, elle donne par une porte dérobée dans la chapelle. Derrière l'autel, sur la paroi de l'abside, une statue de la Vierge à l'enfant. Elle pivote pour révéler un autre passage secret qui donne dans une pièce circulaire. Sur son pourtour, des alcôves. Au centre, un puits en forme d'étoile à cinq branches. Un tunnel part de cette salle pour rejoindre la cave à vin (nouvelle porte dérobée, le palazzio en est plein). Je suis hyper content, le plan a de la gueule et il me semble bien adapté à ce qu'on a prévu d'en faire.


Le premier scénario sera contemporain, ou presque. Comme les joueurs partent sur un cast d'étudiants façon teen movie horrifique, j'oriente le truc vers les années 80. Une manière pratique de régler la question des portables. Le groupe appartient au département d'Histoire d'une université vénitienne.

+ Benoît S joue Giancarlo Donato, de l'illustre famille Donato. C'est l'un de ses ancêtres, Nicolo, qui a fait construire le bâtiment aujourd'hui laissé à l'abandon. La statue monumentale dans la cour d'honneur est celle de Nicolo. La famille Donato a connu de meilleurs jours et Giancarlo n'est pas non plus son représentant le plus glorieux. Il a entraîné les autres personnages dans un prétendu projet universitaire, avec pour objectif l'obtention d'une subvention pour la restauration du palazzio. En réalité, il veut détourner l'argent à son profit.

+ Hector, joué par Krom, ne vaut guère mieux. Lascar acoquiné avec la mafia, lui vient carrément looter le palazzio et faire des repérages. L'île pourrait servir de base arrière pour organiser des cambriolages et stocker des objets volés. Giancarlo est au courant de ses plans et compte bien prélever son pourcentage sur les éventuels bénéfices.

+ Benoît C joue Jean-Michel, étudiant français et néanmoins gay. Il est secrètement amoureux de Giancarlo. Aaah, les beaux italiens... Lui, ce projet de restauration, il y croit à fond. L'histoire, c'est sa passion, sa vie. Il est impliqué de chez impliqué.

+ Sophie joue Angela, photographe biclassée loseuse, parachutée dans ce plan moisi parce qu'on l'a boulée de tous les autres. Son boulot est de prendre des photos pour aider à constituer le dossier de demande de subvention. Et peut-être qu'il y aurait moyen de tirer de tout ça un livre d'art ou quelque chose dans ce goût-là. Enfin, il faudrait déjà qu'elle réussisse à prendre une photo à peu près potable et c'est pas gagné.

Narrativement parlant, ces persos ne sont pas particulièrement riches. Et le groupe n'est pas le plus intéressant que nous ayons créé (celui du scénario suivant sera bien meilleur) mais on brainstorme dans le cadre technique de Sombre zéro. Même en version redux, c'est-à-dire avec des Traits, cette variante a ses limites, dont je suis conscient. Mon objectif pour ce premier scénario, c'est une partie d'une à deux heures, un survival sans chichis qui doit nous permettre de poser le décor et de préciser la nature des antagos.


Car oui, il reste les antagos. Avec sa bibliothèque occulte et sa salle secrète équipée d'un puits-pentacle, le setting est clairement orienté magie noire, invocation de créatures blasphématoires et cultistes en folie. Ça me va bien. J'aimerais juste qu'on pose une thématique générale avant de se lancer. Vu qu'on joue sur une île en pleine lagune, ce sera la mer.



Voir Venise et pourrir 1 - Un cri dans la nuit

On est à la belle saison et les personnages débarquent sur l'île à bord d'un petit hors-bord. Ils l'amarrent près de celui de Marco, le gardien de l'île. Un vieux bonhomme tout sec qui n'est visiblement pas content d'avoir de la visite. Payé (une misère) par les Donato, il habite la partie viabilisée de leur caveau de famille. Il donne les clés du palazzio à Giancarlo et accepte le gros pourboire que lui glisse Hector. Ce dernier a bien compris que s'il voulait faire du bizness ici, il avait tout intérêt à se faire un ami du gardien.

Le palais lui-même est dans un triste état. Le bâtiment est sain mais, laissé à l'abandon depuis des décennies, est envahi par la poussière, les toiles d'araignées et la moisissure. Jusqu'à la statue de Nicolo, qui a perdu un bras et dont les mouettes se servent de perchoir. La restauration du palazzio est possible mais ce serait un gros chantier, qui évidemment passionne Jean-Michel. Giancarlo est moins enthousiaste, sans doute parce que la décrépitude de l'édifice lui renvoie en pleine face celle de sa famille.

Hector non plus n'est pas à la fête. D'antiquités point. Le palais a été vidé de toutes ses richesses. On n'y trouve plus que quelques meubles pourrissants et brisés, sans valeur aucune. Miracle, il reste de vieilles bouteilles au sous-sol ! Hector ne connaît rien à l'œnologie mais flaire le bon plan et s'emploie aussitôt à organiser le pillage de la cave à vin. Il retourne chez Marco, force sa porte pour y voler de quoi emballer les précieuses bouteilles. Surprise, les murs du logement du gardien sont intégralement couverts d'images pieuses. Étrange. Deuxième surprise, Marco a quitté l'île avec son bateau et a saboté celui des PJ. Impossible de repartir.

Tout cela est bien inquiétant mais pas dramatique. Le groupe avait l'intention de passer trois ou quatre jours sur place, il est donc équipé en conséquence. Les hommes s'installent dans ce qui fut le bureau, Angela dans la chambre attenante. Jean-Michel découvre le passage secret, dissimulé sous plusieurs couches de papier peint. Ne trouvant pas le moyen de l'ouvrir et ne voulant pas endommager le bâtiment, il résiste à la proposition d'Hector, qui voudrait utiliser son pied-de-biche pour forcer le passage. Demain, il fera jour et on pourra s'attaquer tranquillement au problème.

Angela se dévoue pour cuisiner des pâtes (dégueulasses) sur le réchaud de camping, puis chacun s'étend dans son sac de couchage. Angela, qui donc dort seule, est réveillée par des bruits de pas lourds dans le couloir. Elle sort voir de quoi il retourne et, arrivée à l'escalier monumental qui descend dans le hall, tombe nez à nez avec un homme nu et boursouflé, la peau très pâle, couverte de marbrures noirâtres. Un noyé. Elle retourne en toute hâte à sa chambre, referme la porte, cherche quelque chose pour la bloquer, ne trouve rien. Tandis qu'elle s'arc-boute contre le battant, un énorme coup manque l'enfoncer (une jumpscare, et qui a bien fonctionné).

Les hommes se réveillent et vont voir ce qui se passe, mais ne trouvent pas trace d'un quelconque noyé. Dans le bureau maintenant désert, un craquement retentit : le passage secret vient de s'ouvrir de l'intérieur. Pas étonnant qu'il n'ait pas été possible de le faire de l'extérieur, il était condamné par des clous. Les marches sont humides mais il n'y a personne dans l'escalier. Soudain, le Noyé revient à la charge et entreprend de défoncer la porte du bureau. Les PJ se replient dans l'escalier, descendent deux étages et arrivent dans la bibliothèque occulte.

Pour Hector, c'est le jackpot, pour Jean-Michel aussi. Le laboratoire alchimique est déjà intéressant, les rayonnages d'incunables le sont encore plus. Tout un tas de vieux bouquins qui sans doute valent une fortune ! Seul problème, le Noyé les as suivis dans l'escalier. Angela et Jean-Michel se précipitent vers la porte secrète qui donne dans la chapelle. C'est l'endroit qu'avait choisit le deuxième Noyé pour monter son embuscade. Il défonce le visage de l'étudiant, saisit la photographe par les cheveux, la caque une fois contre le mur, puis deux. Elle meurt. Jean-Michel, lui, fuit à toutes jambes dans l'obscurité de la chapelle. Il ne comprend qu'il se dirige vers l'autel que lorsqu'il se cogne dedans. Le souffle court, le visage en sang, il se cache derrière.

Hector, gravement blessé, se débarrasse du premier Noyé à grands coups de pied-de-biche et, suivi de Giancarlo, remonte l'escalier secret. Le second Noyé, qui vient de finir Angela, grimpe à leur suite. Il rattrape Giancarlo et le tue. Hector, lui, arrive dans le bureau, casse la porte fenêtre, sort sur le balcon et saute dans la lagune. Malgré ses blessures, il parvient à rejoindre le quai et la cour d'honneur. Jean-Michel est toujours dans la chapelle, planqué derrière l'autel. Seul dans les ténèbres, il ne voit rien, mais sent dans son dos un courant d'air marin, chargé d'une lourde odeur de putréfaction. À peine a-t-il le temps de comprendre que la statue de la Vierge cachait un passage (maintenant ouvert) que quelque chose de visqueux et de puissant se saisit de lui et le tire violemment vers l'arrière.

Générique.



Brainstorming 2

21h15. La pause pizzas est derrière nous, Daniel nous a rejoint et nous entamons notre deuxième briefing. Cette fois-ci, on joue sous Sombre classic, avec la seule contrainte de playtester de nouveaux Traits. Nous sommes à la Renaissance, début XVIe. Les Donato sont au sommet de leur puissance. C'est carnaval et l'homme fort de la famille, Nicolo bien sûr, donne un bal costumé en son palais.


Les PJ sont eux aussi des Donato, mais d'une branche rivale. Ils sont tous de la même fratrie et on juré de tuer Nicolo pour venger le meurtre de leur père, Ricardo. Et tant qu'à faire, ils ont prévu de se débarrasser également de son fils adoptif, Fabrizio, un gamin de huit ans. Il ne s'agirait pas que lui aussi finisse par entrer, comme dirait Inigo Montoya, dans le business de la vengeance. Les PJ veulent pouvoir dormir sur leurs deux oreilles sans craindre qu'un jour un Frabizio adulte ne vienne leur faire la peau. Tout cela doit finir ici et maintenant. Josépha, la mère des PJ, se meurt à petit feu dans le couvent dans lequel elle s'est retirée. Elle n'attend pour passer de vie à trépas que la bonne nouvelle de la mort de Nicolo. Le bal masqué est l'occasion idéale de passer à l'acte.

+ Benoît C joue Giuseppe, l'aîné de la famille. Marchand autrefois prospère, il traverse des difficultés financières importantes. C'en est au point qu'il a falsifié ses livres de comptes. Nicolo, avec qui il est en affaires, en a eu vent et s'est débrouillé pour récupérer sa comptabilité douteuse. Il n'en a encore rien fait mais sans doute attend-t-il le moment propice pour s'en servir contre Giuseppe. Ce dernier veut absolument remettre la main sur ses précieux registres. Étoffes précieuses, accessoires clinquants, son arrogance l'aveugle au point qu'il se croit resplendissant dans son costume bigarré, alors qu'il est en fait ridicule.

+ Daniel joue Cesare, le second de la fratrie. Entré dans les ordres, il est évêque de Palerme, une ville qu'il déteste. Ecclésiastique corrompu jusqu'à la moelle, il ne rêve que de revenir à Venise, où il n'est pourtant guère en odeur de sainteté. Il est atteint d'une maladie de peau rare à laquelle il n'a trouvé aucun remède. Prières, pèlerinages, sources miraculeuses, cures thermales, médecins, onguents, potions et autres remèdes de bonne femme n'y ont rien fait. Son seul espoir est Nicolo, que l'on dit guérisseur. Avant de le tuer, Cesare a bien l'intention de lui arracher le secret de sa guérison. Il n'est que temps car la maladie progresse : sa peau sent le poisson, se desquame et, peu à peu, se couvre d'écailles. Tout de blanc vêtu, il est déguisé en... coquillage géant !

+ Sophie joue Célia, troisième de la fratrie. Veuve joyeuse et qui compte bien le rester, elle a empoisonné son mari et a la ferme intention d'éviter le remariage. Mais elle cache un sombre secret : Fabrizio est son fils illégitime. Elle l'a eu adolescente, avec un homme de passage. C'était avant qu'elle ne rencontre son mari. Josépha l'a contrainte à dissimuler sa grossesse et à abandonner l'enfant à la naissance. Célia le regrette amèrement et veut tout faire pour récupérer son fils. Le thème de son déguisement est la lune.

+ Benoît S est Lorenzo, le quatrième de la fratrie. Condottiere à la réputation sanguinaire, il revient vers Venise après avoir guerroyé sur le continent. Lassé de sa vie de mercenaire, il voudrait se recaser dans l'armée vénitienne, si possible avec un grade élevé. Il est déguisé en Romain, toge et glaive compris. Ce dernier n'est pas factice, c'est une arme véritable.

+ Krom est Leonardo, le petit dernier de la famille. Sculpteur en mal de reconnaissance, il est handicapé par de fréquentes sautes d'humeur (Bipolaire). Son talent pourtant n'est plus à démontrer. C'est lui qui a réalisé la sculpture monumentale de Nicolo. Couverte d'une étoffe, elle attend d'être révélée à minuit, lorsque le bal masqué battra son plein. Pressenti pour sculpter une Vierge à l'enfant dans la chapelle souterraine du palazzio, et peut-être une fresque également, Leonardo voudrait obtenir de Nicolo une grosse avance. Il est déguisé en Arlequin, son chien Borgia également.



Voir Venise et pourrir 2 - Le bal des assassins

Il fait déjà nuit lorsque le groupe arrive au palazzio. Leonardo était invité, les autres ont profité de son entregent pour s'incruster. Le bal est donné au rez-de-chaussée, dans la bien nommée salle de bal, mais les fêtards se sont répandus un peu partout dans le palais. Tout le gratin vénitien est présent mais impossible de savoir qui est qui car tout le monde est masqué. Nicolo a mis les petits plats dans les grands : un orchestre, une cohorte de serviteurs en livrée, des acrobates, des jongleurs, des cracheurs de feu, des nains, un ours savant. La méga teuf.

Mais de Nicolo point. Les personnages ne savent pas en quoi il est déguisé et quand il se renseignent auprès des domestiques ou des invités, personne ne semble l'avoir vu de la soirée. Tout le monde parle de lui, mais il n'est nulle part. Leonardo dépose ses outils de sculpteur au vestiaire et sort son chien dans le jardin. Le verger est magnifique.

Et là, je cogite. On a commencé à jouer à 22h35 et j'avais l'intention de boucler la partie en deux petites heures, genre fouille discrète du palais, descente au sous-sol et découverte de la salle secrète. Nicolo serait en train d'y invoquer un monstre marin quelconque et il faudrait l'arrêter. Du Cthulhu de base, quoi. Sauf que le groupe de PJ est plus riche que cela. À eux tous, ils charrient pas mal de sombres secrets et de magouilles, ce serait pitié que de ne pas les utiliser. Je décide de les exploiter du mieux que je peux, quitte à allonger la partie. On n'aura peut-être pas le temps de boucler la trilogie (ce qui serait dommage, j'ai grave envie de tester Sombre max) mais c'est plus fort que moi, je n'aime pas gâcher. Et puis bon, pourquoi se contenter de faire du Cthulhu de base quand on peut faire du Cthulhu amélioré, hmmm ?

Donc hop, je me lance. Le plan est simple : organiser une série d'entretiens seul à seul entre Nicolo et chacun des PJ pour foutre un maximum de bordel dans le groupe et surfer sur le chaos. Je saisis chaque occasion d'aparté qui se présente. J'ai décidé dès le départ que Nicolo était ubiquiste mais ne sais pas comment il s'y prend. Est-il réellement doué d'ubiquité, est-il entouré d'assistants qui se font passer pour lui, ou s'est-il créé des doubles ? Pour le moment, mystère. Une seule chose est sure, il peut se trouver à plein d'endroits différents en même temps. Super pratique.

+ Leonardo monte dans le bureau de Nicolo. L'homme qui le reçoit est costumé. Il porte un habit noir, un masque terminé en bec de corbin et un tricorne, ses mains sont gantées de soie noire (ouais ouais, je kiffe Le Marquis). Leonardo lui remet une enveloppe cachetée, dans laquelle se trouvent les esquisses de son projet de fresque. Nicolo lui répond qu'il est intéressé mais doit réfléchir et lui donnera sa réponse plus tard dans la soirée.

+ Cesare sort dans le jardin et est accueilli par Borgia, qui veut jouer et lui apporte un bâton. L'évêque trouve l'animal pénible. Il saupoudre le contenu d'une de ses bagues (un somnifère fourni par Célia) sur le bâton. Bam, le clebs s'effondre. Venant du verger, arrive Nicolo ou du moins un homme costumé de noir qui se présente comme tel. La conversation tourne autour de la maladie de Cesare, dont Nicolo connaît l'existence. Il lui demande de lui montrer sa peau, l'autre s'exécute. Nicolo touche son bras et Cesare a une sensation très désagréable, comme si des dizaines de filaments grouillaient sous sa peau. Pour moi, il est évident qu'il faut lier cette maladie au truc qui se trouve dans la salle d'invocation. Et comme je suis en mode Lovecraft, je travaille à base de tentacules, une valeur sure. Nicolo propose un marché à Cesare : son aide pour tuer les autres PJ contre le remède à sa maladie. L'évêque demande un échantillon. Nicolo répond qu'il le lui fournira plus tard dans la soirée, ils se reverront.

+ Couverte par Lorenzo, qui monte la garde, Célia fouille les chambres de l'étage. Dans l'une d'elles, confortablement assis sur un crapaud, l'attend Nicolo. Habit noir, masque à bec de corbin, tricorne, gants, la totale. Il l'invite à s'asseoir et lui explique qu'il souhaite qu'elle renonce à sa vendetta, l'aide à tuer ses frères et reste ensuite à ses côtés pour élever son fils, Fabrizio.

+ Giuseppe a droit lui aussi à son entretien, durant lequel Nicolo lui promet de lui rendre ses livres de comptes s'il se débrouille pour convaincre ses frères de descendre à minuit dans la chapelle. Pour preuve de sa bonne foi, il lui laisse une page de son registre comptable.

Les PJ se regroupent, échangent des informations et, en les recoupant, en arrivent à se poser deux questions. Primo, comment Nicolo fait-il pour être à plusieurs endroits à la fois ? Ça, j'ai (presque) la réponse. Secundo, comment se fait-il qu'il sache tout de leur plan ? Ça aussi, j'ai la réponse, elle m'est venue en gérant l'un des apartés : Josépha, la mère des PJ, est de mèche avec Nicolo. Elle lui a tout raconté sur ses enfants et les a jetés dans ses griffes pour qu'il les sacrifie à la bestiole du sous-sol.

Mais les PJ, eux, n'en savent rien. Pour eux, le seul truc certain est qu'on les attend à minuit, c'est-à-dire d'ici 20 minutes (j'ai jeté un coup d'œil à ma montre, il est 23h40 et je décide que dans le jeu aussi), dans la chapelle. Le problème, comme le souligne finement Benoît C, c'est que « Aller au rendez-vous, c'est se jeter dans la gueule du loup. Et dans la gueule du loup, y'a le loup ! ». Imparable. Tandis que Leonardo se rend dans la cour d'honneur pour assister à l'inauguration de sa statue, recevoir les lauriers qui lui sont dus et prospecter de nouveaux clients, les autres entreprennent de fouiller le palazzio pour en apprendre plus. Étant donné que la fête bat son plein, qu'il n'y a pas de gardes et que la moitié de invités sont ivres morts, ce n'est pas très compliqué.

Dans le bureau, Giuseppe trouve un document intéressant : une enveloppe dont le sceau, celui de Leonardo, est brisé (je n'invente rien, je réutilise juste l'objet inventé par Krom dans son aparté). À l'intérieur, un contrat, signé de la main de Leonardo, par lequel il s'engage à tuer ses frères et sœurs en échange d'argent. Un faux bien entendu, mais suffisamment bien réalisé pour que n'importe qui puisse s'y laisser prendre.

Leonardo, justement, est dans la cour, tout près de sa statue. À minuit pile, après un petit discours de Nicolo, on enlève le drap qui recouvre l'œuvre. Tout le monde s'extasie. Simultanément, un feu d'artifice est donné. Les fusées sont tirées depuis un bateau amarré dans la lagune. Nicolo, très satisfait, confirme à Leonardo qu'il emporte la commande pour la statue et la fresque de la chapelle. Quelques minutes plus tard, le sculpteur rejoint ses frères dans le bureau. Explication des gravures : qu'est-ce que c'est que ce contrat ? Et d'où vient cette lettre de change qu'on trouve sur lui en le fouillant ? En fait, Nicolo l'a glissée dans sa poche à son insu, au moment de l'inauguration de la statue, mais personne n'en sait rien.

Tandis que Giuseppe, Lorenzo et Célia s'éclipsent pour terminer la fouille du palais, Cesare reste dans le bureau pour surveiller Leonardo, désormais bâillonné et ligoté à une chaise. Nicolo émerge du passage secret, s'en va fermer la porte de la pièce, s'assoit à son bureau et commence à discuter avec Cesare. Il lui donne une petite fiole, l'échantillon de potion qu'il lui a promis, et une dague. Le deal est simple : s'il tue Leonardo, il gagne la potion qui guérira sa maladie. Cesare récupère la fiole et la dague, Nicolo repart par d'où il était venu.

Après son départ, Cesare s'emploie à tirer les vers du nez de Leonardo, mais je n'assiste pas à la scène : tandis qu'il l'interroge, je suis en train de gérer l'exploration des trois autres joueurs. Après avoir visité toutes les pièces, leur conclusion est que le palazzio est bien trop propre. Pas de papiers ni d'objets vraiment personnels nulle part. Clairement, Nicolo gère ses affaires ailleurs. Dans sa bibliothèque occulte bien sûr, mais personne ne connaît son existence.

Les PJ prennent la décision d'aller au rendez-vous de Nicolo, mais veulent organiser une diversion pour pouvoir agir plus librement. L'idée est de mettre le feu au verger. Lorenzo descend dans la cave à vin récupérer deux dames-jeannes d'alcool fort. Utilisant le tunnel secret qui donne dans la cave, Nicolo entre dans la pièce et demande à Lorenzo de le suivre. Celui-ci n'en fait rien mais le passage reste ouvert. Il remonte les bonbonnes, retrouve ses frères dans le verger, arrose les arbres à la ronde (sans se soucier de dormeurs qui cuvent dessous) et met le feu. L'incendie part vite et fort, transformant plusieurs personnes en torches humaines. Aussitôt, branle-bas de combat dans le palazzio. Les domestiques sortent avec des sceaux pour organiser une chaîne. Les PJ en profitent pour descendre à la cave.

La porte dérobée étant toujours ouverte, ils l'empruntent, remontent le tunnel et débouchent dans la salle de sacrifice. Dans chaque alcôve, derrière une grille de fer forgé, un cadavre exsangue. Les PJ reconnaissent à leurs déguisements des invités du bal. Le sol, creusé en entonnoir, est écarlate. Le sang des sacrifiés a coulé jusque dans le puits étoilé. Nicolo, toujours costumé, apparaît en haut de l'escalier qui donne sur le passage (secret lui aussi) vers la chapelle. À ses côtés, Fabrizio, habillé en blanc. À Giuseppe qui lui hurle qu'ils vont l'empêcher de mener à bien ses projets diaboliques, Nicolo répond que c'est déjà fait. Il a accompli le rituel il y a deux heures déjà. Celui qu'il a appelé est déjà là.

Deuxième coup de théâtre, Josépha débarque dans son habit de nonne. Elle a emprunté le même tunnel que les PJ. Ces derniers sont très surpris de la voir ici, elle qui agonisait dans son couvent. De fait, elle semble au bout du rouleau, quasi un cadavre sur pied. Elle avoue le meurtre de son mari, ce qui signifie qu'elle a toujours été du côté de Nicolo. Toute cette histoire de vengeance n'était qu'une machination pour attirer les PJ dans le palais. Là, j'ai vraiment regretté de ne pas l'avoir mise en jeu plus tôt. Avec son look, elle n'aurait eu besoin que qu'un masque pour se fondre dans la masse des invités, et sa présence aurait foutu encore un peu plus de bazar dans le groupe de PJ. Clairement, j'ai manqué de lucidité. J'ai produit une impression de deus ex machina un peu cheap alors qu'en fait, je mitonnais l'idée depuis au moins deux heures. Ce qui aurait pu (dû) faire l'effet d'une bombe ne fut en fait qu'un pétard mouillé. Rageant !

Le combat s'engage. Josépha dégrafe son habit de religieuse. Son crâne se disloque et son corps noirâtre explose en un jaillissement de tentacules, yeux, bouches, crocs, griffes et autres organes moins aisément identifiables. Giuseppe se rue à l'assaut. Lorenzo, lui, dégaine son glaive et saute sur Nicolo, qui s'avance pour le recevoir. Célia, désarmée, se faufile jusqu'à Fabrizio et l'entraîne hors de la pièce, du côté du passage secret qui donne dans la chapelle. Cesare asperge tout le monde d'eau bénite, sans effet notable (il n'est pas Exorciste). Leonardo saisit ses outils de sculpteur.

Nicolo met un énorme coup de boule à Lorenzo et dans le mouvement, fracture son masque. En dessous, la peau de son visage est noire, écailleuse. Ses yeux sont jaunes. Il brise le poignet, le coude puis l'épaule de Lorenzo, et finit par lui arracher le bras (un 10/6, ouch). Mais Lorenzo, qui fait le mort, ne l'est pas tout à fait car il dispose de Dernier souffle, un nouvel Avantage qui lui permet, dans un ultime effort, de se relever, d'agripper Nicolo et de l'entraîner avec lui dans le puits. Il ne peut pas le savoir mais ce sacrifice fait en réalité le jeu de son ennemi. Pour donner toute sa puissance à son rituel, Nicolo devait immoler des personnes de son sang, d'où ce plan compliqué pour attirer les PJ dans son palais. Le sacrifice de Lorenzo boucle parfaitement sa boucle.

Célia entraîne Fabrizio vers la chapelle avec la ferme intention de s'échapper du palais avec lui. Descend l'escalier qui vient du hall, un deuxième Nicolo lui barre le chemin et lui propose encore une fois de rester à ses côtés pour l'aider à élever son fils. Voici donc le secret de l'ubiquité de Nicolo : ils étaient deux ! Des clones créés par magie peut-être, ou plus probablement des doubles produits par la créature qu'il a invoquée et qui commence à émerger du puits sous la forme d'une immense amas de tentacules, de bouches et d'yeux.

Giuseppe s'acharne sur la créature protéiforme qui fut autrefois sa mère. Il le lui tranche un tentacule noir puis enfonce profondément son stylet dans un paquet d'yeux. Ce faisant, il parvient à la tuer. Il s'élance ensuite pour porter secours à Célia, mais Cesare, devenu Malfaisant (après avoir été Fragile puis Méfiant, les joies des Personnalités Atypiques), pète un câble. Il se saisit de Giuseppe et le projette dans le puits. La créature le déchiquette, le dévore, le digère et l'assimile. Cesare devient Fou, arrache son déguisement de coquillage et révèle ses hideuses mutations, identiques à celles de sa mère. Bientôt, il n'est plus lui aussi qu'une monstrueuse créature polymorphe.

Leonardo, que l'apparition du monstre a rendu fou, tombe à genoux et se met à le vénérer. Il est en pleine crise mystique. Célia s'entête à vouloir emmener son fils hors de la chapelle. Je réfléchis une seconde : elle n'est pas armée, donc pas en mesure de blesser le deuxième Nicolo, et je ne me vois pas trop prolonger le combat maintenant que les quatre autres joueurs sont out. D'un autre côté, Sophie est à la ramasse. Elle bâille tout ce qu'elle peut et n'est clairement pas en état de relancer. Comme moi non plus, je ne suis pas au meilleur de mes capacités, je décide de mettre le holà avant que tout ne se barre en sucette narrative. J'active son Désavantage Écervelée pour la contraindre à embrasser une dernière fois son fils. Ce dernier colle sa bouche à la sienne et vomit dans sa gorge des milliers de filaments noirs (ouais, j'aime aussi Hidden), qui ont vite fait d'envahir les organes vitaux de sa mère. Elle meurt.

Quelques années plus tard, Nicolo, consumé par son pacte avec la créature, finit par fusionner avec elle. Malgré la disparition de Célia, qu'il aurait vraiment voulu avoir à ses côtés, il s'est employé à superviser l'éduction de Fabrizio. C'est pour lui et pour l'avenir des Donato qu'il a fait tout ceci. De son côté, Leonardo sculpte la statue de la Vierge à l'enfant, leur donnant les visages de Célia et de Fabrizio, puis réalise la fresque de la chapelle, une peinture hermétique dont le sujet est en réalité le monstre du puits. Il écrit enfin ses mémoires. Plusieurs siècles plus tard, des étudiants en Histoire tomberont sur son journal en explorant la bibliothèque occulte des sous-sols du palazzio.

Générique.



Brainstorming 3

Il est 2h00 du matin et on vient de boucler le deuxième scénar. J'annonce que j'ai encore du jus et suis partant pour le dernier segment de la trilogie. Autour de la table, tout le monde est d'accord et c'est trèèès cool. Donc hop, on s'y remet. À 2h45, après une pause thé/café, on repart pour un troisième brainstorming.

Cette fois-ci, on crash-teste Sombre max. Le concept de cette variante est simple : jouer des durs à cuire façon Dog Soldiers, Aliens ou Predator. Des casseurs de monstres, quoi. Du coup, le concept du groupe se met en place tout seul : les PJ forment une unité d'intervention, bras armé d'une organisation internationale de lutte contre les menaces surnaturelles.

On ne se soucie pas trop de la définir mieux car ça n'aura pas d'impact sur la partie. Tout ce qu'on sait, c'est qu'ils débarquent sur l'île pour éclaircir la disparition d'une poignée d'étudiants en Histoire, qui n'ont plus donné signe de vie depuis quelques jours. Le témoignage du gardien de l'île laisse supposer qu'il y a du surnaturel là-dessous.

+ Krom joue Ghost, une tireuse de haute précision biclassée médium. Elle voit les fantômes dans la lunette de son fusil de sniper.

+ Benoît S joue Doc, le médecin du groupe, capable de prodiguer des soins d'urgence à ses camarades.

+ Daniel joue Naga, spécialiste des explosifs qui se trimballe avec des pains de C-4 plein le slip.

+ Sophie joue Padre, un prêtre exorciste de choc.

+ Benoît C joue Cassius, voltigeur Brutal. Ghost est son Porte-bonheur.



Voir Venise et pourrir 3 - Retour en enfer

Les PJ sont déposés sur l'île en hélicoptère. Le pilote ne peut pas se poser, il doit repartir vers le continent mais peut revenir les chercher en une vingtaine de minutes. La mission des PJ est simple : exploration, sauvetage, destruction. Fouille musclée de la maison du gardien, rien. Cette histoire d'images pieuses qui couvrent tous ses murs est bizarre. Pour Padre, c'est une tentative (maladroite) de protection contre le Mal.

Ghost prend position dans un arbre du verger pour couvrir la progression de ses coéquipiers. À l'étage du palazzio, une forme humaine apparaît à la fenêtre et lui fait signe. Les autres ne voient rien, c'est donc un fantôme. Regroupement dans le bâtiment et fouille en règle : du matériel de camping, des traces de pas et de lutte (une porte défoncée, une porte fenêtre brisée) mais pas âme qui vive. Dans le bureau, une porte dérobée est ouverte. Descente au sous-sol, jusqu'à la bibliothèque occulte. Dans son viseur, Ghost voit le fantôme d'une jeune femme (Angela). Le visage en sang, elle est prise dans une boucle infinie : elle répète encore et encore les mêmes gestes pathétiques.

Le petit passage qui relie la bibliothèque occulte à la chapelle est couvert de sang, il y a des éclaboussures et des traînées sur les murs et le sol, puis tout s'arrête brusquement, comme si on avait à un moment soulevé le cadavre. La piste des gouttes de sang mène dans la chapelle jusqu'à la statue de la Vierge à l'enfant. Il est clair qu'elle dissimule un passage mais il est bloqué de l'intérieur, impossible de l'ouvrir. C'est du boulot pour Naga. Il pose son C-4, tout le monde remonte à l'étage pour se protéger du souffle (une explosion en espace confiné, ça dépote) puis redescend pour continuer l'exploration. Derrière le brouillard de poussière, le passage est ouvert.

Un jeune homme en sort, les mains en l'air. Il dit s'appeler Jean-Michel, affirme qu'il n'est pas armé. Les PJ le reconnaissent : d'après les infos qu'on leur a données lors du briefing de la mission, c'est bien l'un des étudiants qu'ils sont venus chercher. Doc s'avance pour le fouiller mais Ghost voit dans son viseur que des tentacules spectraux grouillent tout autour de lui. Elle tire. Jean-Michel s'écroule et se relève aussitôt, le corps disloqué par des tentacules et des gueules aux crocs acérés, bien réels ceux-là. Padre ne sait pas trop comment réagir et c'est normal : Sophie dort assise. Voyant qu'elle a atteint sa limite, je lui propose d'aller s'allonger un peu pendant qu'on termine. Elle accepte de bon cœur. Je récupère Padre en PNJ et le refile presque aussitôt à Benoît S car son Doc s'en prend plein la tronche. Jean-Michel se jette sur lui et le blesse grièvement.

Dans l'intervalle, Cassius sort dans le jardin pour appeler l'hélico. Au milieu les broussailles du verger en friche, il tombre sur le cadavre d'Hector, en état de putréfaction avancée. Il n'a pas survécu longtemps à ses graves blessures. Dans la chapelle, mauvaise nouvelle : les bestioles ont l'air contagieuses. Autour de la blessure de Doc, Ghost voit des tentacules spectraux qui grouillent et progressent. Padre veut tenter un exorcisme. Il allonge Doc sur l'autel et sort son matos. Naga aussi : un pain de C-4, posé non loin, juste en préventif. Padre se met au travail mais les tentacules spectraux continuent à se développer.

Dans son viseur, Ghost voit un jeune homme (Giancarlo) qui, depuis le passage qui mène à la salle du puits, fume une clope et lui fait un doigt d'honneur. Pour Doc, ça ne s'arrange pas. Les tentacules progressent toujours. Du coup, Ghost prend la décision de l'abattre. Elle lui tire une balle en pleine tête mais ne règle pas le problème : le cadavre mute et coule de l'autel vers le sol pour fusionner avec le corps de Jean-Michel. Naga fait péter son explosif amoche sérieusement le monstre.

Cassius, le voltigeur du groupe, part en exploration. Il franchit le passage ouvert par l'explosion, traverse un petit couloir encombré de gravas, entre dans la salle d'invocation. Au bord du puits, deux cadavres, une femme (Angela) et un homme (Giancarlo), se sont vidés de leur sang. Dans le puits lui-même, il y a du mouvement. Bientôt, une masse indiscernable de chairs en mutation en émerge. Cherchant une sortie, Cassius oblique vers le tunnel qui rejoint la cave à vin. Un Noyé l'y attend et l'attaque par surprise. Pendant qu'il se bat contre lui, Ghost et Padre progressent vers la salle d'invocation, le monstre sur leurs talons. Resté dans la chapelle, Naga met en place son dernier pain de C-4. La bestiole saute sur Ghost et la laisse à l'agonie. Comme elle n'a plus que deux cercles de vaillants, je décide que dans deux Tours, elle aura été assimilée par la bestiole. Attrition.

Cassius règle son compte au Noyé puis sprinte dans le tunnel, suivi par Padre. Ghost envisage de se suicider pour ne pas être absorbée par la créature mais n'a pas le courage de presser la détente. Elle se dissout dans le monstre composite, qui se retourne contre Naga. Celui-ci déclenche son détonateur, il meurt sur le coup. Cassius et Padre sortent du bâtiment et sont récupérés par l'hélico. Tandis qu'ils s'éloignent de l'île, le palazzio, miné par les trois explosions déclenchées par Naga, s'effondre sur lui-même. Dans la lagune, devant la bâtisse en ruines, de gigantesques tentacules noirs jaillissent de l'eau bouillonnante.

Générique.



Le bilan

On a joué quasi non-stop de 15h de l'après-midi à 5h du matin, un truc qui ne m'était plus arrivé depuis, pfff, des années. Une vraie bonne grosse tranche de Sombre. Merci les gens, ce fut grand !

J'ai kiffé le principe de la trilogie, chronophage au possible mais qui permet de rentabiliser à mort le temps passé à construire le setting. On a exploité tout ce qu'on a créé et ça c'est cool. La variété des scénarios aussi m'a fait plaisir. Du contempo, de l'historique, du survival, de la conspi, de l'aventure horrifique, tout ça dans le même décor. Clâââsse.

Bon, la troisième partie aurait pu être meilleure. Même dopé au soda et au thé, j'étais grave à la ramasse. J'ai manqué de fraîcheur. Idéalement, j'aurais voulu mieux connecter le dernier scénario aux deux précédents, mais je n'avais plus les ressources intellectuelles pour le faire vraiment bien. J'ai utilisé Jean-Michel de façon assez plate et n'ai rien pu tirer d'Hector. Au départ, je pensais proposer à Krom de le rejouer mais me suis rendu compte que le perso ne collait pas du tout avec le profil un tantinet overbourrin des PJ à la mode Sombre max. C'était pas raccord. J'aurais bien aimé aussi réussir à glisser au moins une allusion à Nicolo ou Fabrizio, mais ça n'a pas fait tilt. À ma décharge, je n'ai pas pu, comme je le fais habituellement lorsque je mène Sombre, m'appuyer lourdement sur mon système, vu que je le crash-testais. La gestion technique me mobilisait un max de neurones, ce qui m'a bouffé pas mal de l'énergie qui me restait.

À part ça, j'ai kiffé. Cette ambiance d'actioner horrifique était très fraîche, très fun, et je compte bien remettre le couvert aussitôt que possible. Sombre max, c'est de la grôôôsse baballe. Enfin, potentiellement. J'ai pas mal de réglages à faire et un bon paquet de playtests devant moi, mais c'est super prometteur.

Niveau playtest justement, cette séance fut excellente. J'ai éclairci un point technique important concernant Sombre zéro redux (la gestion des Traits) et c'était crucial avant sa publication dans Sombre 2. J'ai pu tester plein de nouveaux Traits pour Sombre classic, et y'en a qui dépotent de chez pote. J'ai là aussi pas mal de petits ajustements techniques à réaliser, mais ça me met d'ores et déjà la banane. Enfin, j'ai constaté que mon intuition concernant Sombre max était bonne : y'a bien moyen de faire du Predator ou du Dog Soldiers en bidouillant un poil Sombre. Par contre, c'est un sacré chantier. Clairement, j'ai du taf devant moi.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMar 21 Aoû - 8:49

Cette trilogie devait être vraiment amusante.
J'adore le setting, je vais le repomper direct Smile
Par contre : ayant testé un setting où les persos n'étaient pas en situation de survivants mais plus acteurs (ambiance supernatural), j'ai constaté la difficulté (voire l'impossibilité ou l'inintérêt) d'incarner les personnalités... Qu'en était-il dans la troisième partie de cette trilogie (le mode max) ?
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMar 21 Aoû - 13:04

deathambre a écrit:
Cette trilogie devait être vraiment amusante.

Oué, ce fut trèèès cool. Cool



Citation :
J'adore le setting, je vais le repomper direct

Feedback o-bli-ga-toi-re.



Citation :
Par contre : ayant testé un setting où les persos n'étaient pas en situation de survivants mais plus acteurs (ambiance supernatural), j'ai constaté la difficulté (voire l'impossibilité ou l'inintérêt) d'incarner les personnalités... Qu'en était-il dans la troisième partie de cette trilogie (le mode max) ?

C'était la même chose et c'est normal : les Personnalités sont faites pour appuyer la condition de victime des PJ de Sombre classic. C'est une mécanique pointue. Si on l'utilise pour autre chose que ce pour quoi elle est prévue, on prend le risque que ça marche moins bien.



Dans le cadre de mon playtest, trois observations :

+ Certaines Personnalités étaient inadaptées. En gros, tout ce qui est passif / introspectif / relationnel ne fonctionne pas. Logique : dans actioner, il y a action donc il faut des Personnalités actives. Mais ça, je le savais déjà : je mène des survivals bourrins et là non plus, même si les PJ y sont des victimes, faut pas faire dans la dentelle niveau Personnalités. Brutal cool, Timide pas cool.

+ La progression dans les phases n'a pas grand intérêt. Sorti du concept de PJ-victime, l'évolution progression vers la folie perd vachement de son sens. Trop subtil pour un gros bourrin.

+ Par contre, les cartes de Personnalité, pourvu évidemment qu'elles soient bien choisies, gardent tout leur intérêt en tant que guide de roleplay. C'est parce que Naga était Impulsif qu'il a appuyé sur le détonateur à la fin. Et ça, c'était über cool.



Conclusion :

Dans Sombre max, je vais donner *une* carte de Personnalité, tirée d'une Personnalité active. Elle servira pour tout le scénario, le joueur n'en changera pas. Le numéro de la phase dépendra du scénario et/ou du concept du groupe de PJ. Genre :

+ Dog Soldiers : soldats lambda > phase 1.
+ Predator : baroudeurs machos > phase 2.
+ Douze salopards : repris de justice > phase 3.

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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMer 12 Sep - 0:08

Le jeudi 27 septembre, à partir de 19h, Terres Etranges fête la sortie de Sombre 2 aux Caves Alliées.



Sombre 2, c'est ça :


Sombre - Page 2 Sombre2_couv_GregGuilhaumond_300


Sommaire détaillé :

+ Scénario > Ubiquité : un survival compétitif inspiré de Battle Royale et Cube.

+ Articles > Peur et Briefing : deux articles pour mieux comprendre et mieux expliquer Sombre.

+ Variante et scénario > Sombre zéro et Overlord : un Sombre (encore) plus simple pour initier les débutants, accompagné d'un scénario Seconde Guerre mondiale.

+ Univers > Extinction : un dark world qui combine horreur marine et apocalypse lovecraftienne. Que faisiez-vous le jour où Cthulhu s'est réveillé, hmmm ?

+ 8 pages d'aides de jeu.



On pourra acheter la revue sur place, se la faire dédicacer et même, oui oui, jouer à Sombre. Viendez nombreux !



Les Caves Alliées
44 Rue Grégoire de Tours
75006 Paris
Métro Odéon ou Mabillon
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyDim 16 Sep - 13:03

"Voir Venise et Vomir"
==============

Venise, 1984. Les joueurs incarnent des truands de petite envergure, habitants de Venise ou de passage, qui sont recrutés au pied levé par un second couteau de la pègre local pour réaliser la braquage d'une importante livraison de coke qui se déroulera pendant le carnaval de Venise, dans un quartier qui sera alors quasiment désert (avec en plus forte occupation des "carabiniers" pour la sécurisation des festivités)...

Personnages :
+ une convoyeuse de personnes et de biens (prudente) qui a vendue sa sœur parce qu'elle ferait une bonne gagneuse,
+ un pépé cambrioleur (méthodique) dont le partenaire habituel s'est fait serré et qui compte sur ce dernier coup pour prendre sa retraite,
+ un braqueur camé jusqu'aux yeux (nerveux) qui n'hésite pas à faire des fix à des gamins de 12 ans,
+ un gros-bras d'usurier qui aime faire mal (brutal).
Étant donné leur passif et leur mode de vie, ils commencent tous en mode "perturbé". Descriptions de leurs pires bassesses passées. La partie est déjà interdite aux mineurs et aux femmes enceintes, avec des répliques du genre :
+ "Tu comprends, si je te brise les pouces et ben tu pourra plus bosser ; alors je vais te déboîter le genou et te plier la jambe à l'envers, comme ça tu comprendra bien qu'il faut te dépêcher de rembourser. Remarque, moi, plus tu mets de temps et plus je vais jouer avec toi, alors c'est comme tu veux."
+ "Vas-y gamin, c'est de la bonne tu vas planer sévère. T'inquiètes pas, ce coup-ci c'est offert. Donne-moi ton bras".
+ "Détends-toi ma fille. Tu verras, là où on va ils s'occuperont bien de ton bébé et après tu pourras retourner sur ton trottoir. Allez, avale-moi ces comprimés et ça ira mieux".

Première scène : rencontre avec le commanditaire et constitution du groupe, avec déjà de premières tensions entres les personnages... Le commanditaire expose les modalités et les convainc de les payer avec la coke qu'ils pourront ramener.

Seconde scène : le repérage des lieux de la livraison puis du point de repli donné par le commanditaire qui leur a bien expliqué qu'après ce coup là il leur faudrait prendre le large et éviter Venise quelques temps, et qui se propose donc de les aider à le faire.
=> Le lieu de la livraison est une bâtisse mitoyenne d'un quartier un peu vétuste et populaire du "Castello", desservi par des canaux de faible largeurs et offrant de multiples possibilités d'actions...
=> Le point de repli et d'extraction (puisque le commanditaire va les aider à se faire la malle) est un palazzio oublié, perdu dans la lagune dans une crique rocailleuse. Il s'agit de la demeure d'un tristement célèbre dentiste de la fin des années soixante, arrêté pour homicide involontaire tandis qu'il anesthésiait une jeune fille venue chez lui se faire avorter, puisque c'était là sa seconde activité. Sa femme s'est jetée du balcon lorsque l'affaire a révélé qu'il profitait de l'état d'inconscience de ces jeunes demoiselles pour se payer un petit bonus. Ceci, seul pépé la cambriole l'a deviné en découvrant la bâtisse vermoulue et moisie.

Troisième scène : le temps presse, la livraison n'a lieu que dans quelques heures et le groupe se met en action. Ils décident de dessouder les hommes affectés à la réception de la marchandise et d'attendre gentiment les convoyeurs...
Réussite en bain de sang, certains sont blessés, une concierge innocente (?) y passe dans la foulée.
Je passe sur les détails sordides, âmes sensibles s'abstenir.

Les convoyeurs arrivent, procèdent au débarquement de la coke lorsqu’une mitraillette fait feu depuis la fenêtre d'un immeuble voisin. Panique. Des hommes costumés déboulent d'une venelle proche et foncent vers le groupe en pleine transaction. Juste le temps de fuir, le groupe saute dans son canot à moteur et file plein gaz hors de la ville, une poignée de poursuivants sur leurs talons et dans leur sillage.
Sortie de la ville en trombe et cascades, le groupe parvient à mettre un peu de distance avec le canot des poursuivants ; juste assez pour arriver à rejoindre la crique sans être repérés.
Trahisons, ils en sont sûr. Mais de qui ?
Ils entendent le canot de leur poursuivants filer droit et s'éloigner de leur repaire, ce n'est donc pas leur commanditaire. Ils se dévisagent. Tous ont été blessés lors du braquage puis de la fuite, mais certains bien moins que d'autres... (En fait : erreur stupide du MJ qui devait en épargner absolument un pour augmenter la suspicion mais qui a craqué dans un instant de faiblesse, enivré par le sang des PJ. Damned).

Ici commence la quatrième et dernière scène : la plongée dans l'horreur. Il eut été tout à fait possible à ce stade de continuer en mode "reservoir dogs", car malgré l'erreur du MJ tout était en place pour que le groupe se déchire. Néanmoins, parce qu'un SOMBRE sans créature démoniaque n'a pas la même saveur, j'ai gardé mon "titi twister" prévu au départ...

Quatrième scène : le groupe explore le palazzio tandis que dehors le vent se lève, limitant fortement les possibilités de navigation dans la lagune... Ils peuvent ainsi apprécier la décoration surchargée toute en tapisseries murales et mobilier baroque, aux couleurs vives et aux motifs floraux, agrémentée des larges coulures des infiltrations moisies. L'odeur est prenante et ajoute encore à l’écœurement visuel. La poussière est collante. L'atmosphère est pesante.
Deux des membres découvrent l'accès au sous-sol - une porte dans la cuisine - et décident de descendre. Ils vont découvrir l'atelier secret du bon docteur et ses multiples trésors subtils :
+ le mobilier de dentiste rutilant, avec le commanditaire mort d'atroces manières et vautré sur le fauteuil en cuir ;
+ une étagère remplie de bocaux de fœtus immergés dans le formol.
Ils paniquent et dans leur élan, l'un d'eux renverse l'étagère dont le contenu des bocaux vient se répandre au sol, ajoutant à la mare de sang une marée de formol et de petites crevettes à divers stades de croissance...
La partie a été interdites en salles et la vidéo ne se vend que sous le manteau dans les réseaux bien informés.
Le reste du groupe est pendant ce temps en pleine scène de braquage mutuel (éclosion des suspicions et des animosités) : prise de panique en entendant les cris venant d'en-bas, la convoyeuse descend pépé et ses rêves de plages brésiliennes.
Les deux du bas remontent et tout le monde se questionne pour faire le point...
=> C'est le moment que choisit pépé pour se relever, façon zombie. Il est animé par l'esprit maléfique qui hante les lieux. Re-panique, cris, etc.
=> C'est le moment que choisissent les poursuivants de tout à l'heure pour découvrir le palazzio et venir s'y accoster (ils sont apparemment meilleur canotiers car le vent a forcit et le bruit du ressac ne rassure pas nos bandits).

Le groupe est-il fait comme des rats ?
Non. Avec le vent qui souffle et s'engouffre, au sous-sol est découvert l'accès à une grotte, derrière un poster de Marylin. En effet, caché derrière le papier glacé de la pin-up en taille réelle, le gros-bras découvre que le mur à été défoncé à la masse et qu'il ouvre sur un boyau étroit mais praticable. Plus le temps de réfléchir car les poursuivants viennent d'entrer dans le palazzio : le groupe s'enfonce dans la grotte...
A peine ont-ils mis le pied dans le boyau, que des cris horribles résonnent depuis l'étage, accompagnés de bruits sourds de luttes et de projections de corps mous contre les murs durs : il semblerait que les poursuivants soient tombés sur un problème de taille, du genre qui a des dents...
Alors le groupe s'enfonce dans les entrailles de la terre jusqu'à une portion trop étroite pour être traversée de front : il faut se mettre de côté et rentrer le ventre pour se faufiler. C'en est trop pour le braqueur toxico qui fait demi-tour et retourne à l'atelier du bon docteur. Là il y retrouve pépé armé d'une bouteille d'acide et d'un scalpel.

Nos deux derniers survivants traversent le passage étroit et débouchent sur une vaste salle remplies de stalagmites et de stalactites, au bon moment pour profiter pleinement de l'excellent acoustique de la vaste salle qui répercute en échos amplifiés les atroces hurlements du braqueur brûlé à l'acide par pépé. Gros-bras déjà fortement secoué sombre définitivement dans sa folie sadique et se jette sur sa compagne de fortune, dans l'intention de défouler sur elle ses pulsions tortionnaires les plus viles. Elle parvient à lui échapper le temps de traverser la salle et de découvrir qu'un lac remplit le fond. Dernier fol espoir du survivant, sans hésitation elle s'y plonge, espérant parvenir à découvrir un passage vers la lagune, comme dans les films.

Générique de fin : images silencieuses d'une eau bleu troublée par les projections de vases. Une femme se débat dans un dernier soupir pour tenter de trouver un passage définitivement inaccessible...
Travelling arrière pour remonter à la surface du lac souterrain et croiser le corps d'un homme qui s'est noyé avant elle. Il tient encore serré dans son poings un morceau de tissu arraché à sa robe.
Le travelling reprend pour finalement se maintenir en plan fixe sur des peintures pariétales primitives, témoignant d'une scène d'offrandes d'une quelconque tribu envers une choses indiscernable, dont la grotte semble être la tanière...

=> Donc : un scénario avec de l'action où les joueurs ont été des "acteurs dominants la situation" avant de basculer en "survivants subissant les évènements".
=> Les personnalités actives ont bien fonctionné et le setting se prêtait bien à les faire démarrer en niveau 2.
=> Par contre, je (et les joueurs aussi) doute fortement que l'on puisse démarrer une partie en niveau 3 pour qu'elle dure plus de 30 minutes.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMer 19 Sep - 12:23

Super partie, super compte rendu, ça fait bien plaisir à lire tout ça !

Et puis je kiffe le titre. What a Face
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMar 25 Sep - 23:54

C'est officiel, Sombre 2 est paru !



Sombre - Page 2 Sombre2_couv_GregGuilhaumond_300


Sombre est un jeu de rôle pour se faire peur comme au cinéma. Chaque partie est un film d'horreur dans lequel les joueurs incarnent les victimes.

Sombre light, un kit de démo gratuit, est téléchargeable sur la page officielle.

La revue Sombre est entièrement dédiée à Sombre (logique ^^). Chaque numéro se présente sous la forme d'un fascicule de 72 pages au format A5.

Sombre 2 n'est *pas* la réédition de Sombre 1, c'est la suite. Le premier numéro était le livre de base, le deuxième est un supplément. Sombre 2 ne contient que du matériel inédit : deux scénarios, deux articles, une variante et un univers.




SOMMAIRE DÉTAILLÉ DE SOMBRE 2 :


+ Scénario > Ubiquité : un survival férocement compétitif inspiré de Battle Royale et Cube.

+ Articles > Peur et Briefing : deux articles pour mieux comprendre et mieux expliquer Sombre.

+ Variante et scénario > Sombre zéro et Overlord : un Sombre (encore) plus simple et plus rapide pour initier les débutants, accompagné d'un scénario Seconde Guerre mondiale. Vous voulez faire découvrir le jeu de rôle en 15 minutes ? Vous voulez jouer avec des enfants à partir de 6 ans ? Sombre zéro est fait pour vous !

+ Univers > Extinction : horreur marine et apocalypse lovecraftienne. Depuis le réveil de Cthulhu et l'élévation colossale du niveau des océans, les Profonds sont les nouveaux maîtres de la planète. L'extinction de notre espèce est imminente.

+ 8 pages d'aides de jeu.




Pour commander Sombre 2 et/ou Sombre 1, c'est par ici.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyJeu 27 Sep - 12:36

Hop, petit rappel.


La soirée de lancement de Sombre 2, c'est donc ce soir à partir de 19h aux Caves Alliées.

On pourra y acheter la revue (les deux numéros), se la faire dédicacer et aussi, bien sûr, jouer à Sombre.


Venez à plein, ça va être fun.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyDim 7 Oct - 0:33

White trash + Deep space gore II : Xenogore - démos au Grand Nain Porte Quoi



Le mois de septembre de la mort

Ouais, en septembre j'ai enchaîné comme un gros taré. Le bouclage de Sombre 2 d'abord, puis Cidre et Dragon (huit démos en deux jours, truc de fou), la supervision de l'impression du zine, la promo sur le Net pour sa sortie et enfin, la soirée de lancement aux Caves Alliées avec mon semi marathon dans le froid au retour.

Deux jours plus tard, le 29, je termine en beauté avec le Grand Nain Porte Quoi, petite convention trèèès sympa au nord de Paris. Autant le dire tout de suite, je suis mort de chez mort. Exténué et qui plus est en montée de crève (mon retour des Caves ne m'a pas fait que du bien, c'est clair). Et d'ailleurs, ça dure encore : au moment où j'écris ces lignes, je suis en mode full crève. C'est de saison, vous me direz.

Toujours est-il que samedi dernier, c'était déjà pas la joie. Au point que je songe un moment à me décommander. Mais finalement non, je m'entête. D'une, je n'aime pas faire faux bond au dernier moment. De deux, les gens du Nain Porte Quoi, le club qui organise le Grand Nain Porte Quoi (hé, faut suivre :-D), ont l'air à la fois sympas, sérieux et accueillants. C'est en tout cas l'effet que m'a fait Djez, leur prez, lors de nos échanges de MP. Et moi, ce genre d'attitude, ça me plait grave. Du coup, cette conv je veux la faire.

Malgré la motivation, la mise en route est quand même difficile. Durant la journée, j'ai un peu l'impression d'avancer dans de l'eau. Y'a rien qui va, tout est compliqué. Heureusement, on ne m'attend qu'en soirée, ce qui me permet de me chauffer doucement. Mais bon, j'accumule le retard. Et bien sûr, comme toujours dans ces cas là, y'a tout qui foire. Un distributeur automatique en rade à ma station de métro, une queue pas possible au seul qui reste (ah bon sang, les guichets c'était quand même mieux), deux vieilles grand-mères qui ne savent pas se servir du bouzin, des correspondances qui ne s'enchaînent pas super bien (dix minutes à poireauter sur le quai à Châtelet, autant à Aulnay), et voilà que j'ai presque une heure dans la vue à l'arrivée.

Mais mon timing est en fait parfait : j'arrive pile poil au début de la première bourse aux scénars ! Je pose mon sac, monte sur la scène et présente Sombre. « La peur comme au cinéma », « Le meilleur jeu du môôônde », « C'est bon mangez-en » et toute cette sorte de choses. Johan qui fait son show, quoi. Je suis là pour assurer deux créneaux, un court en soirée, un long en nuit. J'ai prévu un White trash pour le premier, un quickshot pour le second, sauf si j'ai les mêmes joueurs de l'un à l'autre, auquel cas j'utiliserai le créneau de soirée pour brainstormer et celui de nuit pour jouer. Les brainstormings nocturnes, c'est en général moyen moins.



White trash

Donc je récupère cinq joueurs et pars m'installer dans une petite pièce très cool au sous-sol. Je m'installe (en large !) sur la table et m'enquiers des disponibilités des joueurs. C'est compliqué. Il y a un groupe de trois potes (Manu, Jean-Louis, Vincent) qui sont a priori disposés à faire la nuit. Un quatrième gars, Gus, veut bien également mais dans ce cas, il se désiste pour la soirée. Il quitte la table et remonte dans la salle commune pour faire du jeu de société. Okaaaay. Enfin, j'ai une joueuse motivée mais qui ne pourra pas rester la nuit, elle est d'astreinte au bar pour tenir la buvette.

Donc exit le brainstorming préparatoire au quickshot, je pars sur une sorte de double feature un peu bancal vu que près de la moitié de la table changera à la partie suivante. Mais au moins, je mettrai le pied à l'étrier des joueurs novices (Vincent, noob de chez noob, et Manu, à peine deux parties au compteur).

La partie est très sympa. J'enchaîne les fumbles en scène 1, quelque chose de bien (trois 20 en six jets, quand même). Du coup, je claque un joker en scène 2 pour inverser la vapeur mais me rends compte aussitôt que c'est une erreur car je décime le groupe au Tour suivant. Mal mené. La fatigue qui émousse mon jugement, c'est un classique. Du coup, la scène 3 tourne court (le TPK est un peu sec) mais l'ensemble de la partie se tient plutôt pas trop mal. Les joueurs sont bien dans le trip et j'ai suffisamment d'énergie pour animer correctement. Y'a une bonne ambiance.

Comme on a encore un peu de marge avant la fin du créneau, j'enchaîne sur un Sombre zéro. Là aussi, partie très cool (avec un survivant). Mais le Grand Nain Porte Quoi, c'est deux créneaux sinon rien. Je m'accorde une petite pause puis enchaîne.



Quickshot - Deep space gore II : Xenogore

Je récupère Manu, Vincent et Jean-Louis, bientôt rejoints par Gus, et on se met à brainstormer. Je devance un peu la seconde bourse aux scénars mais j'ai une table fonctionnelle et il est déjà tard. Pas de temps à perdre. J'explique rapido les règles à Gus, qui est heureusement un rôliste expérimenté, et on attaque la tempête de cerveau vers 0h30.

Quand Djez vient nous avertir du début de la bourse, on ne bouge donc pas. Je lui indique simplement que je peux accueillir un joueur supplémentaire. Et de fait, Didier, que j'avais déjà eu à ma table lors de [url="http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=6673#p6673"]ma démo à Boulogne[/url], vient nous rejoindre. Les grandes lignes du setting sont déjà définies, mais il arrive pile poil pour affiner le bousin et créer les persos. Et comme il a déjà joué, je n'ai même pas besoin de lui expliquer les règles, ni celles du jeu ni celles du quickshot. Putain, ça s'emboîte bien !



Le brainstorming

Manu, Jean-Louis et Vincent avaient décidé du sous-genre avant la pause : du space-op. Je corrige en science-fiction horrifique parce que bon, les persos vont quand même en chier sévère. Ça va pas être une promenade de santé cette affaire. Mais on est en fait tous d'accord : on part sur du Alien-like. Ça me va bien, c'est jamais que la troisième fois. Du coup, je commence à être rodé aux settings spatiaux. L'espace profond a ses contraintes, notamment en ce qui concerne le renouvellement du cast, que j'appréhende mieux maintenant.

Passé la première impulsion, ça patauge quand même un peu. La faute à l'inexpérience de Vincent et Manu, qui peinent à faire le tri entre les idées narrativement viables et les autres. C'est bien naturel. En temps normal, j'aurais cadré plus mais la fatigue et la crève qui montent jouent contre moi. Mon cadrage est un poil moins efficace qu'à l'accoutumée. Didier, toujours très volontaire, relance un peu la machine et dans l'élan, je finis par trancher les derniers nœuds qui nous gênaient. Qu'obtient-on ?

On joue sur l'Atlantis, une navette en transit entre Gorvey III, une planète coloniale perdue dans le trou du cul de la galaxie (y'a tellement rien dessus que ses habitants la surnomment « le Caillou ») et Epsilon, une gigantesque station spatiale en banlieue de la Terre. On me dessine un plan en trois flyers et deux étages. Niveau 1, poste de pilotage, salle de l'IA du vaisseau (Rose), chambre de stase et quartiers de l'équipage (les PJ). Niveau 0, chambre de stase des passagers, cages de stase des xénomorphes, salle des machines et navette de sauvetage. D'un niveau à l'autre, un escalier en colimaçon et un grand monte-charge, qui descend jusqu'au niveau - 1 (le sol lorsque la navette est stationnée).

Ça va mal sur le Caillou : une épidémie de peste extraterrestre a décimé la population. La maladie est portée par des créatures locales, les fameux xénomorphes, auxquels il m'appartient de donner une apparence. Une discussion sur le clebs d'Alien 3 m'oriente vers un look animal. À cet instant, je visualise des sortes d'araignées géantes car j'ai envie de trucs qui grimpent aux murs. Les bestioles sont en tout cas précieuses car les espèces extraterrestres ne sont pas si fréquentes que ça dans l'univers. Les xénos, ils valent grave du pognon. Sans compter que le virus dont ils sont porteurs pourrait bien lui aussi rapporter gros. La guerre bactériologique est un marché juteux.

+ Gus joue Anton, xénobiologiste Bipolaire (cynique/fragile) mais doté d'un certain Sang-froid. Il est dévoué corps et âme à la CosmoCorp, la puissante corpo qui l'emploie. Son seul vrai souci, ce sont les xénos. Le reste, trop rien à battre.

+ Jean-Louis joue Jack, médecin affectueux et néanmoins Ambidextre, qui, lui, s'intéresse surtout au bien-être des colons rapatriés sur Epsilon. Parmi eux, son fils Billy.

+ Manu joue Tom, pilote discipliné. Jack lui doit une Faveur (c'est grâce à lui que Billy a été embarqué) et il a un Code de conduite personnel, ne jamais tuer d'humains. Ni l'un ni l'autre de ces Traits ne trouveront à être exploités. J'avais validé le Code de conduite car je pensais utiliser les passagers comme antagos, mais ça ne se fera finalement pas. Par contre, il a un sombre secret pas si secret que ça (les autres joueurs sont au courant) : il fait de la contrebande de spécimens biologiques.

+ Didier joue Cassius, technicien méthodique, touche-à-tout et spécialiste de l'hibernation (les spécimens sont précieux, s'agirait pas qu'il leur arrive quelque chose durant le voyage). Il est doué d'un Sixième sens mais est Infecté par la peste, qu'il a contractée sur le Caillou. Ce Désavantage est secret, on en a causé en aparté et Didier joue feuille fermée.

+ Vincent joue Kurt, agent de sécurité brutal. Kurt n'est pas n'importe qui, c'est lui qui a capturé les quatre xénos qui se trouvent à bord. Vincent lui a choisi deux nouveaux Traits : In extremis et Enragé. Bon, l'ensemble est un peu beaucoup optimisé pour le combat mais ça me va plus que bien vu que la partie s'annonce bourrine.

Car oui, on va jouer bourrin, enfin demi bourrin. Durant le brainstorming, j'ai fait mon laïus habituel, précisant notamment qu'il y avait grosso merdo deux options, de l'action type survival ou du roleplay ambiance mélo/diplo dark. On m'a bien sûr répondu roleplay (tous les groupes le font ;-)). Sauf que niveau PJ, ça ne suit pas. Le groupe est très sympa, diversifié, fonctionnel et bien dans le trip SF horrifique, mais c'est pas avec ça qu'on va tenir trois heures en roleplay pur. On est loin des [url="http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=8387#p8387"]Mille et une morts[/url] ou même simplement du deuxième segment de [url="http://terresetranges.net/forums/viewtopic.php?pid=8425#p8425"]Voir Venise et pourrir[/url]. Ça ne va pas le faire, y'a pas assez de matière.

Je pousse un peu à creuser les PJ mais ça ne prend pas trop. Didier refuse catégoriquement que le sien fasse des trucs séquessuels avec celui Jean-Louis, ce qui me fait sourire. Les autres joueurs n'ont pas l'air plus motivés. En définitive, je lâche l'affaire : il est déjà tard, on est fatigués et les idées ne viennent plus. Le setting et le cast sont orientés survival et c'est donc ça qu'on va jouer. Des fois, faut pas chercher midi à quatorze heures. Quand on a faim et qu'on vous donne de la soupe, faire la gueule et balancer l'assiette au prétexte qu'on vous avait promis de la purée n'a pas grand sens. Quand on a faim, on mange.

Et quelque part, ça m'arrange. Si en mode roleplay, ce sont surtout les joueurs qui font le jeu, j'ai pour ma part la charge d'animer la partie. Dans de tels cas, la mise en scène est assez exigeante. En particulier, bien gérer le rythme demande pas mal de feeling. C'est assez pointu. Clairement, je ne suis pas assez en forme pour ça. En survival, les choses sont plus simples. C'est moi qui fait la partie, mais au moins, j'ai un itinéraire tout tracé : événements terrifiants > antagos > TPK (ou presque). Ça, dans l'état où je suis, je peux le faire. Enfin, je crois.

L'objectif serait plutôt de soigner le premier tiers de la partie, de façon à potentialiser le dernier, c'est-à-dire la phase pur survival. Il y a des trucs cool dans les persos, les deux secrets en particulier, qu'il serait dommage de ne pas injecter dans le jeu. Mon objectif sur cette démo, c'est donc ça : un survival avec (petit) supplément de roleplay. Faut savoir se fixer des buts atteignables sinon on risque la grosse gamelle.



La partie

3h40, on s'y met. Les joueurs escomptent que je sorte leurs persos de leurs cuves de stase en pleine crise (ils sont partis sur cette idée dans le brainstorming), mais je trompe leurs attentes. Je fais ma fille : les joueurs proposent, mais je dispose. Parce que si j'attaque direct en situation d'urgence, on va jouer 90 minutes (ce qui serait un peu raide après trois heures de briefing) et ce sera du survival pur. Or moi, y'a rien à faire, je veux une phase roleplay. Donc amorce tranquille : Rose sort l'équipage de stase à trois jours de l'arrivée sur Epsilon, pour superviser la décélération et l'arrimage à la station. Procédure standard.

Donc on joue un peu la routine de l'Atlantis. Comme je l'ai précisé durant le brainstorming, ça ne produit pas des scènes en soi super intéressantes (« OK, je checke la salle des machine », « OK, je checke le poste de pilotage », pas top trépidant) mais ça permet de se roder tranquille aux persos. Je ne fais pas durer trop longtemps, cela dit. Je lance le truc avec une anomalie dans les cuves des passagers (qui eux n'ont pas été réveillés, ils ne le seront qu'à l'arrivée à Epsilon). La peste s'est développée pendant le voyage, ils ont tous l'air de zombies, y compris Billy. Phase terminale. Or c'est médicalement impossible : la stase bloque *tous* les processus physiologiques.

Deuxième alerte : Cassius est infecté. Je n'attends pas que Didier lâche son secret, je le révèle pour lui. À Jack bien sûr, parce qu'il est médecin et qu'il a une grande habitude de la peste. Il a traité de très nombreux cas sur le Caillou. Cassius en est au stade prodromique, mais c'est suffisant pour l'œil averti de Jack. Réunion au somment dans la salle commune : que faut-il faire de Cassius ? Celui-ci est en tournée d'inspection du côté des cages des xénos et là aussi, les nouvelles ne sont pas bonnes : les cages fonctionnent parfaitement bien et pourtant les bestioles sont en train de se réveiller. C'est pas bon.

Gus me pose la question à 1.000 euros : « Au fait, ils ressemblent à quoi, les xénos ? ». Sur l'inspiration du moment, je lui réponds : « Des crabes. Carapace noire, lisse et plate, yeux rouges. Pattes dépliées, deux bons mètres de diamètre ». Du crabe de chez crabe, et il y en a quatre à bord du vaisseau, deux par cage de stase. Aie aie aie.

Tom ordonne à Rose de bloquer Cassius dans le sas de sortie de la zone cargo. Des sas, y'en a à différents endroits du vaisseau. Ils sont en verre renforcé, étanches bien sûr mais pas blindés. Du sas de laboratoire médical, pas de banque. Pendant que ses compagnons discutent de son sort, Cassius patiente dans le sas. Il sait qu'il peut ouvrir la porte de sortie en trifouillant le panneau de contrôle (la profession technicien, ça sert) mais ne le fait pas pour le moment. Il attend de voir comment va évoluer la situation. Attente de courte durée : une sorte de vapeur noire, plus dense que l'air dans lequel elle fait des volutes (comme un liquide épais qu'on aurait versé dans de l'eau), commence à filtrer dans le couloir, depuis l'intérieur de la salle des xénos. Bad news pour Cassius, qui sabote le sas pour l'ouvrir et rejoint le reste de l'équipage au niveau 1.

Ça commence à devenir sérieux donc on s'équipe. Tom s'arme (une batte de base ball), Kurt aussi : un pistolet, dont il ne sait pas se servir (il n'a pas Tir, et en fait, aucun PJ ne l'a) mais qui le rassure. Cassius, lui, se la joue McGuyver et ramasse des produits chimiques pour foutre le feu. En farfouillant dans la zone de stockage, il tombe sur le congélateur portable de Tom, celui dans lequel il conserve des échantillons infectés en vue de les revendre au marché noir sur Epsilon. Dans le bac, des morceaux de cadavres avec au-dessus, une tête coupée. Cassius l'attrape par les cheveux et va la balancer en plein sur la table de la salle commune. Il pète un câble devant ses coéquipiers : mais qu'est-ce que c'est que ces sauvages qui découpent des cadavres et le bloquent en bas, avec les xénos ?!? Super performance de Didier, je kiffe grave. Hé, je l'ai mon supplément de roleplay !

Anton contacte CosmoCorp, qui lui confirme que les xénos sont ultra prioritaires et l'équipage parfaitement sacrifiable. Tom cause avec Rose, qui est en train de perdre le contrôle du niveau 0. La caméra de contrôle est en rideau et le reste se barre en couille petit à petit. Du coup, on s'équipe encore : razzia de Cassius sur l'alcool à 90 de l'infirmerie, Jack chope deux couteaux à viande dans la cuisine (aaaah, l'ambidextrie...), Anton une feuille de boucher. Pendant ce temps là, l'obscurité venue du niveau inférieur progresse et commence à remonter par l'escalier en colimaçon.

Deux problèmes. 1/ Faut pas être grand clerc pour se douter que la fumée est, d'une manière ou une autre, toxique, et que les xénos se baladent dedans. 2/ Si la procédure de décélération n'est pas mise en route dans 7 heures, l'Atlantis ne va pas pouvoir s'amarrer à Epsilon, il va la percuter à pleine vitesse. Ça va être un massacre. Or y'a plus rien qui répond nulle part, Rose est dans les choux. Faut descendre au niveau inférieur, voir ce qui se passe dans la salle des machines et si y'a moyen de rien, évacuer par la navette.

Plan A : l'ascenseur. Les PJ forcent la porte mais les crabes sont déjà dans la cage, on les entend se déplacer le long des murs. Et ils semblent bien être plus de quatre. Cassius imbibe des draps d'alcool et les balance dans la cage : effectivement, ça grouille. Donc plan B : l'escalier. À la queue leu leu (ordre de marche et tout, old school style), chichement éclairés par deux torches électriques (l'obscurité semble littéralement absorber la lumière), les PJ descendent... et se séparent.

Tandis que tout le monde se dirige vers la salle des machines (Kurt éclate les portes du sas, tirs faciles), Jack s'engage de l'autre côté, vers la zone cargo. Il veut savoir ce qu'est devenu son fils (très cool roleplay de Jean-Louis). Anton, lui, est resté au niveau 1. Tandis que l'obscurité envahit petit à petit la zone de pilotage et de vie, il obstrue comme il peut l'escalier et se replie dans la salle de stase de l'équipage, son hachoir à la main.

Dans la salle des machines, c'est pas la joie. Tom casse trois glow sticks et les balance dans la pièce, pour limiter le risque de se faire surprendre par les xénos. Diagnostic de Cassius : les moteurs fonctionnent mais l'énergie n'arrive pas à la propulsion, l'obscurité l'absorbe (et sans doute s'en sert pour se développer). Il faut abandonner le navire. Problème : l'écoutille de la navette est fermée et trois crabes se pointent. Combat !

Kurt s'acharne sur l'écoutille pour l'ouvrir, Cassius allume la mèche de fortune de son bidon de produits chimiques inflammables, Tom envoie des coups de batte à droite et à gauche. Les crabes font ce qu'ils font le mieux : enfoncer l'extrémité de leurs pattes rasoir dans la chair tendre des humains. C'est une boucherie. Je mets un d6 au centre de la table, sur sa face 6. À chaque Tour, je change de face, 5 puis 4 puis 3 puis 2 puis 1 (merci Gauvain, cette routine est bien sympa !). Compte à rebours, oui mais vers quoi ?

Jack remonte le couloir qui mène à la salle de stase des passagers. La gravité artificielle ne fonctionne plus dans cette partie du vaisseau, le voici qui flotte entre sol et plafond. Mais pas de souci pour lui, il a été formé au travail en microgravité (c'est juste pour l'ambiââânce, quoi). Partout autour de lui, l'obscurité, sombre et noire et ténébreuse. Il se déplace à tâtons, guidé par la voix de son fils. Billy l'appelle dans l'obscurité. Ils se rejoignent, Jack prend son fils dans ses bras et, horreur, sent plusieurs paires de pattes qui sortent des flancs de l'enfant. Je regarde Jean-Louis et lui demande : « On gère en narratif ? ». Il acquiesce. Billy referme ses pattes sur le dos de son père et le transperce. Jack meurt. Le père et le fils dérivent, enlacés, dans la pièce, tandis qu'un nuage de petites bulles de sang se diffuse autour d'eux.

Kurt a ouvert l'écoutille, il entre dans la navette. Alors qu'un crabe lui saute sur le dos, Cassius lance son cocktail Molotov du pauvre sur les deux xénos qui sont autour de la navette. Ils prennent feu. Dommages fixes + 1 Blessure par Tour pendant trois Tours (brûlures sur carapaces, effet moyen). Tom entre à son tour dans la navette, les deux crabes enflammés suivent. Il pulvérise l'un d'eux d'un coup de batte, mais meurt bientôt. Cassius lui aussi y passe. Mon d6 arrive à 1 : les trois glow sticks s'éteignent. La scène n'est plus éclairée que par les deux lampes électriques que les PJ avaient descendus avec eux.

Dans la navette, Kurt prend cher et ne peut rendre les coups : armé de son pistolet, il est total inefficace. Il grille une action pour choper la batte de Tom. À ce stade du combat, il est en Corps 1 et il ne reste plus, grâce aux efforts conjugués de Cassius, Tom et Kurt lui-même, qu'un cercle de Blessure à son adversaire. J'hésite un moment à faire monter le troisième crabe dans la navette mais y renonce. D'une, c'est moyen crédible : avec un cadavre d'humain et un de crabe, plus un xéno et un autre humain en train de se battre juste derrière l'écoutille, y'a pas trop la place de passer quand on est un crustacé géant. Par ailleurs, la tension horrifique est à son plus haut. Pas besoin de rajouter de l'antago. Du coup, j'annonce que le troisième crabe se met à bouffer Cassius dans la salle des machines.

Dans la navette, Kurt est donc à 1 contre un xéno à 1 aussi. Tendu de chez tendu. Vincent claque une adré mais foire son attaque. C'est pile poil le moment d'utiliser son Avantage In extremis, mais Vincent n'y pense pas. C'est sa première partie de jeu de rôle, il est fatigué, ça ne fait pas tilt. Une fois n'est pas coutume, je fais le meneur gentil et le lui rappelle parce que bon, l'occasion est trop belle. Du coup, il claque son post-it, transforme son échec en réussite de justesse et fait 1 Blessure au crabe et le tue. Mais le xéno, qui n'a pas encore fait son jet pour ce Tour, pourrait lui aussi le tuer. Suspense. Je lance le dé et rate. Kurt s'en sort vivant ! Il referme l'écoutille et éjecte la navette, une sorte de canot de sauvetage ultra roots.

Au niveau 1, Anton s'est réfugié dans un tube de stase. L'obscurité est quasi-totale. Tout autour de lui grouillent les crabes aux yeux incandescents. Comble de l'horreur, certains parlent. Leurs paroles sont indistinctes mais clairement humaines. En désespoir de cause, Anton s'ouvre les veines. Il se tranche le coup avec sa feuille et se vide de son sang devant son public de xénos. Limite s'ils n'applaudissent pas.

Générique...

...et stinger : un navire marchand parti d'Epsilon récupère la navette de l'Atlantis. Du magma de cadavres en décompositions, les membres de l'équipage extraient Kurt, comateux mais toujours vivant. Par l'écoutille de la navette coule un filet d'épaisse fumée noire plus lourde que l'air.



Le bilan

Une très bonne partie, qui plus est hyper cinématographique. Je suis bien content car vu mon état et l'heure où on a commencé, ce n'était carrément pas gagné. Vraiment, super satisfait. Un bon survival spatial, avé le supplément de roleplay qui va bien. Nickel chrome.

Niveau technique, In extremis me plait beaucoup (quel dommage que Vincent n'ait pas percuté, ça aurait été absolument énorme !). Enragé par contre est bidon : l'intitulé n'est pas top adapté aux victimes, c'est plutôt un truc d'antago. Et l'effet n'est pas intéressant du tout. Hop, poubelle. J'ai depuis cogité à un remplaçant qui me semble nettement plus prometteur : Lent. Il s'annonce assez fun celui-là.



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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyVen 19 Oct - 17:50

The hellbound train II : Petit père des peuples – chez Sevoth – octobre 2012



Sur le forum de Terres Etranges, j'ai écrit que j'étais disposé à venir mener Sombre dans le salon de gens que je ne connais ni d'Ève ni d'Adam. Car oui, je n'ai peur de rien. Sevoth, avec lequel j'avais échangé quelques posts sur Antonio Bay mais jamais vu en vrai, m'a pris au mot.

Il m'a contacté cet été parce que mon compte rendu des Mille et une morts lui avait tapé dans l'œil. Le temps que je boucle Sombre 2 et que je négocie mon mois de septembre de la mort, nous voilà mi-octobre. Il est 16h20, on est installé chez Mehdi (Sevoth), dans son salon, sur une immmmense table Ikea. Je me suis assis en large bien sûr. Autour de moi, Khalil, le frère de Mehdi, Stéphane, David et Cédric. Cinq gamers, qui plus est rôlistes expérimentés et qui se connaissent bien. Mais qui ne me connaissent pas ni ne connaissent Sombre.

Mehdi les a un peu briefés, mais je sais d'expérience que rien ne vaut le vécu de jeu pour se faire une idée un peu nette de ce qu'implique de jouer un perso de Sombre. Le PJ-victime, ça ne va pas tout à fait de soi, particulièrement quand on est un vieux routard du jeu de rôle. Donc hop, (mini) double feature : on attaque avec un Sombre zéro, variante techniquement plus simple mais qui s'appuie sur les mêmes concepts que Sombre classic. Très pratique pour faire découvrir le jeu, y compris à des rôlistes confirmés. Je l'avais déjà fait en ouverture d'un quickshot (Les mille et une morts justement) et ça avait bien fonctionné.

Là aussi, ça le fait bien. D'une, ça nous permet de faire plus ample connaissance ludique. De deux, je me rends compte que la table est vraiment trop trop grande. Ça ne va pas le faire cette affaire. Mais Ikea, c'est mâââgique : on peut retirer les rallonges ! Une reconfiguration tabulaire plus tard, voilà que j'attaque l'explication des règles de Sombre classic. Il est 16h45. Et pour une fois, je profite que je ne suis contraint par rien pour prendre mon temps.



Le brainstorming

17h25, la tempête de cerveau commence. J'explique que l'alternative, c'est du roleplay pour une partie longue ou de l'action pour une partie courte, mais que si on choisit le roleplay, faut assurer un minimum sur la créa collective. On me répond du roleplay, ce qui me va bien car je suis en descente de crève et j'ai du jus. J'ai (honteusement) esquivé une pendaison de crémaillère la veille pour garder de la patate pour la partie d'aujourd'hui. Résultat, je suis bien en jambes.

Donc Mehdi veut du steampunk, mais il est bien le seul. Stéphane contre avec du teen movie, proposition qui n'a pas vraiment plus de succès. La table finit par se mettre d'accord sur un setting ferroviaire. Pour moi, c'est cool. Je l'ai déjà fait donc je vois un peu quelles sont les contraintes du décor. Hésitation sur l'époque : contemporain ou historique ? Ce sera de l'historique. Sans doute l'effet conjugué de la proposition steampunk de Mehdi et du setting WWII d'Overlord, mon scénar Sombre zéro. L'avantage, c'est que ça permet de marcher plus facilement sur le toit des wagons, ce qui peut donner lieu à des scènes sympa. Avec un TGV, c'est moyennement possible, mais si le train est à vapeur, ça le fait déjà plus. Train à vapeur donc.

OK mais où et quand exactement ? Tout le monde tombe d'accord pour dire qu'un scénar ferroviaire est plus cool si le train roule quasi tout le temps, ce qui implique un long trajet. On parle d'une voie transcontinentale, donc des États-Unis, puis de l'Orient Express. Du XIXe siècle puis du XXe. Moi, je précise qu'un minimum de passagers m'arrangerait bien, histoire de ne pas avoir trop de PNJ dans les pattes.

Au final, on se met d'accord pour la Seconde Guerre mondiale. On jouera dans un train privé, celui d'un général russe, à une date indéterminée juste avant le début de la guerre. Ledit train est composé de trois wagons (restaurant, salon, couchage) et d'une motrice avec tender. On m'en fait un plan très sympa en quatre flyers. À bord, un poignée de Notables (je file l'Avantage gratos à tous les PJ), des conspirateurs de haut vol réunis dans un but bien précis : tuer Staline. Ouais, parfaitement.

+ David joue le général Mikhaïl Ratchev. Discipliné comme l'est un bon militaire, il sait Tirer mais est Lent. C'est lui qui a réuni les conjurés dans son train personnel.

+ Mehdi joue le général Siegfried von Eisenstein, un Allemand Impulsif, ami personnel de Ratchev. Dépendant à la morphine, il est accompagné de son Chien, Nikodemus.

+ Khalil joue Konstantin Kosloff, apparatchik Passionné, membre de haut niveau du PCUS. Trotskiste prétendument repenti, il a sauvé sa tête en dénonçant ses camarades sous la torture, ce qui l'a Chagriné.

+ Stéphane joue Tadeusz Brezinski, un Juif polonais, fervent communiste biclassé représentant de la SdN. Il est à la fois Rusé et Brutal car Bipolaire.

+ Cédric joue le cardinal Ambrosio Agnesini, membre de la Curie romaine et nonce apostolique. Il est évidemment Conformiste, mais aussi Endurci et Maladroit.

On part donc une un scénario diplomatique. J'explique bien que les premières heures de jeu, ce sont aux joueurs de les meubler par leurs négociations et m'assure qu'ils auront les moyens de le faire. Le problème est simple : si tous les personnages sont d'accord pour tuer Staline, y'a juste pas de jeu. Il faut, sur ce sujet central, des oppositions franches dans le groupe parce que sans ça, on va plier la négo en trente minutes.

Donc : Ratchev veut tuer Staline. C'est lui qui a organisé la rencontre, forcément qu'il est d'accord avec l'ordre du jour. Agnesini aussi. Sa position est celle de tout catholique qui se respecte : plutôt les nazis que les communistes, donc affaiblissons les Rouges. Eisenstein par contre veut sauver Staline car c'est en fait Hitler qu'il veut assassiner. Ouais, on n'a pas de limites. Brezinski veut lui aussi sauver Staline, mais pas par calcul, par conviction : c'est un stal pur et dur. Kosloff est indécis. Trotskiste dans l'âme, la mort de Staline ne le dérangerait pas, mais c'est surtout le retour de grand Léon qu'il vise.

Pour ce qui est des antagos, Mehdi est branché nazis. Je n'ai rien contre, le nazi est un bad guy vachement pratique car facile à crédibiliser, mais le contexte me parait peu favorable. Je ne vois pas bien comment faire débarquer des commandos allemands dans le train. On est dans les années 30, l'héliportage n'est pas trop envisageable. Ce seront donc des Russes, ce qui me va mieux. Et il y aurait aussi des antagos surnaturels, façon double effet Kiss Cool. Ça me va bien aussi, sauf que là non plus, je ne vois pas trop comment les connecter avec le reste du bousin. Au final, on tombe d'accord pour dire que l'élément fantastique sera fortuit : un truc bizarre, non expliqué car non explicable, une sorte de zone de turbulences surnaturelles traversée par le train. Nickel.



La partie

Une heure de pause repas et à 21h55, on s'y met. Tous les PJ sont dans le train, qui roule quelque part en Europe de l'Est. Ratchev reçoit ses invités dans le wagon salon et fait les présentations. Nikodemus confié au personnel de service, les PJ sont confortablement installés dans les fauteuils et le canapé du bar. Et comme le salon de Mehdi est tout près de la table, j'en profite pour délocaliser la partie de ce côté. On est en situation de semi-réel et c'est bien cool. Ratchev a prévu de commencer en douceur, mais les autres le pressent de rentrer dans le vif du sujet. Ils n'ont que quelques heures pour se mettre d'accord et tous ont conscience qu'ils risquent gros à conspirer de la sorte. Y'a pas de temps à perdre.

On passe donc dans la salle de réunion, la pièce la plus sécurisée du wagon. Les PJ s'installent à la table des négociations, au milieu des cartes d'état-major épinglées sur les murs. Dans le vrai monde, retour à la table Ikea. Le semi-réel vraiment, c'est fun. Tellement en fait qu'on va y passer plusieurs heures. Je ne sais plus combien exactement, mais entre trois et quatre. Les joueurs sont bien dans leurs persos, la conversation va bon train. Puisant dans sa culture historique, chacun cherche des arguments pour appuyer sa position. Ça roleplaye bien.

Moi, je fais de l'animation. J'écris des petits papiers pour transmettre des infos et cadrer le roleplay, gère Vassili (le secrétaire de Ratchev) qui fait quelques apparitions durant la réunion, fais tourner du neurone sur la phase 2 (l'arrivée des soldats russes) et m'organise des apartés avec chacun des joueurs. L'objectif, c'est de faire monter la mayonnaise narrative. Je leur demande à tous ce que les autres ignorent à propos de leur PJ. La créa ayant été collective, tous les backgrounds sont connus de tous. Je leur donne maintenant la possibilité d'y ajouter un ou deux sombres secrets, des trucs fun et pourquoi pas utiles.

Mais en fait, ils n'ont pas tant d'idées que ça. Du coup, c'est moi qui rallonge la sauce. Avec Brezinski, j'y vais fort. J'annonce purement et simplement à Stéphane que son PJ est un espion. Il n'est pas venu pour participer au complot contre Staline mais pour cibler les conspirateurs. Son boulot, c'est de déterminer qui doit être éliminé (Ratchev bien sûr, mais d'autres aussi sans doute) et qui peut être récupéré par les services secrets soviétiques. Je m'attends à moitié à ce que Stéphane regimbe, mais pas du tout. Il me répond du tac au tac « Pour qui je travaille ? ». Excellent ! Et j'ai la réponse. Son boss est le général Nikita Petrov. J'ai cogité au nom pendant que les joueurs roleplayaient.

Maintenant que j'ai une base solide, je peux broder dessus. Tandis que Stéphane s'éclate à jouer les agents double, passant d'une Personnalité à l'autre et brouillant les pistes idéologiques, je fais passer un petit papier à Khalil pour lui signaler que l'officier qui l'a autrefois torturé était un certain Petrov, militaire brutal et passablement obtus. Autant imbriquer un peu les persos, ça ne coûte rien et ça peut rapporter gros.

Pour ce qui est d'Eisenstein, je demande à Mehdi de m'expliquer pourquoi son perso veut mordicus la mort d'Hitler. Vu les risques qu'il prend à s'accoquiner avec des Russes, ça ne peut pas être qu'une question d'idéologie. Il doit bien y avoir un truc un peu plus personnel là-dessous. On en arrive à la conclusion qu'Hitler a poussé son frère au suicide, voire l'a suicidé. Je fais circuler l'info par petit papier au cardinal Agnesini, de façon à ce que ce dernier ait un argument pour affaiblir la position de l'Allemand. En aparté, on a en convenu avec Cédric que son perso savait tout ce que lui, en tant que joueur, sait sur tous les autres. Le réseau Vatican est bien informé.

Les débats se sont à un moment portés sur la question de l'après Staline. Ah bin oui, si on le tue, qui on met à sa place ? Ratchev ? Ce dernier déclare qu'il serait volontaire mais pas non plus opposé à un autre candidat. J'informe David par petit papier que son perso n'envisage personne d'autre que lui-même à la place de Staline. Il ne va pas prendre tous ces risques pour un autre ! Je le lui confirme en aparté et lui demande de me préciser ce qu'il a en tête pour les conspirateurs réticents. Il ne peut pas se permettre de les renvoyer chez eux comme si de rien n'était, les risques de fuite sont trop importants. Que va-t-il faire de Brezinski, Eisenstein et Kosloff, qui n'ont pas l'air décidés à vouloir rentrer dans le complot ?

David est un gars sympa, il me répond qu'il a prévu de les faire arrêter et emprisonner à leur descente du train. Une exécution sommaire aurait été plus dans le ton, mais je ne discute pas les ordres d'un général. Par contre, j'en informe Kosloff par l'intermédiaire de Vassili, qui est en fait un membre de son réseau trotskiste. Conséquence, Khalil commence un peu à flipper. Lorsque le train s'arrête dans une petite gare russe pour faire le plein de sa citerne d'eau, il descend sur le quai voir ce qui s'y passe. Brezinski l'accompagne. Et sur qui tombent-ils ? Sur Petrov bien sûr ! Encadré par une demi douzaine de soldats en armes, le général leur intime l'ordre de remonter dans le train, qui repart.

Car oui, je suis passé en phase 2. J'ai laissé la négo aller à ce que j'estimais être son terme, ce moment où j'ai eu l'impression que les joueurs avaient épuisé les ressources de leurs PJ et où je ne voyais plus de quelle manière je pouvais relancer. À ce moment, je suis en transition vers la phase 3, le survival, qui va en bonne logique conclure la partie. L'articulation des deux, négo et survival, c'est Petrov. Il prend le contrôle du train, signifie à Ratchev qu'il est aux arrêts pour haute trahison (ses ordres viennent d'en haut, directement de Staline) puis rassemble les PJ (sous bonne garde, il va de soi) dans le wagon restaurant.

Il fait fouiller leurs bagages par ses hommes (bye bye le Luger d'Eisenstein et le pistolet de Ratchev) puis les interroge un par un, dans le bar. Je m'enferme dans une petite chambre contiguë au salon et convoque chaque joueur à son tour. D'abord Brezinski, histoire qu'il fasse son rapport à son chef. Le Polonais balance Agnesini et Kosloff. Quand Petrov lui dit qu'il cherche le contact trotskiste de Kosloff dans le staff de Ratchev, Brezinski hésite entre Andrei (le serveur, qui est apparu à une ou deux reprises dans la partie) et Vassili. Ratchev lui apprend qu'Andrei est un homme à lui, celui grâce auquel il a eu les informations qui lui ont permis d'intercepter le train. C'est donc Vassili le traître.

La position de Brezinski sur Eisenstein est plus nuancée, il pense qu'il y a moyen d'en faire un agent soviétique. Pour Ratchev bien sûr, c'est la mort et rien d'autre, Petrov le confirme à Brezinski avant de lui rendre la petite dague qu'il avait dissimulée dans ses bagages. Pour finir, une rapide séance de castagne au visage, histoire de l'amocher un peu (une Blessure, volontaire donc) avant de le laisser rejoindre ses compagnons. Petrov ne les a pas laissés ensemble pour rien, il attend de voir ce que Brezinski pourra encore en tirer.

Je ne me souviens plus ensuite de l'ordre exact dans lequel j'ai interrogé les autres PJ. Je décide que Petrov fait confiance à Brezinski et me sers donc du rapport de Stéphane comme d'un guide pour gérer les apartés suivants. Les hommes de Petrov menottent et tabassent sévèrement Kosloff (procédure d'accident). Le général négocie avec Eisenstein en deux fois. Petrov lui propose de les libérer, lui, Agnesini et Brezinski, en échange de sa collaboration. Une taupe dans l'entourage d'Hitler, ça intéresse les Russes. Mais l'Allemand, surestimant sa propre valeur, est trop gourmand : il voudrait également sauver Kosloff, que Petrov n'est pas disposé à lâcher. Aussi bien parce que c'est un traître que parce qu'il a un contentieux personnel à régler avec lui. La dernière fois, le trotskiste lui a échappé, il entend bien que ça ne se reproduise pas. Au final, la négo tourne court et le cas Agnesini vite expédié.

Reste Ratchev, que Petrov connaît personnellement. Ils ont fait l'école militaire ensemble et se détestent cordialement. En souvenir du bon vieux temps, Petrov veut lui laisser une porte de sortie honorable : il lui tend un pistolet, qu'il charge d'une balle et le laisse seul dans le bar. Plutôt que le suicide, David préfère un baroud d'honneur. Ce faisant, il condamne la famille de son perso, mais moi, en termes narratifs, ça me convient bien. N'entendant pas de détonation, Petrov envoie deux de ses soldats aux nouvelles. Ratchev blesse grièvement le premier mais est tué par le second. Petrov balance son cadavre en plein milieu du restaurant puis renvoie les PJ (sous bonne escorte) dans leurs quartiers, c'est-à-dire dans les compartiments du dernier wagon.

Je prends le plan établi par les joueurs, sur lequel est indiqué la répartition des compartiments telle que décidée par David en début de partie (dans le train de Ratchev, c'est Ratchev qui place ses invités. Logique). De gauche à droite, c'est-à-dire du fond au début du wagon, quatre compartiments. Dans le premier, la chambre de Ratchev. Dans le second, deux lits superposés : Brezinski et Agnesini. Dans le troisième, Eisenstein et Kosloff. Dans le quatrième, six couchettes pour le personnel du train. Il y a un passage secret entre le premier et le deuxième compartiment, à travers une armoire. Le passage est à sens unique et il n'y a que Ratchev qui le connaisse. Sauf qu'il est mort. David est toujours à table avec nous, je ne sais pas encore trop ce que je vais faire de lui.

Bon, cette histoire de passage secret me plaît bien donc je fais tourner du neurone pour refiler l'info aux PJ, tant qu'à faire de façon pas trop téléphonée et, si possible, un minimum dramatique. Hop, idée : traîné par les soldats de Petrov, Vassili rejoint bientôt Eisenstein et Kosloff. Ils l'ont torturé et il est dans un sale état. Il meurt dans les bras de Kosloff en lui révélant l'existence du passage secret dans l'armoire, mais le pauvre Vassili a tellement souffert qu'il ne sait plus où il est. L'armoire secrète ne se trouve pas dans ce compartiment ! Communication avec celui d'à côté à travers la cloison (qui est fine, je l'avais précisé en début de partie) mais chou blanc : le passage ne s'ouvre pas de ce côté.

Qu'à cela ne tienne, Eisenstein, qui est en phase Téméraire, a un plan : il casse la vitre de son compartiment et entreprend de grimper sur le toit du train. À pleine vitesse. En pleine nuit. Durant une tempête de neige. Les Allemands n'ont décidément aucune limite. Enfin si, y'en a une quand même : le système. Va falloir réussir un jet de Corps. Échec. Le général s'accroche à une corniche métallique, qui lui reste dans les mains. Il se casse la gueule, est rattrapé in extremis par Kosloff, les deux y perdent du Corps. L'échec étant définitif, ce n'est pas par là qu'ils vont réussir à s'enfuir. Évidemment, tout ce raffut rameute les gardes qui, constatant que le compartiment est désormais ouvert aux quatre vents, déplacent les deux PJ dans celui de Ratchev.

Mauvaise nouvelle : dans le compartiment de Ratchev, y'a Ratchev, enfin son cadavre. Il est étendu sur son lit, criblé de balles. Bonne nouvelle : Eisenstein et Kosloff sont désormais en mesure d'utiliser le passage secret de l'armoire. Ils rejoignent Agnesini et Brezinski dans le compartiment d'à côté, mais Brezinski démobilise tout le monde (Stéphane fait des merveilles de roleplay, putain). On abandonne les plans d'évasion et on va se coucher. Eisenstein déplace le cadavre de Ratchev sous le lit pour pouvoir s'allonger sur la couchette. Évidemment, au milieu de la nuit, le cadavre ouvre des yeux rouges, se lève et se jette sur ses anciens compagnons. David rouvre sa feuille de perso, efface ses cochages de Corps et d'adré, et passe en mode antago.

Branle-bas de combat. Eisenstein sort du compartiment, tombe sur un soldat de garde qui s'est endormi. Il lui prend son fusil, dont il ne sait pas se servir. Il n'a pas Tir. Celui qui possède l'Avantage, c'est Ratchev ! Mais Ratchev est passé dans le compartiment d'à côté pour faire la peau à Agnesini et Brezinski, qui du coup sont sortis dans le couloir. Kosloff, lui, a un gros problème : les soldats l'ont menotté au lit de Ratchev. Ils l'avaient déjà fait dans l'autre compartiment, mais le trotskiste avait réussi à se libérer. Là, pas moyen. Heu-reu-ze-ment, Eisenstein arrive, tire dans la menotte (action facile, réussite automatique) et le libère. Le garde, qui a dégainé sa baïonnette et a halluciné de voir Ratchev ressuscité, tourne les talons et va chercher du renfort dans le wagon salon. Brezinski a eu la même idée.

Ratchev, un revenant du froid, est attiré par la chaleur des vivants, qu'il absorbe. Ce n'est pas tout à fait un zombie car il dispose toujours de l'intégralité de ses capacités intellectuelles, y compris donc l'usage de son Avantage Tir, mais il est en mode attaque à outrance. Il a trop besoin de chaleur humaine, qu'il vole grâce à la procédure de gêne. Il se jette sur quelqu'un et s'il réussit un jet de Corps, s'y accroche et lui fait une Blessure à chaque Tour. Or David enchaîne les jets de folie. Il réussit tout ce qu'il tente, ne subit guère de dommages (les autres PJ n'ont pas d'armes à dispo, sauf Eisenstein qui ne sait pas se servir de la sienne et Brezinski, qui est déjà loin). Conséquence, ça meule grave du Corps.

Kosloff et Agnesini se réfugient dans le troisième compartiment, dans lequel il y a maintenant vingt bons centimètres de neige... et un autre revenant du froid ! Bin oui, le cadavre de Vassili est toujours sur le lit, enseveli sous la neige et le givre. Il se lève et se jette en grognant (il a les cordes vocales paralysées par son propre sang congelé) sur les PJ, qui réussissent à le balancer par la fenêtre. Pendant ce temps, Brezinski fonce vers l'armurerie qui se trouve dans la salle de réunion et loote tout ce qu'il peut en flingues et munitions. Le garde rameute les autres soldats, en pleine beuverie au bar. Ils sortent en titubant dans le couloir, suivis par Petrov. Lui aussi est rond comme une queue de pelle.

Dans l'autre wagon, Eisenstein fait face à Ratchev. Il a un fusil à la main et ne sait pas s'en servir. Oui mais l'autre n'est pas au courant qu'il n'a pas Tir, ce d'autant qu'avec son background de soldat, Eisenstein passe assez facilement pour un combattant expérimenté. Je demande un jet d'Esprit (volonté) à Mehdi, qui le réussit : il parvient à intimider Ratchev, qui tourne les talons et remonte le couloir vers l'autre wagon. Eisenstein lui emboîte le pas. Le PJ inefficace poursuit le zombie, c'est énorme ! Kosloff et Agnesini, eux, reviennent dans leur compartiment. S'agirait pas qu'ils crèvent de froid dans celui qui n'a plus de fenêtre.

Ratchev remonte le couloir, ouvre la porte du wagon, sort sur la plateforme et, pas le moins du monde gêné par le froid mordant, se met en embuscade. Il saute sur Eisenstein au moment où la porte de l'autre wagon s'ouvre sur un soldat ivre. Ça s'attrape, ça résiste, ça tire, le gros bordel. Au final, Eisenstein bascule dans le vide avec Ratchev. L'Allemand, à qui il ne reste plus qu'un point de Corps, meurt sur le coup. Le Russe, soutenu par l'énergie surnaturelle qui l'anime depuis tout à l'heure, se relève mais trop tard. Le train n'étant constitué que de trois wagons, il est déjà loin. Le zombie ne remontera pas dedans.

Tout le monde se retrouve dans le dernier wagon. Vassili et Ratchev ayant tous deux été éjectés du train, les soldats arrivent après la bataille et, dans l'état où ils sont, ne pigent pas trop ce qui se passe. Kosloff et Agnesini n'ont pas envie de se battre. Seul Brezinski, Personnalité brutale oblige, est en mode guerre. Il s'engueule avec Petrov, qui lui vomit dessus, et sur une impulsion, met une balle dans la tête du général. Le PJ n'a pas Tir mais je considère que comme sa cible est ivre morte, le tir est facile. À un moment, j'envisage de faire jouer le combat mais il est vraiment trop tard. J'ai encore la pèche et je sens que Stéphane est disposé à continuer, mais les autres joueurs sont cuits. Il faut dire aussi qu'il est 4h20 du matin et qu'on joue depuis six heures, douze si on compte le brainstorming. Ouais ouais, un tour complet de cadran.

Je conclus donc en narratif. Le train arrive à Moscou le lendemain. Kosloff et Agnesini sont pris en charge par les services secrets et débriefés à la manière russe, plutôt brutale. Kosloff est torturé jusqu'à ce que, pour la deuxième fois, il balance tous ses amis trotskistes. Il finit une balle dans la tête dans le sous-sol sordide d'un bâtiment administratif soviétique. Agnesini est déporté en Sibérie, où il passe près de quinze ans. Le Vatican obtient sa libération dans les années cinquante mais c'est un homme à jamais brisé qui revient à Rome. Brezinski est incorporé à l'Armée Rouge en tant que commissaire politique. Il meurt pendant la guerre, à Stalingrad. Le train n'a jamais existé, les zombies (dont on n'a retrouvé aucune trace) non plus.

Générique.



Le bilan

Une partie trèèès cool. J'ai bien kiffé le setting et l'ambiance, façon Partie de chasse à la Christin et Bilal. La phase roleplay fut carrément excellente. Ultra fun de jouer les metteurs en scène pendant que les joueurs discutaient le bout de gras. Je suis par contre un tantinet déçu par la fin, que je trouve un cran en dessous. C'était très correct mais ça manquait de un peu de oomph. Je n'ai pas réussi à tirer tout le parti possible de la phase négo pour potentialiser la séquence survival. L'articulation des deux ne fut pas idéale, j'aurais peut-être pu faire mieux. Je dis « peut-être » parce que le facteur fatigue a pas mal joué. Il était déjà deux heures du matin quand j'ai ressuscité Ratchev et personne autour de la table n'avait plus vraiment les yeux en face des trous. J'étais un poil plus frais que les joueurs, mais à peine.

Et je pense que le problème était antérieur au survival, c'est l'arrivée de Petrov que j'ai mal gérée. On sortait d'une grosse phase de roleplay, très immersive, et les joueurs en ont profité pour décompresser. Le roleplay, mine de rien, ça demande des efforts. Quand on a tourné la page négo, ils se sont naturellement relâchés, mais comme j'avais pris le parti d'enchaîner une série d'apartés, je n'étais pas là pour les recadrer. Du coup, il a fallu que je lutte sévère (contre la fatigue et contre le métajeu) pour les remettre dans la partie au début du combat. Alors que normalement, j'aurais dû pouvoir capitaliser sur l'immersion engendrée par la phase négo. Les apartés avaient produit une coupure trop importante. Transition loupée, quoi.

D'un autre côté, je n'arrive pas à regretter ces apartés car ils furent bien cool et plutôt variés. Du roleplay, de la négo encore, un petit combat, tout ça en quelques dizaines de minutes. Pas mal. Le truc, c'est que je me suis retrouvé un peu coincé, narrativement parlant. Soit je gérais en apartés pour maintenir la couverture de Brezinski, soit je révélais sa traîtrise, mais alors j'excluais de facto Stéphane de la partie. Il m'aurait été impossible de le garder à la table car il aurait rejoint les hommes de Petrov dans l'autre wagon. Au final, c'est David que j'ai sorti temporairement du jeu, mais comme son perso était mort et pas encore antago, il est resté avec nous, en spectateur. Je n'aurais pas pu le faire avec Stéphane.

Je gardais l'option Nikodemus dans un coin de ma tête (j'aurais pu filer le clebs d'Eisenstein à jouer à Stéphane) mais l'animal était enfermé dans le wagon salon, ce qui le neutralisait. Il aurait pu à la limite sortir de la réserve dans laquelle on l'avait installé, mais pas moyen pour lui de passer dans le wagon de queue, où s'est déroulé le combat. Ouvrir des portes de chemin de fer avec des pattes, moyen moins. Et je ne voyais pas les soldats le rendre à son propriétaire. Ils étaient cons mais pas au point de donner une arme vivante à un de leurs prisonniers. Au final, j'ai quand même refilé le bestiau à Mehdi en toute fin de partie, après qu'Eisenstein soit mort, mais il n'a rien pu en faire.

Pour ce qui est du combat en lui-même, j'ai plein de satisfactions techniques. D'abord, le calibrage des antagos surnaturels (Ratchev et Vassili) était pile poil. J'ai improvisé la règle de drain de chaleur et ça s'est révélé à la fois très fonctionnel et complètement adapté à la capacité de dommages des PJ (qui n'avaient pas d'armes). Nickel chrome. La gestion du bluff d'Eisenstein, qui menace de tirer alors qu'il ne possède pas Tir, m'a bien plu également. Bon, ça contredit un peu beaucoup l'un des fondamentaux du jeu, qui préconisent de gérer le social en roleplay pur (l'intimidation, c'est du social) mais pour le coup, ça s'est révélé très fonctionnel. Si c'était moi qui avais joué Ratchev, la gestion narrative n'aurait pas posé trop de problèmes. Mais dans cette situation de PvP, je me voyais mal imposer une fuite à David sur la seule base d'une déclaration de Mehdi (« Alors là, je le braque avec mon flingue »). Étant donné la situation de combat, le jet d'Esprit (volonté) était bien plus adapté.

Le vrai problème de cette dernière scène, c'était qu'elle a manqué d'enjeux. Le sort des PJ était entendu. Petrov contrôlait le train et il était clair pour tous les joueurs qu'ils n'avaient pas les moyens de renverser la vapeur. Du coup, le combat final était plus un baroud d'honneur qu'autre chose. Ses péripéties (la tentative de sortie, le coup du passage secret, le jeu des chaises musicales dans les compartiments, la résurrection surprise de Vassili, Eisenstein et son gros gun, etc) se sont avérées super sympa, mais il m'aurait fallu plus pour remettre les joueurs complètement dans la partie. J'aurais eu besoin d'une vraie phase de survie.

Même s'il n'a pas fait grand-chose d'autre que récupérer des armes, Stéphane était celui que j'ai senti le plus impliqué. Toutes considérations de fatigue mises à part, je pense que c'est en bonne partie parce son perso n'était pas un mort en sursis. Contrairement aux autres PJ, Brezinski avait une perspective d'avenir. Ça motive et ça implique. On n'a pas réellement eu le temps de débriefer après la partie car il était vraiment tard, mais je pense avoir trouvé la soluce dans la voiture qui me ramenait chez moi.

Pour bien faire, il aurait fallu que je renouvelle le cast en ouverture de la dernière scène. Je suis plutôt très satisfait de la manière ont j'ai amené les deux groupes d'antagos commandés par les joueurs durant le briefing, ce qui n'était pas si simple dans un setting ferroviaire. Les hommes de Petrov à la gare puis la résurrection de Ratchev, y'a une certaine élégance narrative dans l'affaire. Par contre, je me suis retrouvé avec pas mal d'antagos à dispo, beaucoup trop par rapport aux capacités des PJ, ce qui m'a conduit à neutraliser les Russes (tous bourrés à la fin de la partie). Et là pour le coup, c'est moyennement élégant.

Avec le recul, ce que j'aurais peut-être dû faire, c'est : Petrov débarque dans le train mais je ne fais pas d'apartés, il interroge tout le monde en même temps dans le wagon restaurant et, bien sûr, révèle la traîtrise de Brezinski, qui passe alors du côté des antagos. Petrov abat Ratchev, torture Kosloff et Vassili, puis séquestre les PJ survivants (sauf Brezinski) dans leurs compartiments. Et là, je file de nouveaux persos à quasi tout le monde : les joueurs jouent les soldats russes (Petrov, son aide de camp, Andrei, etc), sauf Stéphane qui continue à incarner Brezinski et peut-être Mehdi, à qui je file son clebs. Dans les compartiments, Ratchev et Vassili ressuscitent, tuent Agnesini, Eisenstein, Kosloff, le personnel du train (consigné lui aussi dans son compartiment) et le soldat de garde. Tout ce beau monde se transforme en zombie et déferle dans le wagon salon. Grôôôsse baston.

La coupure avec la phase négo aurait été bien plus nette du fait de l'abandon de la quasi-totalité du cast d'origine (qui impliquait une nouvelle créa collective) mais l'implication des joueurs se serait peut-être révélée meilleure. Les soldats auraient clairement eu plus à perdre dans cette situation que les PJ d'origine dans la partie telle qu'on l'a jouée. Ce renversement antagos/PJ, au demeurant assez audacieux, aurait pu être très fun mais il est suffisamment atypique pour que, fatigue aidant, je n'aie pas percuté.

En fait, il m'aurait fallu Sombre max. Si je l'avais eu à dispo, je pense que j'aurais plus facilement tilté. Parce que j'aurais bien refilé des soldats un poil boostés aux joueurs, histoire de les aligner sur Nikodemus (géré avec une carte de PNJ). Brezinski aurait été défavorisé mais pas tant que ça vu qu'il termine la partie à Corps 11 avec tous ses cercles d'adré non cochés. Il avait donc largement de quoi tenir la distance durant le combat.

Enfin bon, avec des si, on mettrait Paris en bouteille. Je ne vais pas refaire la partie, ce d'autant qu'en l'état, elle a eu bien de la gueule. Par contre, c'est une motivation supplémentaire à avancer sur Sombre max. Parce ce que si j'ai bien retenu un truc de Voir Venise et pourrir, c'est que l'enchaînement Sombre classic puis max est très fonctionnel. Quand j'aurais l'outil à dispo, je sens que je vais m'en servir assez souvent.



*



Et un peu de promo pour la route.

Sombre - Page 2 Sombre_commande_zps64c69fc1


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Sombre, plus t'en prends, moins j'en ai.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyDim 4 Nov - 1:19

From Russia with Blood – Les 24h du jeu – octobre 2012



La Bretagne, ça vous gâââgne. L'année dernière, j'avais, à l'invitation de Pika, participé aux 24h du jeu, un festival ludique multidisciplinaire (tradi, société, platal, vidéo, figs, GN, jdr et j'en oublie) ma foi fort sympathique. Ça se déroule à Theix, tout près de Vannes, dans le gymnase communal. L'année dernière, j'étais malade comme un chien et n'avais pu assurer que des démos courtes. Cette année, je n'ai pas la crève mais suis fatigué de chez fatigué. Septembre et octobre ont été plus que sportifs et je commence sérieusement à accuser le coup. Pitin, le jdr c'est vraiment un truc de jeune.

Donc j'ai pas la top forme et, coup de pas de bol, on est en pleine vague de froid. Je m'overcaille dans ce gymnase ouvert aux quatre vents. Derrière le stand Terres Etranges, où Pika et moi présentons nos productions, je suis en mode Nanouk l'esquimau. C'est pas dur, j'ai pas lâché mon manteau du week-end. Fort heureusement, le Breton est construit pour les conditions météo extrêmes. Qui plus est, il est joueur. Du coup, y'a des gens. Le public est super sympa, plutôt jeune et très familial. Excellente ambiance.

Question orga, c'est carré. Tino, Maud et les autres bénévoles assurent bien comme il faut. Accueillants, disponibles, efficaces. Le pôle jeu de rôle manque par contre un poil de oomph. Les rôlistes vannetais sont ultra sympas mais ils n'encadrent pas des masses leur activité. Y'a un créneau nocturne avec préinscriptions mais c'est un peu tout. Pas de bourse aux scénars, pas de créneaux formels en journée, pas de retape autour de leur stand. Donc forcément, les joueurs ne se bousculent pas.

Ah bin oui, les gens s'assoient facilement d'eux-mêmes à une table de jeu de société (j'ai vu quatre gars choper une boîte de Zombicide sur un coin de stand, déballer le jeu, faire une partie, remballer le jeu puis reposer la boîte sur le stand, tous seuls comme des grands sans que personne ne leur dise rien) mais pour les amener au jdr, faut les prendre un minimum par la main. Bon sang, Opale, son véléda magique, son sergent recruteur et ses d20 gonflables m'ont grave manqué ! Surtout le dimanche en fait, parce que le samedi, je m'économise. Cette année, je veux mener en nocturne donc vu mon état de fatigue, j'y vais molo en aprème.

Tandis que Pika mène court, moi je me contente d'un petit Sombre zéro des familles, juste histoire de me mettre en jambes et voir un peu si j'ai les ressources pour tenir toute la nuit. Côté joueurs, il y a Stefff56, un forumiste vannetais qui s'intéresse depuis pas mal de temps à mes comptes rendus, plus Tristan, un jeune gars que j'avais eu à ma table l'année dernière pour un White trash, et ses deux potes, Victor et Gurvan. Partie super sympa, les PJ se font poutrer sévère, c'est fun et jeune. En sortant, je décide que oui, je mènerai en nuit. Je ne me suis pas tapté trois heures de TGV pour mener un quart d'heure !

Je remplis ma table en trois minutes. D'abord Rémi et Valentin, puis Tristan et Gurvan, qui reviennent parce qu'ils veulent du rab. Quatre joueurs, pas plus car je ne suis en petite forme. Tandis que Stef fignole son scénar Sombre (ce garçon est extraordinaire : il m'achète le jeu en aprème et le voilà qui lance sa première partie en soirée, un western horrifique avec twist narratif incorporé), je cherche un local isolé et chauffé. Pas question que je continue à me les cailler comme un taré pendant toute la nuit. Pika, qui est malin, s'est installé sous l'une des grosses souffleries qui chauffent (un peu) le gymnase. Moi, je migre vers le hall d'entrée, lui aussi chauffé. Mais qui communique directement avec l'extérieur (les portes vitrées, même fermées, ça caille) et qui pourrait s'avérer assez passant, vu qu'il donne également sur la salle des jeux vidéo. On se replie donc dans les vestiaires (et ouais, c'est un gymnase), où on installe une table entre deux bancs en bois. Nickel.



Le brainstorming

22h10, j'ai terminé l'explication des règles et on commence à cogiter. Comme il est déjà tard, j'oriente la tempête de cerveau vers un format court. On va éviter la prise de tête roleplay, un pur survival me semble plus indiqué. On me dit que ça se passera à l'époque contemporaine ou presque : dans les années 70 en Russie, pardon en URSS puisque le Mur n'est pas encore tombé. Et ça va être un scénario d'exfiltration : le PJ sont entrés quelque part, se sont enfoncés loin dans ce quelque part et ils doivent en ressortir. Putain, je kiffe ! J'ai déjà eu des quickshots entrée puis sortie, mais jamais de sortie seule. Ça s'annonce bien.

Le setting est un laboratoire pharmaceutique, dont une partie des activités, couverte par le KGB, est franchement illégale. Expériences médicales et autres joyeusetés. Pour ce qui est du plan, je le limite à trois niveaux pour ne pas qu'on se retrouve à finir à l'aube. Je ne sais pas quelle est sa formation, mais je soupçonne Valentin d'être graphiste. À la manière dont il tient son crayon et dont il se lance dans le tracé du plan du NIP, le Nouvel Institut Pharmaceutique. Niveau 0 : hall d'accueil, bureaux, vestiaires. Niveau - 1 : salle d'autopsie, incinérateur et jungle artificielle. Niveau - 2 : seulement accessible par une entrée dérobée dans un coin de la jungle car secret, bloc chirurgical et zone de détention des cobayes humains. Clâââsse.

+ Rémi joue Olaf Dubov, espion excentrique devenu cobaye. Agent double, il travaillait en secret pour les Américains mais le KGB l'a grillé. Officiellement, il a été emprisonné, interrogé puis exécuté. En réalité, on l'a torturé, on a fait croire à sa mort et on l'a envoyé finir ses jours au NIP pour qu'il serve de cobaye. Résultat, il est Invalide et a subit des Préquelles. Mais bon, chez lui, l'érosion de l'Esprit n'est pas aussi problématique que chez d'autres puisqu'il dispose du nouvel Avantage Folie douce. Son objectif est de détruire le NIP. Il veut tout casser !

+ Valentin joue Eva Yousgourine, espionne nerveuse et Dévouée à Olaf, dont elle est amoureuse. C'est son ancien partenaire et elle a remué ciel et terre pour le retrouver, allant jusqu'à se laisser enfermer de nuit dans le NIP. L'exfiltration, c'est son idée à elle.

+ Tristan joue Nikolaï Rogovich, médecin méthodique, responsable des expériences qui ont été menées sur Olaf mais également Infecté. Je prends Tristan à part pour qu'on cause un peu de cette infection : il s'agit d'une sorte de gangrène purulente, auquel Nikolaï ne trouve pas de remède. Tout son corps est contaminé, il n'y a que ses mains et son visage qui sont pour le moment épargnés. Il cache sa maladie sous des bandages, invisibles sous ses vêtements. Sachant que la médecine russe ne peut rien pour lui, il veut passer à l'Ouest. Son billet pour les États-Unis, c'est Eva, qui peut facilement contacter les Américains.

+ Gurvan joue Vassili Movichi, gardien rusé qui arrondit ses fins de mois en faisant du trafic d'échantillons biologiques. Ils prélève des bouts de peau, de chair et d'organes sur les cadavres qu'il a pour mission d'incinérer et les revend à de mystérieux acheteurs. Le problème, c'est que Nikolaï est au courant : il l'a suivi et a pris des photos qui prouvent son trafic. Ah bin oui, tout Rusé qu'il soit, Gurvan n'en est pas moins Écervelé. Heureusement pour lui, il a un Chien fidèle, Charlie... dont je donne la carte de PNJ à jouer à Victor, qui nous a rejoint dans l'entrefaite. Je ne me voyais pas rajouter un PJ à ce stade du brainstorming, ce d'autant que je voulais m'en tenir à quatre. D'un autre côté, le laisser spectateur durant toute la partie, je le sentais moyen. Le clebs est donc parfait.



La partie

Après une petite pause, on s'y met. Il est 1h. Je me dope au sucre et au Red Bull, puis pose la situation de départ : Eva s'est donc laissée enfermer dans le labo. En progressant vers les geôles, elle a croisé Nikolaï. Le médecin était resté après la fermeture pour disséquer tranquillement un bras. Elle le braque avec son couteau, ils discutent et finissent par s'entendre. Elle veut faire évader Olaf, il peut l'aider car il possède des documents compromettants sur son gardien. Il cherche un contact chez les Américains, elle sait comment les joindre. Deal.

Ils descendent au niveau - 2, où Vassili est de garde. D'un côté, une salle opératoire dernier cri avec son vestiaire chirurgical et sa propre pharmacie. De l'autre, une sorte de caverne rocheuse partiellement excavée, dans laquelle se trouvent le bureau du gardien et les six puits de détention. J'ai ajouté ces puits au plan tracé par Valentin parce que ce petit cliché gothico-lovecraftien (aaah, L'affaire Charles Dexter Ward) m'a semblé plutôt dans le ton de ce niveau - 2. Il me permet en tout cas de bien exprimer le calvaire d'Olaf. C'est visuel. En fait, ça marche si bien que je m'en resservirai plus tard pour boucler la partie.

On joue donc la scène de rencontre, mais je préviens tout le monde qu'à la fin, le groupe doit être constitué. Les PJ ne seront pas les meilleurs amis du monde, c'est entendu, mais pas question qu'ils s'entretuent dans ce sous-sol humide. Hé, on a un plan en trois étages à valoriser ! Nikolaï montre ses photos à Vassili, qui réalise que le médecin le tient par les couilles. Vu ce qu'il a fait et ce qu'il sait, pas moyen que le KGB le laisse s'en sortir vivant. S'il se fait choper, il finira dans l'un de ses puits. Sa seule chance, s'allier aux autres en attendant de pouvoir récupérer ces putain de photos.

On tire Olaf de son puits, un cul-de-basse-fosse insalubre au possible (30 cm d'eau glaciale et stagnante au fond, pas de lumière, impossible de s'y allonger). Il refuse de sortir sans son compagnon d'infortune, Andrei, un clochard ramassé ivre mort dans une rue de Moscou (avec les prisons, c'est l'autre source d'approvisionnement du KGB en cobayes). Olaf commence à tout casser du côté du bureau de Vassili, Nikolaï loote la pharmacie, Andrei convulse. Eva contraint le médecin à soigner le clochard, qui agrippe Nikolaï par sa blouse et lui vomit un sang noir, épais et malodorant au visage. Puis il meurt. À un moment, je me disais que je me le garderais bien sous le coude, en PJ de rechange. Finalement, j'ai décidé de m'en passer. Faut savoir vivre dangereusement.

Les PJ évacuent le sous-sous-sol par l'escalier, déboulent au sous-sol, en pleine jungle artificielle. Et y'a un gros souci : toutes les lumières sont éteintes. Même les veilleuses, censées signaler les sentiers en cas de coupure de courant sont out. Heureusement, les personnages ont des torches électriques. Les chemins forment une boucle autour d'un bassin en béton imitation mare. Olav et Eva, bientôt suivis de Nikolaï, vont au plus court, vers la gauche, et se font attaquer par un groupe de singes. C'est pour eux que la jungle a été construite et, durant le briefing, on me les a présentés comme des antagos potentiels. J'en profite pour leur coller des yeux rouges, ça ne mange pas de pain.

Eva, Olaf et Nikolaï luttent pour atteindre la porte de sortie de la jungle. Nikolaï surtout, qui arrive un peu après les deux autres et doit se frayer un chemin à travers les animaux. Entendant ça, Charlie prend le sentier de droite, a priori moins encombré. Vassili le suit. Après une séance de cache-cache dans les fourrés, ils se décident finalement à essayer, eux aussi, de sortir. Mais c'est un poil tard, Olaf et Eva sont déjà sortis. Ils se trouvent dans un petit hall qui mène au sas principal. Le sas en question donne sur un deuxième hall, qu'il faut traverser pour atteindre les portes de l'ascenseur et de l'escalier. Un passe spécial (une carte perforée) ouvre le sas et il n'y a que deux personnes qui en disposent, Vassili et Nikolaï.

Olaf ne peut donc pas ouvrir le sas. En plein speed, il oblique (au hasard) vers la droite, entre dans un bureau, franchit un deuxième sas, plus petit celui-là, et déboule dans la salle d'autopsie. Assailli de flashbacks, des images violentes des tortures médicales qu'on lui a fait subir, il passe en phase 3 de sa Personnalité excentrique : Mystique. Ah bon sang, c'est du nanan. Devant lui, sur la table d'autopsie, le bras que Nikolaï était en train de découper avant qu'il ne soit interrompu par Eva. Olaf le voit bouger, les doigts tapotent sur le plateau métallique. Serait-ce un code ? Est-ce que le membre cherche à lui dire quelque chos ? Et soudain, il comprend : c'est son bras ! Il saisit un scalpel sur une table roulante et commence à s'entailler l'épaule pour amputer le membre parasite qu'on lui a greffé et le remplacer par celui d'origine. Dysmorphophobie + auto-chirurgie, j'adôôôre. Il s'inflige une Blessure avant qu'Eva, qui l'a suivi, ne parvienne à l'arrêter.

Du côté de la jungle, c'est la Bérézina. Pour contenir les singes, Nikolaï a verrouillé la porte de sortie, alors que Vassili et Charlie sont toujours de l'autre côté. Et ils en chient. Vassili rame comme un taré pour progresser jusqu'à la porte, glisse son propre passe dans la serrure mécanographique, mais la porte est bloquée. Endommagée par les coups répétés des singes, elle ne s'ouvre pas. Il se résout à l'enfoncer mais foire son jet de Corps : sa jambe traverse la paroi de verre et reste coincée dedans. Il n'est sauvé que par la pression des singes, qui finissent par enfoncer le battant. Lorsque Vassili et Charlie s'effondrent dans le premier hall, ils sont en sang, lacérés par les doigts griffus des primates. Le gardien pisse le sang par la jambe, le chien est littéralement pelé.

Nikolaï, qui s'est enfermé dans le sas, ne va guère mieux. Les singes lui ont arraché ses vêtements et ses bandages, révélant la gangrène qui le ronge. D'ailleurs, il se déshabille entièrement. L'état de son corps est absolument ignoble. Son scalpel à la main, il envisage un moment de se la jouer solo, avant de réaliser qu'il a besoin d'Eva pour passer à l'Ouest. La seule bonne nouvelle, c'est que les singes s'égayent dans tout le niveau et ne s'occupent plus trop des PJ. Ils foutent le gros dawa un peu partout, ce qui remplit Olav d'aise. Tout le monde en profite pour se ruer vers le rez-de-chaussée.

Vassili et Charlie prennent l'ascenseur, les trois autres l'escalier. Pour tous, l'objectif est le même : remonter le couloir en moquette moche vers le hall d'accueil, franchir le comptoir des hôtesses et se précipiter vers la sortie du bâtiment. Aussitôt dit, aussitôt fait. Y'a juste un souci : une patrouille de trois spetsnaz est arrivée sur les lieux et, voyant débarquer une bande d'énergumènes ensanglantés, putréfiée et armés, tire sans sommation. Eva se prend une balle en plein visage, qui lui traverse les deux joues, lui fracture la mâchoire et lui détruit l'oreille. Elle s'écroule derrière le comptoir. Olaf, devenu fou mais qui, grâce à Folie douce, reste PJ, passe en mode berserk. Il enjambe le comptoir en hurlant et en brandissant son bras coupé (qu'il n'a pas lâché depuis la salle d'autopsie) comme une massue. Une rafale le coupe en deux. Les AK-47, ça fait mal.

Charlie se replie vers le bureau du directeur du labo, suivi de Vassili. Quand le chien a de bonnes idées, le maître suit. Problème 1 : le bureau n'a qu'une porte. Qu'à cela ne tienne, Vassili fracasse une fenêtre. Problème 2 : les fenêtres sont munies de grilles solides (on en avait parlé lorsqu'on avait dessiné le plan). Impossible de passer par là. Or il y a urgence, un spetsnaz vient d'entrer dans le bureau et braque Vassili ! Charlie grimpe sur le rebord de la fenêtre et se contorsionne pour passer entre les barreaux. Il réussit son jet, prend une Blessure et s'enfuit dans la nuit. Vassili pense se rendre mais j'active son Écervelé et le lui interdit. Il fait mine de sortir un cigare (avec l'argent qu'il gagne au marché noir, il se paie des havanes) de la poche intérieure de sa veste, dans l'espoir de corrompre le spetsnaz. Ce dernier interprête mal son geste, il tire, touche et tue. Vassili s'écroule.

Reste Nikolaï, qui a appliqué le plan d'Olaf mais avec plus de réussite. Son scalpel à la main, il fonce sur le spetsnaz qui lui barre la route (le troisième est à ce moment en train de s'occuper d'Eva), passe entre les balles (je rate cinq jets de suite avec mon PNJ 13), plante le soldat, franchit la double porte du hall et parvient lui aussi à s'enfuir.

Générique.

Et stinger : au fond d'un puits obscur, les pieds dans l'eau, la tête entourée de bandages et le visage recousu à gros points, Eva attend et espère la mort.



Le bilan

Une *très* bonne partie. Ce n'est pas le quickshot le plus original ni le plus élaboré que j'aie improvisé, mais c'est à mon avis le meilleur de ce que j'étais capable de produire cette nuit-là : un survival dynamique, efficace et fun. Une sorte de PMT horrifique avec un bon crescendo (Andrei > singes > spetsnaz) et des scènes d'anthologie (Olaf et son bras, quand même, ce fut fort). C'est d'autant plus satisfaisant que les conditions n'étaient pas idéales.

D'une, j'étais vraiment crevé. Mais le Red Bull (première fois que j'en buvais, ce truc est dégueulasse au possible mais il dope bien) et l'excitation du jeu ont fait des merveilles. Clair que je n'avais pas mon répondant des grands jours, mais je m'en suis tout de même très correctement tiré. Ouf !

De deux, la composition de la table était très hétérogène. Y'avait deux groupes bien distincts. D'un côté, les trois jeunes (Tristan, Gurvan et Victor), qui jouaient comme on joue quand on est ado et qu'on débute, sans se prendre la tête. De l'autre, Rémi et Valentin, plus âgés, plus posés, plus expérimentés, plus roleplay, mais aussi, et c'est ce qui a fait que la mayonnaise a bien pris, très ouverts et narrativement très généreux. Une vraie bonne positive attitude, super appréciable en convention et sur laquelle j'ai pu appuyer ma maîtrise. Du coup, la partie a oscillé en permanence entre le délire plus ou moins contrôlé (Vassili et ses aventures dans la jungle) et les morceaux de bravoure RP (Olaf qui se charcute le bras, Eva qui l'en empêche). Au final, le groupe, tiraillé entre coopération et compétition, entre PvE et PvP, a fonctionné du tonnerre. Nickel, vraiment.

Enfin, cette partie est vraiment la démonstration de ce que j'écrivais dans Sombre 2, à savoir que quand on joue à Sombre, on n'a pas besoin d'une super bonne histoire pour passer un super bon moment. Pendant plus de 2h30, on a accumulé les incohérences et les questions sans réponses (Pourquoi Andrei vomit-il du sang ? Pourquoi la lumière est-elle éteinte dans la jungle ? Pourquoi les singes sont-ils devenus fous ? Comment se fait-il qu'Eva ait pu descendre jusqu'au niveau - 2 si elle ne dispose pas du passe spécial pour ouvrir le sas ?) mais ça ne nous a dérangé à aucun moment car y'avait de la tension, du ryhme, de l'émotion. On était bien dans le move et c'était übercool.



*



Des news :

+ Sombre dispose désormais de sa propre rubrique sur le Sden, animée par l'excellent Gap. On peut d'ores et déjà y lire tout plein d'articles passionnants, dont un collector de 2003, qui fut en fait le tout premier papier écrit sur Sombre. Inutile de dire qu'à l'époque, le jeu était encore loin d'être ce qu'il est devenu aujourd'hui. Super sympa de pouvoir mesurer le chemin parcouru.

+ La fiche de Sombre 2 est disponible sur le Grog. Merci monsieur Charcuto !



*



Et un peu de promo :

Sombre - Page 2 Sombre_commande_zps64c69fc1


Sombre 1 et Sombre 2, les deux premiers numéros de la revue consacrée à Sombre, sont disponibles. 72 pages au format A5 et à pas cher (prix libre, minimum 7 euros par numéro + port). Pour commander, c'est par ici.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyMar 13 Nov - 21:49

Les Joutes du Téméraire – novembre 2012 – Nancy



Putain de conv de ouf malade !

Levé avant le soleil pour choper un train zaux zaurores à Gare de l'Est, je débarque à Nancy vers 10 heures. Quand j'arrive à la conv, le stand Opale est déjà opérationnel. C'est la première fois que je viens aux Joutes. L'événement se déroule dans un bâtiment de l'Université des Sciences. Y'a un rez-de-chaussée, où son concentrés l'accueil, la buvette et divers stands marchands, et un étage, où qu'on peut jouer à un peu tout (platal, Magic, jeux vidéo et bien sûr, jdr). Le stand Opale est idéalement placé, en haut de la rampe qui mène à l'étage.

Moi, je suis là pour faire de l'initiation. Mes parties, comme toutes celles proposées par Opale, avec qui je collabore (hé, on ne change pas une équipe qui gagne), sont gratuites. Ce sont les parties longues et les tournois qui sont payants. Et justement, à peine installé que déjà j'ai cinq joueurs. Les conditions de jeu sont bonnes en ce début de conv : pas trop de monde donc pas trop de brouhaha, et pas encore d'animations musicales (ça déboulera plus tard, en aprème). Et puis, je suis frais et les joueurs aussi. Résultat, une super partie, très cinématographique et vraiment bien rythmée. On finit en TPK mais les joueurs applaudissent. Ça fait plaisir.

J'enchaîne trois autres White trash dans la journée et termine par un Sombre zéro. Je pense que j'aurais eu la pèche pour un cinquième Sombre classic, ce qui aurait constitué pour moi une sorte de record assez hallucinant, mais il est tard et les joueurs sont pressés. Ensuite, les parties nocturnes se mettent en place, avec un event organisé par Mando : une nuit survivor, sponsorisée par Terres Etranges. Les survivants des parties nocturnes sont téléportés en fin de nuit dans une arène Sombre pour s'entretuer jusqu'au dernier. Le dernier survivant, une cheerleader, gagne un Sombre 2. À côté de ça, Krom enchaîne deux parties de Sombre dans un coin, hum, sombre. Globo mène également du Sombre, une première pour lui. Il récupère Les chasses du comte Lassary, un scénar Malef qu'il bidouille à la sauce Sombre. Visiblement, ça prend bien. Moi pendant ce temps, je dors.

Le lendemain matin, retour à la conv. Ma première partie est un cran en dessous de celles de la veille car, en dépit d'une nuit très correcte, j'accuse la fatigue. Je me dope au soda et aux oursons gélifiés (pitin, ct'une drogue ces machins) puis repart pour une deuxième partie nettement meilleure. En toute fin de conv, alors que plus personne ne mène (les meneurs de la nuit sont épuisés, c'est zombieland derrière le stand Opale), j'enquille deux Sombre zéro d'affilée puis remballe. Le temps de serrer quelques pognes et de claquer quelques bises, et me voilà reparti vers mon train. J'arrive à Paris en mode mort-vivant mais super content de mon geek-end (comme dirait Globo). Ce fut juste énorme !

Orga carrée, bénévoles disponibles et accueillants, public nombreux, les Joutes c'est bon, mangez-en. Ce n'était pas le rush de Cidre & Dragon, où les gens attendaient à côté de ma table pour la partie suivante, mais y'avait un bon flux. Je ne suis jamais resté plus de vingt minutes sans mener.

Spéciale dédicace à Mario, un orga comme on aimerait en avoir à chaque conv, et aux gens d'Opale, qui roxxent toujours autant du poney moldave. En particulier, merci à Chr, Marcus et Emilie, qui m'ont rempli ma table. Merci à Globo, Krom et Mando, qui ont mené du Sombre. Ça me fait toujours autant kiffer de voir mon jeu tourner à d'autres tables que la mienne. Merci encore à Mando, qui s'est accrochée à son idée de nuit du survival, un event pile poil taillé pour Sombre.



*



Ils l'ont dit, l'ont presque dit ou auraient pu le dire, mais pour respecter leur anonymat, je ne citerai que leurs prénoms :

+ Xavier : la narration partagée, ça me fait des choses bizarres dans le dedans de mon moi-même.

+ Emilie : Dark Heresy, fastoche que je le lis sans les mains, et même sans les yeux.

+ Ghislain : j'aime lire des jeux narrativistes, mais pour ce qui est de jouer, je préfère le tambourin. Au moins, je sais comment ça fonctionne.

+ Renaud : mes parties courtes, je préfère quand elles durent onze heures. Là, t'as bien le temps d'expliquer les règles.

+ Benjamin : quand vous me voyez avec ma mallette et ma casquette FBI, appelez-moi Grissom siouplait.

+ Lionel : mes aides de jeu, c'est des capotes. Après ça, on pourra pas dire que le jdr, c'est un truc de puceau.

+ Vincent : quand j'étais jeune, mon cocktail de conv, c'était café + Guronsan + Coca, mais j'ai arrêté. Maintenant, je fais café + Guronsan + Red Bull, c'est bien mieux.

+ Delphine : y'a pas photo, mon actrice préférée dans Star Trek classic, c'est Sasha Grey.

+ Christian : j'attends une promo pour des strings Opale, faut sauter dessus parce que t'as que 72 heures pour envoyer le modèle.

+ Fabien : le jdr traditionnel, faudrait l'interdire. Et comme ça, on pourrait écrire un jdr indie où on jouerait des rebelles réactionnaires en lutte contre l'anticonformisme.



*



Pour finir, mon bilan perso :

Sombre classic - White trash :
+ Partie 1 : cinq joueurs, zéro survivant.
+ Partie 2 : cinq joueurs, zéro survivant.
+ Partie 3 : cinq joueurs, zéro survivant.
+ Partie 4 : cinq joueurs, un survivant.
+ Partie 5 : cinq joueurs, un survivant.
+ Partie 6 : cinq joueurs, un survivant.

Sombre zéro - Overlord :
+ Partie 1 : six joueurs, deux survivants.
+ Partie 2 : cinq joueurs, zéro survivant.
+ Partie 3 : cinq joueurs, zéro survivant.

Au total : 9 parties, 46 joueurs, 41 morts.


Ah, et je viens de faire le cacul : j'ai désormais 65 parties de White trash au compteur. On me l'aurait dit en février 2011, lors du crash-test de ce scénario, je ne l'aurais pas cru.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptySam 24 Nov - 13:49

House of the rising dead II : Dead of night – en ludothèque à Saint-Denis – novembre 2012



Il fait froid, il pleut, et voilà t'y pas que je débarque à Saint-Denis pour poser du jeu à la ludothèque où bosse Crapaud-à-plumes. Ct'un projet qui remonte à loin, on a calé ça il y a plusieurs mois. Ma mission : faire jouer quatre gamins de 7 à 10 ans à Sombre zéro (la variante que j'ai publiée dans Sombre 2) pendant un peu plus d'une heure. C'est dans mes cordes. Crapaud les ayant initiés, ils connaissent déjà le jeu de rôle. Cool.

Après un rapide tour du propriétaire, on s'intéresse à l'espace de jeu. Y'a moyen de jouer par terre, sur des coussins, dans une petite pièce un peu à part, comme le fait habituellement Crapaud. Mais je dis non. Moi, il me faut une table et des chaises. Je suis un garçon old school qui, même avec des gamins, fait du jdr à l'ancienne : plan, crayon, gomme, feuilles de perso, dé. By the book, je vous dis.

Hop, hop, micro-déménagement et voilà que j'ai ma chtite table et mes cinq chaises. J'ai en effet annonca que je prendrai quatre joueurs, plus serait déraisonnable étant donné qu'on va jouer dans le bruit, que les gamins ne me connaissent pas et que je n'ai qu'une heure devant moi pour boucler le brainstorming et la partie. Parce que oui, c'est un quickshot. Même pas peur, même pas mal.

Crapaud m'explique le principe de base de sa ludo : ici, c'est jeu libre. Tu joues à ce que tu veux aussi longtemps que tu veux et quand tu veux plus, juste t'arrête. Ça veut dire que les joueurs peuvent se barrer de la table exactement quand ils le veulent et que je ne peux rien dire. Okaaaay, y'a du challenge.

Crapaud a mis en place un système de préinscriptions qui me chagrine un peu parce que, par un malheureux concours de circonstances, il exclut Francesca, une gamine qui accroche grave au concept de Sombre. Des films d'horreur, elle en a vu et elle aime ça, mais je ne peux pas l'accueillir à ma table en tant que joueuse, les quatre places sont réservées à d'autres. Elle sera donc spectatrice. J'aurais préféré qu'elle puisse jouer, l'enthousiasme est une vertu cardinale en jdr. En tout cas, c'est un truc qu'en tant que meneur, j'adore voir chez mes joueurs, quel que soit leur âge.



Le brainstorming

Et en fait, c'est Francesca qui trouve le sous-genre de la partie : une histoire de maison hantée. Elle la ramène pas mal durant le brainstorming mais je la laisse faire car sa culture de genre m'est bien utile pour mettre mes quatre joueuses dans le bon trip. Quand il s'agit de recadrer, c'est toujours plus efficace lorsque c'est un pair (en l'occurrence, un autre enfant) qui s'en charge. Moi, je me contente de signaler que jouer des vampires, des fantômes ou des zombies, ce n'est pas ce qu'on fait à Sombre. Ça, ce sont des rôles de méchants.

Le groupe sera donc composé de quatre sœurs, de 19, 18, 17 et 16 ans. Comme me fait remarquer l'une de mes joueuses, leur mère n'a pas chômé. Elle est morte, malheureusement. D'un accident de voiture, avec son mari. Les PJ sont donc orphelines. Il y a Tiffany, Océane (le prénom d'une animatrice), Sabrina et... la quatrième joueuse sèche grave. À vue de pif, je propose Jennifer. Ça plait. Jennifer donc. Les PJ les plus âgées, Jennifer et Océane, travaillent. Les joueuses veulent de bons métiers, qui gagnent bien : vendeuse en boulangerie et coiffeuse. Je valide bien sûr. Les plus jeunes, Tiffany et Sabrina, sont lycéennes.

Avec le peu d'argent qu'elles ont hérité de leurs parents, elles viennent d'acheter une vieille baraque pour y vivre à quatre (actuellement, certaines sont hébergées chez des amis, d'autres sont en foyer. Ça craint). Y'a pas mal de travaux à faire dans la maison, donc elles ont décidé d'y passer tout un week-end pour commencer à la nettoyer. Ça c'est moi qui l'annonce, histoire de poser un peu mon amorce. Il serait temps, tout de même.

Je trace un plan. En quickshot avec des enfants, je ne leur demande pas de le faire, c'est moi qui m'en charge (avec des adultes par contre, c'est à eux de bosser). Le plus souvent, j'improvise le plan à mesure que je mène mais là, c'est inapproprié car il ne s'agit pas d'un scénar d'exploration. La maison est bien connue des PJ, on ne va pas faire un PMT. Du coup, je me colle au plan avant le jeu. Et c'est top fastoche, je dessine de mémoire celui de House of the rising dead. Un rez-de-chaussée, un étage, nickel pour une partie courte.



La partie

Je demande aux filles comment elles s'organisent pour le ménage. Qui fait quoi où et quand ? Entrée en matière standard. Et pour le repas du soir, comment ça marche ? Elles hésitent : Quick halal ou kebab ? Kebab. Arrive la nuit et là, c'est moi qui explique qu'elles ont prévu de dormir dans une chambre, chacune dans son sac de couchage. Camping dans la maison déserte, pile poil film d'horreur. Francesca sent qu'il faut que ça démarre, et je suis bien d'accord. « Y'a pas encore de suspense ? », me demande-t-elle.

Je lui réponds que ça va bientôt arriver et lance le truc : en pleine nuit, les PJ sont réveillés par des bruits de pas lourds dans l'escalier. Y aurait-il quelqu'un dans la maison ? Tiffany ouvre la porte de la chambre pour en avoir le cœur net : personne dans l'escalier. Mais est-ce que la porte d'entrée est bien fermée ? Il faudrait que quelqu'un se dévoue pour aller vérifier, on ne peut pas laisser la maison ouverte durant la nuit. L'union fait la force : Jennifer, Océane et Sabrina descendent pour voir ce qu'il en est. Tiffany reste dans la chambre, elle consulte Facebook sur son téléphone portable. Ah mon Dieu, faut pas me faire des ouvertures narratives comme ça ! :-)

Je gère en simultané, mais sans aparté évidemment. On n'a pas le temps et ça ne fonctionne de toute façon pas super bien avec les gamins. Exclus de la table, ils décrochent de suite. Au rez-de-chaussée, la porte d'entrée est bien fermée. Mais il commence à faire super froid dans le couloir, tellement que les filles voient leur haleine qui dessine des panaches de vapeur dans l'air nocturne. Et pour ne rien arranger, il fait aussi de plus en plus sombre. Malgré la lampe de camping, on n'y voit plus grand-chose, comme si les ténèbres étaient vivantes. À l'autre bout du couloir, un homme à la silhouette indistincte se tient debout dans le noir. Il a la respiration sifflante et ses yeux rouges luisent dans l'obscurité. Panique à bord.

À l'étage, ça ne va pas mieux. Je m'approche de la joueuse qui incarne Tiffany et lui glisse à l'oreille qu'elle vient de recevoir un message sur Facebook : « Vous allez toutes mourir ». Re-panique. Tiffany passe dans la pièce adjacente à la chambre pour s'équiper (c'est là que se trouve le matos de nettoyage) mais y'a plein de petits bruits bizarres dans l'obscurité. Des grattements. Elle rallume son portable pour éclairer et constate que la pièce est envahie de dizaines, de centaines, de milliers, que dis-je de millions, de cafards. Des gros cafards blanchâtres bien dégueu qui grouillent sur les murs et le sol. Y'en a partout.

Au passage, ce n'est pas mon idée : je l'ai piquée à la joueuse qui joue Océane, la plus jeune de groupe. Pendant qu'on parlait de nettoyer la maison, elle m'a demandé s'il y avait des cafards puis m'a expliqué qu'en Tunisie, elle en a vu des énormes, gros comme sa petite main, ce qui l'avait visiblement très impressionnée. Du nanan pour un meneur d'horreur.

Donc les cafards grimpent sur Tiffany pendant qu'au rez-de-chaussée, Jennifer se rend compte que la porte ne s'ouvre pas. La clé refuse de tourner dans la serrure. Les trois filles foncent dans la salle de bains puis dans le salon pour essayer de trouver une fenêtre ouverte. Francesca les engueule en leur disant qu'elles ne connaissent rien aux films d'horreur. Parce que dans un film d'horreur, on ne se barre pas comme ça de la maison. Elle a bien raison car y'a pas moyen. Tiffany, elle, hurle. Les cafards lui grimpent dessus, la mordent et lui sucent le sang.

Dans le couloir, l'homme aux yeux rouges a disparu. Jennifer, Océane et Sabrina remontent à l'étage pour voir ce qu'il advient de leur sœur. Elles la trouvent en soutien-gorge et culotte, en train de se gratter la peau jusqu'au sang (ce qui a provoqué une Blessure). Des cafards, aucune trace. Tiffany est interloquée. Comment, quoi, qu'est-ce ? Puis la joueuse percute : « C'est peut-être que c'était dans ma tête tout ça ». Peut-être bien, en effet.

Que faire maintenant ? La seule chose de raisonnable en pareille circonstance : se recoucher mais veiller, portables ouverts. J'adôôôre. Et bien sûr, j'en profite : les téléphones s'éteignent tous en même temps et soudain se rallument. Des photos s'affichent sur les écrans : ce sont les cadavres des PJ, étendus dans la maison. Elles ont été déchiquetées, y'a du sang partout. Sabrina flippe, les autres ne sont pas rassurées. Jennifer demande qui a envoyé les photos, je réponds qu'elles viennent de leurs propres comptes et boîtes mail. Elles se les sont envoyées les unes aux autres. Re-flippe.

Dans l'escalier, les pas lourds reviennent à la charge. Branle-bas de combat : tout le monde se rue sur le matos de nettoyage/bricolage pour trouver des armes. Hop, mini brainstorming : j'autorise un unique couteau (hé ouais, le plan kebab, c'était forcément pour éviter de cuisiner). Pour le reste, faut trouver des idées un minimum crédibles. Le bouclier, c'est non. Le balai, ça le fait. La bombe anti-cafards, la boîte d'allumette, le râteau et la paire de ciseaux aussi. Francesca propose un marteau, que j'aurais également validé.

Tiffany sort de la chambre en mode guerre et tombe nez à nez avec l'homme aux yeux rouges. Là normalement, on devrait enchaîner sur un climax de brutasse, mais on n'a pas le temps. Il est 18h et les parents arrivent pour récupérer leur progéniture. Ayant vu l'heure tourner, je savais qu'on n'aurait pas le temps de finir et m'étais préparé. Je plie le truc en trente secondes : Tiffany frappe l'homme à grands coups de balai, il lui déchire la gorge avec ses mains griffues, elle se réveille en hurlant. On est dimanche matin, le soleil brille déjà. Elle est dans son sac de couchage, à côté de ses trois sœurs. Tout ça n'était qu'un vilain cauchemar.

Générique



Le bilan

Une partie trèèès sympa. Conditions de jeu assez rock'n'roll bien sûr (du bruit, du mouvement, plein de gamins qui viennent et qui vont, tout ça) mais ce n'est pas comme si je n'avais pas l'habitude. J'ai vraiment regretté pour Francesca, qui n'a pas décollé de la table. Si la partie avait été jusqu'à son terme, je lui aurais très probablement refilé l'antago à jouer. Hé, elle connaît Massacre à la tronçonneuse et Scream !



*



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Sombre 1 et Sombre 2, les deux premiers numéros de la revue consacrée à Sombre, sont disponibles. 72 pages au format A5 et à pas cher (prix libre, minimum 7 euros par numéro + port). Pour commander, c'est par ici.
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyDim 25 Nov - 11:31

M'est avis que Francesca va commander un exemplaire de Sombre pour noël...
C'est courageux d'animer pour des enfants (je pense aussi au sieur "Crapaud") mais indispensable "to keep the game alive". Toutes les ficelles de bases tournent du feu de dieu et en plus ils te livrent tellement de cordes pour les pendre que tu te crois au supermarché du MJ un jour de déstockage.
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Johan Scipion
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MessageSujet: Re: Sombre   Sombre - Page 2 EmptyDim 25 Nov - 12:31

deathambre a écrit:
C'est courageux d'animer pour des enfants

C'est surtout très fun. Rock'n'roll mais fun. Je ne ferais pas que ça bien sûr, mais c'est vraiment un truc que j'apprécie. J'aime leur enthousiasme, leur spontanéité, leur puissante capacité d'immersion.

Ce que je veux dire, c'est que je ne suis pas en croisade. Je ne fais pas de la démo en ludo pour sauver le jdr. Hé, Terres Etranges n'est pas la Fédé. ;-) Je le fais parce que je trouve ça intéressant et que ça m'éclate. C'est d'ailleurs le cas de tout ce que je fais autour de Sombre.

La position de Crapaud est forcément différente. Il est ludothécaire, lui. Mais moi, je ne suis qu'un auteur biclassé démonstrateur. Mon moteur à moi, c'est le fun. La vie est trop courte pour s'emmerder dans le boulot, pas vrai ? Very Happy



Citation :
Toutes les ficelles de bases tournent du feu de dieu et en plus ils te livrent tellement de cordes pour les pendre que tu te crois au supermarché du MJ un jour de déstockage.

Ouais et c'est juste excellent. Parce que les gamins ont une telle capacité d'immersion qu'ils réfléchissent très peu en métajeu. Ils commentent la fiction, et digressent abondamment, mais quand il s'agit de jouer leur personnage, ils sont à fond dedans. Et bien sûr, ils enchaînent les actions suboptimales, pile poil comme dans les films d'horreur.

Tu as ça aussi chez certains adultes débutants, mais ça ne dure jamais très longtemps : dès la deux ou troisième partie, ils commencent à chopper des réflexes rôlistes. Les gosses, non.

Ils ont une capacité hallucinante à sortir et rentrer dans la fiction en un clin d'œil. Avec les adultes, l'immersion est lente, progressive. Les gamins sont dedans tout de suite, mais clignotent en permanence fiction-réalité-fiction. Ils ne sont pas capables de rester attentionnés très longtemps et ils ne contrôlent pas bien leurs émotions. Elles les débordent de partout. Ils ont besoin de sortir souvent du jeu pour gérer ça.

Au début, c'est hyper déconcertant, mais je commence à m'habituer. Le truc, c'est de jouer avec les enfants qui, à l'instant T, sont dans la fiction. Les autres raccrocheront les wagons plus tard. Du coup, la table est à géométrie variable permanente, ce qui demande une bonne capacité d'adaptation de la part du meneur. Et bien sûr, ça m'intéresse parce que ça me sort de ma zone de confort rôliste. Le phénomène existe aussi avec les adultes, mais je le gère différemment. Quand un joueur adulte décroche du jeu et que j'estime que ce décrochage met la partie en danger, je le rappelle à l'ordre. Je ne laisse pas une blague de blonde me pourrir l'ambiance.

Avec les enfants, c'est juste pas possible. Parce qu'ils ne décrochent pas pour les mêmes raisons : chez eux, le décrochage permanent n'est pas de l'antijeu, c'est simplement leur manière de fonctionner. Faut s'en accommoder. Ce qui ne m'empêche pas de faire le gendarme si je sens que y'a besoin, hein. Faire preuve d'autorité à ma table ne me pose aucun problème. À Suresnes il y a quelques mois, avec une table de préados, j'ai menacé d'en virer un qui foutait le dawa. Et je l'aurais fait s'il ne s'était pas calmé un peu.
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